«Si l'extrémisme religieux qui a englouti le monde arabe est un serpent responsable des actes de brutalité et de barbarie les plus odieux et les plus injustifiés, la tête de ce serpent se trouve à Riyad», considère le journaliste John Wight.
Le prétendu gouvernement de saoudien vient de menacer : si les choses ne changent pas en Syrie, il aura recours au «plan B», prouvant ainsi que l'arrogance et l'impertinence de cette dictature médiévale ne connaît pas de limites.
Soyons clairs : si l'extrémisme religieux qui a englouti le monde arabe au cours des dernières années est un serpent responsable des actes de brutalité et de barbarie les plus odieux et les plus injustifiés que ce monde n’ait jamais connu, la tête de ce serpent se trouve à Riyad.
Ce n’est pas pour dire que l'Arabie saoudite doit être envahie et occupée - nous avons certainement vu suffisamment de ces invasions et occupations pour savoir qu'elles ne font qu'aggraver la situation plutôt que de l’améliorer. Mais il est, vraiment, nécessaire que des pays comme les Etats-Unis, le Royaume-Uni et la France reconsidèrent leurs politiques étrangères qui sont depuis longtemps orientées dans le sens d’un maintien d’étroites relations avec un gouvernement qui, par le biais du poison du sectarisme religieux, a fait plus pour déstabiliser la région que n’importe qui d’autre.
Ce sectarisme s’inscrit dans la doctrine sunnite wahhabite qui donne aux Saoudiens la légitimité dont ils jouissent en tant que «gardiens de la vraie foi», et qui est une interprétation littérale de l'islam sunnite, incompatible avec le monde moderne et toutes les normes de la décence humaine.
Il est stupéfiant de penser que cet Etat où les droits humains sont considérés comme un concept étranger, un Etat qui décapite autant, voire plus de gens que Daesh, n'a pas seulement eu la possibilité de prospérer mais a aussi été accompagné par ses amis occidentaux sur ce chemin – et ce au point de participer aux entreprises d’ultimatums et de menaces faites aux gouvernements laïques et non-sectaires, tels que le gouvernement syrien à Damas. Et ce à la manière dont une famille mafieuse de New York revendiquerait son droit sur le bout de gazon contesté.
Les efforts des Saoudiens dans la propagation et la diffusion de l'influence du wahhabisme ne se limitent pas au Moyen-Orient
Dans toute autre circonstance, on pourrait en rire.
Sauf que, pour le peuple syrien, ce sujet est loin d'être amusant. Au cours des cinq dernières années, ils ont vu des milliers de fous, djihadistes, salafistes déchirer leur pays et être bien décidés à revenir en arrière, au VIIe siècle, en faisant de la Syrie la fosse commune des nombreuses communautés minoritaires qui avaient fait de la société syrienne, quel que soit son gouvernement, une mosaïque culturelle riche et diversifiée, offrant un espoir dans une région assaillie par les forces centrifuges du sectarisme.
La question cruciale qui a préoccupé beaucoup d'entre nous, tout au long du conflit en Syrie, n’a pas été de savoir si des groupes tels que le Front al-Nosra ou Daesh avaient reçu le soutien de l'Arabie Saoudite, mais si ledit soutien avait émané de particuliers ou de l'Etat - ou peut-être même de l'Etat par le biais des particuliers.
Comme l’a écrit le journaliste britannique Patrick Cockburn dans son livre The Rise of Islamic State (La montée de l’Etat islamique) : «le rôle de l'Arabie Saoudite dans la montée et le retour d'Al-Qaïda est souvent mal compris et sous-estimé.» Il poursuit pour identifier le rôle saoudien dans la «propagation du wahhabisme, la version fondamentaliste de l'islam du XVIIIe siècle qui impose le charia, relègue les femmes au statut de citoyens de deuxième classe et considère les musulmans chiites et soufis comme des non-musulmans à être persécutés au même titre que les chrétiens et les juifs».
Cockburn va même jusqu’à prétendre que le wahhabisme a «de nombreuses similitudes avec le fascisme européen des années 1930».
L'argent saoudien finance la construction des mosquées et des écoles où on promeut la théologie et l'idéologie wahhabite au détriment de toutes les autres interprétations du Coran
Les efforts des Saoudiens dans la propagation et la diffusion de l'influence du wahhabisme ne se limitent pas au Moyen-Orient. Dans un article paru en 2015 et intitulé The Saudi Connection: Wahhabism and Global Jihad (La filière saoudienne : le wahhabisme et le djihad mondial) publié sur un site américain conservateur, World Affairs, les auteurs Carl E. B. Chosky et Jamsheed K. Chosky révèlent que «80% des 1 200 mosquées aux États-Unis ont été construits après 2001, le plus souvent avec un financement saoudien. En conséquence, l'influence wahhabite sur les institutions islamiques aux États-Unis a été considérable vers l’année 2003, selon un témoignage au Sénat américain. Des centaines de publications faites par le gouvernement saoudien et ses filiales, résolument intolérantes envers les chrétiens, les juifs, et d'autres Américains, ont été diffusées à travers le pays [les Etats-Unis] aux alentours de 2006».
Cette influence pernicieuse s’est répandue dans le monde, où l'argent saoudien finance la construction des mosquées et des écoles où on promeut et endoctrine la théologie et l'idéologie wahhabite au détriment de toutes les autres interprétations du Coran.
Nous parlons d’un Etat qui d'une part use de sa considérable richesse issue du business pétrolier pour devenir encore plus indispensable pour l'Occident en tant que client important des industries d'armement occidentales et allié arabe prêt à accepter l’hégémonie géopolitique de l’Ouest dans la région. D'autre part, il se sert de son «contrôle des 4/5 de toutes les maisons d'édition islamiques à travers le monde pour faire entendre [ses] propos agressifs dans des lieux éloignés».
Les Saoudiens sont dépendants du clergé wahhabite dans leur politique intérieure pour veiller à ce que toute dissidence dans le pays soit étiquetée en tant qu’apostasie et pour que la punition soit sévère. En retour, ces membres du clergé obtiendraient le soutien de l'Etat et le financement leur permettant de cracher leurs conneries remplies de haine. C’est exactement la définition d’une alliance sacrilège.
En ce qui concerne le conflit en Syrie, les Chosky nous informent que «plus de 11 000 étrangers wahhabites radicalisés avaient rejoint le djihad syrien en septembre 2014, alors que les citoyens français et britanniques constituaient la majeure partie des recrues européens.
Pendant trop longtemps Washington et ses alliés européens ont été réticents à faire face à la principale source de désordre et de chaos qui ont englouti la région
En moyenne la formation d’un djihadiste ne coûte que 2 500 dollars – indiquent avec fierté aux donateurs potentiels les collecteurs de fonds, exhortant les premiers à donner plus. Après avoir été marqués par le sang dans la bataille, de nombreux djihadistes reviennent dans leur pays d'origine, tout comme un des frères Kouachi - ou même les deux - [responsables de l'attaque terroriste Charlie Hebdo à Paris], après un temps au Yémen».
Pendant trop longtemps Washington et ses alliés européens ont été visiblement réticents à faire face à la principale source de désordre et de chaos qui ont englouti la région au cours des dernières années. Cette réticence - ou cette incapacité - nous confirme que la rhétorique qu'ils mènent sans cesse en promettant d’affronter et de vaincre le terrorisme n'a jamais été conjuguée à l'action nécessaire pour atteindre ce but.
Le seul «Plan B» qui devrait être discuté, par un monde intéressé à l’idée de mettre fin au cancer de l'extrémisme et du terrorisme, est celui qui comporte des mesures limitant la puissance et l'influence des Saoudiens dans la propagation et la diffusion de ce poison. En fait, peu importe le «Plan B» - cela devrait aussi être au cœur du «Plan A».
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