Un déluge de propagande et un échec habituel du FN ont fait élire Emmanuel Macron. Cette élection donne un sentiment de malaise et annonce des problèmes à venir, estime François Asselineau.
RT France : Quelle est votre appréciation du résultat du deuxième tour de la présidentielle ?
François Asselineau (F. A.) : Cette élection est sans précédent, puisque pour la première fois on voit élire à la tête de l’Etat quelqu’un qui se présente pour la première fois à une élection. C’est du jamais vu ! Quelqu’un qui est très jeune, qui a 39 ans, qui est un banquier d’affaires et qui n’a en fait pas beaucoup d’expérience politique. Les Français sentent donc qu’il y a quelque chose qui ne va pas quelque part. Ce qui s’est passé, c’est que, en réalité, le candidat a été promu par l'oligarchie financière et industrielle euroatlantiste, à partir de la mi-2014 – Jacques Attali au mois d’août 2014 a annoncé comme ça qu’Emmanuel Macron qui était inconnu du grand public, avait l’étoffe pour être président de la République. Et à partir de ce moment-là, on a vu tout au long de l’année 2015 et surtout de l’année 2017 un déluge de propagande : Emmanuel Macron a fait 75 couvertures de magazines et a été l'objet de 17 000 articles de presse. En réalité, cette élection donne un sentiment de malaise et annonce beaucoup de problèmes à venir.
Un sondage par ailleurs très inquiétant pour lui a montré que seulement 16% des gens qui ont voté Emmanuel Macron l’ont fait pour son programme
RT France : Comment voyez-vous le quinquennat d’Emmanuel Macron ?
F. A. : Je pense que cela va très mal se passer, parce que, si vous regardez, il y a une réalité juridique, et la réalité juridique, c’est ce qu’il a été élu par 66% des votants. Mais la réalité sociologique et politique, elle est ailleurs : c’est qu’il y a 9% des Français qui ne sont pas inscrits sur les listes électorales et que parmi les gens qui sont inscrits, il y a 25% des gens qui ne sont pas allés voter, ce qui est un record. Il y a de plus 9% des gens qui sont allés voter blanc ou nul, de telle sorte qu’Emmanuel Macron a obtenu 44% des voix des personnes inscrites et 40% de l’ensemble des Français, si l'on prend en compte les non-inscrits.
Un sondage par ailleurs très inquiétant pour lui a montré que seulement 16% des gens qui ont voté Emmanuel Macron l’ont fait pour son programme. La moitié de son électorat l’a fait pour chasser Marine Le Pen. Si 16% des Français qui ont voté pour Emmanuel Macron l’ont fait pour son programme, et qu'il ne représente que 40% des Français, cela veut dire en fait qu’il y a 6% à 7% des Français qui approuvent son programme.
Macron va mettre en œuvre un programme qui est celui des grandes orientations politiques fixées par la Commission européenne, qui est un programme de régression sociale phénoménale
RT France : Croyez-vous que cela va être difficile pour lui de rassembler une majorité à l’Assemblée nationale ?
F. A. : On va voir ce qui va se passer à l’Assemblée nationale, parce qu’il va y avoir un phénomène de manipulation de l’opinion par les médias, on va dire qu’il faut donner une majorité à Emmanuel Macron. Mais c’est un jeune homme, il a 39 ans, il n’a pas d’expérience. Il a été soutenu pas des forces puissantes, notamment par beaucoup d’anciens Premier ministres comme François Fillon ou Manuel Valls, au passage, la droite et la gauche ne vont plus rien dire. Ces gens qui l’ont soutenu vont exiger d’avoir des postes, bien entendu. On va avoir un premier gouvernement qui va durer un mois, le temps que les élections législatives se passent, et puis un deuxième gouvernement après les élections législatives, et après il va y avoir la suite des événements. S'il a une majorité, s'il décide de gouverner par ordonnances, sans passer par le Parlement, pendant six mois... On va voir comment cela va se passer. Il va mettre en œuvre un programme qui est celui des grandes orientations politiques fixées par la Commission européenne, qui est un programme de régression sociale phénoménale. Cela va être l’augmentation de la TVA et la baisse de l’impôt sur les grandes sociétés – cela veut donc dire qu’on va faire payer les pauvres pour enrichir les plus riches.
Marine Le Pen a sabordé sa candidature lors du débat, où elle s'est comportée d’une façon totalement indigne [...] Le Front national existe depuis 45 ans, justement pour faire élire ses adversaires
Il va y avoir la baisse des prestations chômage, la diminution du SMIC, la suppression progressive des CDI, les contrats à durée indéterminée, le bradage des industries stratégiques françaises à des intérêts allemands ou américains, la suppression progressive des départements, l’assujettissement de la France aux coalitions de Washington et de l’OTAN, notamment au Moyen Orient, la France va être encore plus soumise à l’OTAN, qu’elle ne l’avait été sous François Hollande.
Les Français ne sont pas d’accord avec tout ceci et j’estime que la France va faire face à de très gros problèmes dans le semestre qui vient.
RT France : Vous avez déjà évoqué le fait qu’un grand nombre de Français avaient voté pour Emmanuel Macron par défaut, pour battre Marine Le Pen, mais elle a quand-même fait un score de plus de 30%. Que signifie-t-il ?
F. A. : Elle a fait un score de 33%, qui est extrêmement inférieur à ce qu’elle espérait. Elle espérait être élue, du moins c’est ce qu’elle disait. En fait je pense qu’elle ne le souhaitait pas, qu'elle a sabordé sa candidature, comme on l’a vu lors du débat, où elle s'est comportée d’une façon totalement indigne. Vous savez que je développe une analyse qui est très différente de ce que disent beaucoup de gens. Je considère que le Front national existe depuis 45 ans, justement pour faire élire ses adversaires. Encore une fois, je rappelle que c’est la septième fois qu’un membre de la famille Le Pen se présente à l’élection présidentielle, pour autant d'échecs.
Alors, effectivement, c’est un succès relatif dans la mesure où jamais le parti n’avait obtenu autant de voix, enfin cela ne fait jamais que les 10 600 000 de voix, soit environ 22% des électeurs inscrits, cela reste donc très inférieur à ce qu’il faudrait pour une majorité. Et surtout, Marine Le Pen, comme d’ailleurs Jean-Luc Mélenchon à gauche, sont ce que l’on appelle des très bons candidats de premier tour, c’est-à-dire qu'ils peuvent arriver au deuxième tour. Ce ne sont pas des candidats de second tour parce qu’ils sont dans l’incapacité de rassembler 51%. Il n’y aura jamais en France 51% de la population qui votera pour Marine Le Pen, ce n’est pas possible. C’est justement pour ça que les grands médias passent leur temps à promouvoir Marine Le Pen ou Jean-Luc Mélenchon, parce qu’on sait que quiconque arrive au deuxième tour tour face à Marine Le Pen, sera élu, comme on vient de le voir avec Emmanuel Macron. Un âne serait élu à l’Elysée face à Marine Le Pen.
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