Pour Pierre Bréchon, l'option d'Alain Juppé comme candidature de substitution à François Fillon, dont la campagne s'affaiblit de jour en jour, apparaît comme «la plus légitime» mais reste néanmoins cernée d'obstacles. Explications.
RT France : Les défections d'élus des Républicains et de l'UDI s'accumulent. Dans quelle mesure ces départs peuvent-ils affecter les militants et les électeurs ? La mobilisation du 5 mars peut-elle suffire à asseoir la légitimité de la candidature de François Fillon dans son camp ?
Pierre Bréchon (P. B.) : Les défections d'élus sont déjà le signe d'un affaiblissement de la candidature de François Fillon. Depuis les révélations sur les emplois des membres de sa famille, il a perdu plusieurs points dans toutes les enquêtes d'intentions de vote, surtout parmi ses sympathisants de centre droit. Le noyau dur de son électorat résiste, probablement par conviction à l'égard de son programme. Mais les défections qui s'accumulent parmi les élus devraient continuer à faire baisser son potentiel électoral. Les meetings du week-end ne me semblent pas de nature à relancer la campagne de François Fillon. Il n'est plus en état de véritablement défendre son programme, devant en permanence défendre son honneur.
Alain Juppé a été battu à la primaire mais si le vainqueur se retire, c'est lui qui devient le candidat le plus légitime
RT France : L'alternative d'une candidature d'Alain Juppé souhaitée par plusieurs personnalités démissionnaires peut-elle fédérer la droite après sa défaite à la primaire ?
P. B. : L'alternative d'une candidature d'Alain Juppé est encore loin d'être effective. Il faut pour cela que François Fillon renonce mais aussi que l'ensemble des tendances de LR se tournent vers lui et que ce soutien se traduise par de nombreux parrainages de personnes n'ayant pas déjà donné leur soutien au précédent candidat républicain. Certes, Alain Juppé a été battu à la primaire mais si le vainqueur se retire, c'est lui qui devient le candidat le plus légitime.
RT France : Ce contexte de crise interroge aussi sur l'état dans lequel le parti va pouvoir aborder les élections législatives. Les Républicains peuvent-ils encore se relever de cette campagne ?
P. B. : Les législatives sont encore loin. On ne peut être trop en avance sur l'histoire ! A priori, les candidats sont déjà largement investis et beaucoup de candidats LR sont connus et bien implantés dans les circonscriptions.
Les divisions entre les différentes tendances ne sont pas profondes qu'à droite
RT France : Ces divisions et fractures peuvent-elles profiter à certains camps des Républicains ou sont-elles avant tout favorable à Marine Le Pen et Emmanuel Macron ?
P. B. : Pour être élu, il y a toujours de nombreuses difficultés, clivages et conflits à surmonter. Les divisions entre les différentes tendances ne sont pas profondes qu'à droite. La gauche est très divisée et on voit mal comment elle referait son unité entre socialistes et gauche radicale. Emmanuel Macron attire à la fois au centre gauche, au centre et au centre droit. Son électorat apparaît encore très hésitant et l'inconnu plane sur sa capacité à faire élire une majorité de députés qui lui seraient favorables. Quant à Marine Le Pen, elle n'est pas à l'abri d'un effet des affaires sur son score, même si elle est aujourd'hui très haut dans les sondages pour le premier tour. Mais il est évident qu'elle continue à être rejetée par beaucoup, ce qui obère fortement ses capacités à gagner lors du second tour.
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