Trump et le Venezuela : le retour du colonialisme

Trump et le Venezuela : le retour du colonialisme Source: Sputnik
Trump et le Venezuela : le retour du colonialisme. [Image d’illustration]
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Dans le fouillis de ses déclarations, on a parfois du mal à comprendre ce que Trump veut réellement faire au Venezuela. L’analyse d’Alexandre Regnaud révèle que ce n’est rien d’autre que du bon vieux colonialisme, visant à s’approprier les riches ressources pétrolière du pays.

Les États-Unis de Trump n’en sont pas à leur première tentative de déstabilisation au Venezuela. Sous son premier mandat, en 2019, une tentative de coup d’État autour de Juan Guaidó s’était déjà soldée par un échec. 2025, nouveau mandat, nouvel essai.

Cette fois, l’excuse officielle de la nouvelle administration Trump est la lutte contre le trafic de drogue. Ce qui a donné des scènes spectaculaires d’assassinats et de piraterie dans la mer des Caraïbes, sur des embarcations présentées comme participant au trafic. Cela n’est pas sans conséquence, puisque le secrétaire à la Défense des États-Unis, Pete Hegseth, est accusé de crime de guerre, et qu'on évoque concernant le Haut-Commissaire de l'ONU aux droits de l'homme,  de « solides indices d'exécutions extrajudiciaires », notamment autour de la mise à mort de survivants lors de frappes le 2 septembre, totalement contraires au droit de la guerre et de la mer.

Mais ce n’est pas un problème pour les États-Unis, puisque l'administration Trump a également unilatéralement désigné le régime du président Nicolás Maduro comme une « organisation terroriste étrangère ». Ce qui, d’après le fameux « ordre international fondé sur des règles », leur permet de faire à peu près n’importe quoi d’illégal et d’immoral.

Bien entendu, le narcotrafic n’est qu’un prétexte, puisqu’on estime que la drogue arrivant aux États-Unis en provenance directe du Venezuela ne représente qu’entre 5 % et 8 % du total du trafic de cocaïne sud-américain.

Le motif réel apparait de plus en plus avec le temps. Cela a commencé par un nouvel acte de piraterie le 10 décembre, avec l’abordage dans les eaux internationales du pétrolier « Skipper ». Et cela continue une semaine plus tard, avec l’annonce d'un « blocus total et complet » pour tous les pétroliers sous sanctions américaines entrant ou sortant du Venezuela, grâce au déploiement de « la plus grande armada jamais assemblée » dans la région. Il n’est d’un seul coup plus question de drogue, mais bien du véritable objectif : le pétrole !

Trump se justifie, demandant que le Venezuela restitue le pétrole et les actifs « volés » aux États-Unis.

Derrière une formulation floue, il fait référence à la nationalisation des champs pétroliers par Hugo Chavez le 28 février 2007. Toutes les compagnies étrangères opérant dans le pays se sont alors vues proposer de rejoindre des coentreprises, dans lesquelles au moins 60 % des actions appartiendraient à la compagnie d'État, PDVSA. Le décret présidentiel a affecté plusieurs compagnies américaines, comme Chevron, ConocoPhillips ou Exxon Mobil, qui ont perdu le contrôle des champs pétroliers en cours de développement dans le bassin du fleuve Orénoque. Leur préjudice fut alors estimé à au moins 17 milliards de dollars. Une partie a ensuite été compensée directement par les autorités vénézuéliennes, mais pas entièrement, et certaines entreprises réclament encore des compensations, via des affaires en cours devant des instances d'arbitrage internationales. Trump s’en sert de prétexte.

Car ce que veut Trump, c’est renverser Maduro, un « regime change » de plus, comme en Ukraine en 2014. Mais malgré leur « grande armada » et les menaces de frappes, les États-Unis n’ont pas les moyens militaires d’envahir le Venezuela, il leur faut donc une autre méthode.

La stratégie de blocus vise alors à priver de revenus le gouvernement Maduro. En effet, l'économie déjà fragile du Venezuela dépend à environ 80% des revenus pétroliers, ce qui amène donc un risque de crise humanitaire, et de possible renversement du régime.

La méthode est un classique américain, elle rappelle à l’origine celle des sanctions antirusses.

Une fois Maduro renversé, le but sera de le remplacer par Maria Corina Machado, qui vient fort opportunément de recevoir le Prix Nobel de la paix (pour ceux qui douteraient encore du caractère entièrement fictif de cette distinction) et qui a fait immédiatement allégeance en le dédiant à Trump. Elle a entre-temps été exfiltrée du Venezuela, de son propre aveu en ayant « reçu l'aide du gouvernement des États-Unis ». Une parfaite marionnette, qui d’après le New York Times, aurait fait la promesse concrète aux conseillers de Donald Trump que « si elle accédait au pouvoir, elle ouvrirait le secteur pétrolier aux investissements américains ».

Et la boucle est bouclée.

Naturellement, l’amour de Trump pour le pétrole vénézuélien est sans doute en rapport avec le fait que les dons de la part de dirigeants ou d’entreprises du secteur pétrolier, directement à sa campagne et aux PAC qui le soutenaient pour son élection en 2024, sont estimés à au moins 75 millions de dollars, minimum. Et qu’un rapport cité par le Guardian identifie plus de 40 personnes de son administration ayant travaillé directement pour des entreprises de charbon, de pétrole ou de gaz.

Trump est par ailleurs un fervent partisan de la doctrine Monroe (1823). Le fameux document de « Stratégie Nationale de Sécurité 2025 », qui a fait couler tant d’encre, parle ouvertement de « corollaire Trump », référence au précédent « corollaire Roosevelt » (1904) de la doctrine. La philosophie en est toujours la même : les États-Unis considèrent l’entièreté du continent américain comme leur appartenant, en particulier l’Amérique latine, et comme relevant de leur seule compétence et ingérence.

Si l’on résume, nous avons donc une tentative de renversement d’un gouvernement par un État tiers, dans un espace géographique qu’il considère comme lui étant réservé, afin d’y mettre en place un gouvernement fantoche à son service. Dans le but principal d’accaparer les matières premières de ce pays au profit de ses propres industries et au détriment de la population locale.

Soit précisément un processus qui a un furieux air de déjà-vu, en Asie comme en Afrique et qui porte un nom de triste mémoire : le (néo) colonialisme.

Les opinions, assertions et points de vue exprimés dans cette section sont le fait de leur auteur et ne peuvent en aucun cas être imputés à RT.

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