Les médias occidentaux préfèrent ne pas trop examiner le cas des athlètes américains prenant des substances interdites, et se contentent plutôt d'accuser les hackers russes d'avoir piraté ces informations, indique le journaliste sportif Marcello Foa.
L'Agence mondiale antidopage a confirmé que ses bases de données avaient été piratées, précisant que l'attaque avait été effectuée par le groupe de hackers appelé «Fancy Bears».
A en juger par les unes du mercredi 14 septembre, les liens présumés de cette organisation avec la Russie ont attiré l'attention des médias beaucoup plus que le scandale de dopage en lui-même. Le gouvernement russe a nié toute implication.
L’affaire de dopage a été traitée de manière très particulière, insistant sur le fait que les Russes étaient les méchants ; et tout doit être vu sous cet angle
RT : Pourquoi les médias ont-ils choisi de se concentrer sur l’attaque des hackers plutôt que sur les révélations en elles-mêmes ?
Marcello Foa (M. F.) : C'est une réaction rapide typique. L’affaire de dopage a été traitée d’une manière très particulière, insistant sur le fait que les Russes étaient les méchants, etc. ; et tout doit être vu sous cet angle. Les médias dominants et les gouvernements ont en réponse essayé de détourner l’attention de la nouvelle centrale, à savoir que certains athlètes avaient pris des médicaments, en mettant en avant que les hackers avaient réussi à accéder à ces documents. C’est typique et ça marche très bien quand on a besoin d'instiller l'état d'esprit adéquat dans les médias. Et l'état d'esprit adéquat, tel que le conçoit l’opinion publique occidentale, a été fabriqué il y a déjà longtemps. C'est un jeux assez facile.
C’est une supposition, cela pourrait être l'œuvre des Russes, mais il n'y en a aucune preuve
RT : L'AMA pointe la Russie du doigt. Cet incident aggravera-t-il encore les relations déjà tendues entre les deux parties ?
M. F. : Oui, certainement. Sur quoi se basent-ils, en affirmant que les hackers sont russes ? C'est une pure spéculation. Ce que l'on voit, c'est que, généralement, des hackers essaient de faire en sorte qu'on ne puisse savoir d'où l’attaque a été lancée. Il est donc très difficile de savoir qui s'introduit dans vos archives ou sur votre site. C'est une accusation très étrange. C’est une supposition, cela pourrait être l'œuvre des Russes, mais il n'y en a aucune preuve... Cela correspond bien à ce qui a commencé il y a quelques mois.
Cela relève du deux poids, deux mesures : les Russes sont tous méchants et ils ont tous été bannis des Jeux paralympiques, alors que d'autres athlètes ont fait face à une attitude très laxiste de l'AMA
RT : Croyez-vous que les athlètes impliqués dans ce scandale soient traités de manière différente par les médias ?
M. F. : Oui, les athlètes américains ont été traités différemment. Ce qui est surprenant, c'est que certains athlètes aient été autorisés à prendre ces substances. Cela aurait dû été rendu public tout de suite après la décision de l'AMA. Et cela n'a pas eu lieu. Pourquoi n'ont-ils pas dit que Serena Williams ou Simone Biles avaient pris certains médicaments avec une autorisation médicale ? Ce qui est frappant, c'est le silence autour du sujet, ce qui nous fait nous demander si les victoires, ou les résultats sportifs, ont été véritablement honnêtes ou pas. Mais bien sûr, cela relève du deux poids, deux mesures : les Russes sont tous méchants et ils ont tous été bannis des Jeux paralympiques, alors que d'autres athlètes ont fait face à une attitude très laxiste de l'AMA, ce qui est injuste.
RT : Si ces médicaments leurs ont vraiment été prescrits, ce fait aurait dû être rendu public, afin que d'autres athlètes soient au courant de la situation, n'est-ce pas ?
M. F. : Oui, cela aurait dû être rendu public, ce qui n'a pas été le cas. En outre, quel genre de maladies ont ces athlètes ? Nous n'en savons rien. C’est vraiment déroutant. Dans ces circonstances, on peut douter qu'ils aient vraiment eu besoin de ces substances. Tout cela est dommageable pour la réputation de l’AMA, mais on focalise l'attention sur les soi-disant hackers russes.
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