L'amour plus fort que la haine : ses désaccords avec Trump ne fragilisent pas l'atlantisme de Macron

L'amour plus fort que la haine : ses désaccords avec Trump ne fragilisent pas l'atlantisme de Macron© JEAN-PHILIPPE KSIAZEK Source: AFP
Emmanuel Macron la main sur le cœur en meeting pendant La Marseillaise
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Leurs nombreuses dissensions pourraient laisser croire que la France se détournerait au moins partiellement des Etats-Unis : pourtant, Emmanuel Macron ménage Donald Trump, soucieux de préserver un lien franco-américain qu'il estime indépassable.

Le président de la République Emmanuel Macron a appelé ce 29 juin à «ne pas rompre» avec les Etats-Unis ni «isoler» le pays, a rapporté l'AFP. Sans pour autant nier les désaccords qui l'opposent à Donald Trump, le chef d'Etat français a ainsi justifié son choix de l'inviter au défilé du 14Juillet, qu'ont critiqué certains responsables politiques. L'attitude d'Emmanuel Macron envers Donald Trump a de quoi décevoir les détracteurs les plus convaincus du président américain et surprendre les observateurs. 

En effet, nombreux sont les dirigeants européens à ne pas cacher une certaine réserve à l'égard de Donald Trump depuis que celui-ci a accédé à la Maison Blanche en novembre dernier. Sur de nombreux points, les positions adoptées par le président américain, quoique parfois sensiblement nuancées par des déclarations ultérieures voire même contredites par ses actes depuis son élection, sont à l'opposé de celles des chefs d'Etat et de gouvernement du Vieux Continent, de droite comme de gauche.

A plusieurs égards, Emmanuel Macron pourrait apparaître comme l'anti-Trump, tant dans sa communication que dans ses opinions. L'hebdomadaire The Nation allait jusqu'à considérer que son élection marquait un «coup d'arrêt au trumpisme». Aux Etats-Unis, nombre d'opposants au président républicain semblent en effet séduits par le jeune dirigeant français, se montrant très réceptifs aux différents signaux qu'adresse la communication de l'Elysée au monde entier. Pourtant, loin de voir dans ses divergences avec Donald Trump un motif imposant une réorientation de la politique atlantiste de la France, Emmanuel Macron semble, au contraire, considérer ces désaccords comme de simples accrocs – des épreuves tout à fait surmontables.

Un attachement très fort à la relation franco-américaine

Emmanuel Macron n'a jamais caché une sympathie de principe pour les Etats-Unis, et ce, bien avant d'accéder à l'Elysée. Dans un discours prononcé le 7 septembre 2016 à la French American Foundation, plateforme franco-américaine de promotion de jeunes dirigeants dont sont issues un grand nombre de figures éminentes de la scène politique française (parmi lesquelles Emmanuel Macron), celui qui venait de quitter son poste de ministre de l'Economie assurait ainsi que les liens entre Paris et Washington étaient «indéfectibles».

Loin d'être une simple déclaration de principe, ces propos reposent en réalité sur une conception de l'histoire et du rôle de la France dans le monde bien spécifique. Dans son livre-programme Révolution, paru en novembre 2016, celui qui n'était alors que candidat à l'investiture suprême développait  un aperçu de celle-ci en des termes peu équivoques. «L'axe atlantique qui structure l'Occident et qui a porté depuis l'après-guerre la politique des droits de l'homme et de la pacification est-il le plus important ? Je le crois profondément», écrivait-il. 

Monsieur Trump, regardez votre histoire : c’est la nôtre

A la différence d'un François Mitterrand, qui définissait l'Occident par la présence des monastères cisterciens, Emmanuel Macron semble ainsi considérer le rapport avec les Etats-Unis, pourtant fondés en 1776, comme un élément fondamental de l'identité occidentale. A la lumière de cet attachement, la phrase remarquée qu'il avait prononcée lors d'un meeting à Quimper en janvier 2017, et hâtivement considérée comme une «leçon» au président américain qui venait de critiquer l'Europe, prend un tout autre sens : «Monsieur Trump, n’oubliez jamais ce que vous nous devez votre liberté, votre existence. Regardez votre histoire : c’est la nôtre.» Dans l'esprit du président français, la réciproque est tout aussi valable.

Malgré les dissensions, Emmanuel Macron a toujours ménagé Donald Trump

Contrairement à d'autres, Emmanuel Macron s'est toujours gardé de critiquer ouvertement Donald Trump lors des différentes interviews auxquelles il a répondu alors qu'il était encore prétendant à l'Elysée. «Je n'ai pas à me prononcer sur un chef d'Etat étranger», répondait-il lorsqu'on l'interrogeait sur ce sujet dans l'émission Punchline en mars dernier. Outre que cette attitude prudente s'est révélée plutôt sage et lui a épargné un certain embarras lorsque, une fois devenu président, il a dû rencontrer Donald Trump, elle contraste fortement avec celle de Benoît Hamon, de Jean-Luc Mélenchon ou de François Fillon, qui ne se sont jamais privés de critiquer vertement le locataire de la Maison Blanche. «Je n'essaierai pas de récupérer [le vote des Américains] ou de le manipuler», avait-il résumé à France Info en novembre 2016, à l'issue des présidentielles américaines.

Plus marquant encore : alors que Marine Le Pen n'hésitait pas à se poser en Donald Trump à la française durant sa campagne, Emmanuel Macron s'est toujours refusé à établir un parallèle pourtant tentant entre les deux. «Marine Le Pen dirige un parti politique qui se passe de père en fille et qui se nourrit de la contestation des autres. Elle n'est pas un nouvel entrant dans la vie politique comme peut l'être monsieur Trump», déclarait-il par exemple le 11 novembre 2016, allant jusqu'à dire que les deux personnalités n'avaient «rien à voir». 

Emmanuel Macron a toujours pris soin de concentrer ses critiques envers Donald Trump sur ses choix politiques concrets et non sur sa personne, ni même sur son positionnement idéologique. Deux messages qu'il a adressés aux citoyens américains en fournissent un très bon exemple. Le premier était destiné aux chercheurs d'outre-Atlantique et fut publié en février, avant son élection ; le second a connu un retentissement mondial grâce à l'emploi du slogan de campagne de Donald Trump avantageusement détourné en «Make Our Planet Great Again». Dans un cas comme dans l'autre, en parlant directement aux Américains sans critiquer leur représentant, Emmanuel Macron a choisi la carte de la subtilité constructive plutôt que de la confrontation par de grandes condamnations morales. 

Le seul grand défaut de Trump : éloigner les Etats-Unis de l'Europe ?

La sortie la plus véhémente d'Emmanuel Macron à l'encontre de Donald Trump demeure sans conteste celle du 27 janvier dernier. Réagissant sur France Culture à une série de propos fracassants prononcés par le président américain dans la foulée de son élection, Emmanuel Macron les qualifiait alors d'«extrêmement graves et préoccupants» – un jugement éminemment sévère, en apparence.

En réalité, l'inquiétude exprimée par le futur président de la République ne concernait qu'un seul point : «C'est le choix d'une Amérique qui provoque, sur certains sujets, un déséquilibre des choses construites depuis tant de décennies.» L'objet de préoccupation d'Emmanuel Macron se restreignant donc à un éventuel retrait des Etats-Unis du jeu politique mondial... «Cela signifie que les Etats-Unis ne seront plus en situation de coorganiser la mondialisation et d'être les gendarmes du monde avec l'Union européenne», précisait-il de manière plus qu'éloquente, alors que Donald Trump agitait la menace de quitter l'OTAN.

Il est très important de ne pas rompre les discussions fortes et indispensables à certains équilibres mondiaux

Si leur président n'est guère sur la même ligne politique que la sienne, les Etats-Unis demeurent donc indispensables aux yeux d'Emmanuel Macron. «Il est très important de parfois partager des désaccords, de ne rien céder lorsqu'on défend une position juste comme c'est le cas sur le climat, mais de ne pas pour autant rompre les discussions fortes et indispensables à certains équilibres mondiaux», a-t-il ainsi résumé en marge de la réunion de préparation du G20 à Hambourg ce 29 juin. Cette théorie de «l'amitié critique», qui préfère un reproche sincère à une rupture silencieuse, semble relever d'un certain bon sens et d'une forme de pragmatisme dont Emmanuel Macron aime se targuer.

Pour autant, ce dernier semble bien moins soucieux d'afficher de telles précautions lorsqu'il critique, sans prendre soin de les dissocier, la Russie et la politique de Vladimir Poutine – qu'il associe sans problème à Marine Le Pen. Il y a là assurément le signe que ce n'est pas tant à une diplomatie de dialogue que tient le président français, mais à une diplomatie de dialogue... avec les Etats-Unis. Et finalement, qu'est-ce qu'une poignée de main un peu virile, lorsque l'on peut si bien s'entendre autour d'une éventuelle intervention militaire en Syrie ?

Lire aussi : Macron et Trump prêts à travailler à une «réponse commune» en cas d’attaque chimique en Syrie

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