«Avec les commentaires, vous avez fait le kamasutra de l'ensauvagement, depuis 15 jours, tous ensemble. Donc je vous laisse à votre kamasutra» : interrogé en marge d'un déplacement à Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme) le 8 septembre, Emmanuel Macron entendait clore un débat sémantique qui a agité ces dernières semaines les mondes politique et médiatique français. L'objet de la controverse : l'usage du terme «ensauvagement», pour qualifier l'évolution de la sécurité dans le pays. «Ce qui m'importe, c'est le réel !», a martelé le chef de l'Etat.
Quel est ce réel ? Un constat, d'abord : l'actualité de cet été, en France, a été marquée par un grand nombre de faits de violences, d'agressions voire d'homicides, qui ont défrayé la chronique et installé la thématique sécuritaire au cœur du débat national. Entre autres : des blessures infligées à des pompiers, des agressions de maires, des violences ciblant les forces de l'ordre, d'autres ayant éclaté pour des affaires de port du masque (à Brest, Neuilly-sur-Seine, Dijon...)... Et, surtout, plusieurs décès – de Philippe Monguillot, chauffeur de bus à Bayonne (Pyrénées-Atlantique), de la gendarme et championne de France militaire de judo Mélanie Lemée, d'un jeune homme prénommé Thomas... –, qui ont provoqué tout à la fois de vives émotions sur les réseaux sociaux, l'organisation de marches blanches, l'indignation de responsables politiques et une couverture médiatique conséquente.
Activistes et militants, en particulier du côté de la droite et des identitaires, ont appelé à ces occasions à nommer publiquement les coupables ou lancé des hashtags appelant à la «#Justicepour...», sur le modèle des mouvements contre la violence et le racisme au sein des forces de l'ordre du type Black Lives Matter. Ils entendaient, ainsi, mettre en lumière ce qu'ils considèrent être un phénomène d'insécurité spécifique à la société française actuelle, qui aurait été trop longtemps délaissé par la presse et les gouvernants. Soit : un «ensauvagement».
Pour tenter de distinguer les faits du phénomène politico-médiatique, mais aussi mettre en lumière le sentiment d'insécurité qui traverse la société française, RT France a interrogé des experts en criminalité, des représentants d'organisations de fonctionnaires (policiers, pompiers, professeurs), mais aussi des citoyens qui ont décidé de s'organiser pour dénoncer la violence qui, selon eux, gangrène leur espace de vie quotidien.
20 ans après les «sauvageons» de Jean-Pierre Chevènement, la notion d'«ensauvagement» s'impose dans le débat public. De la gauche au RN, en passant par la majorité présidentielle, les avis divergent quant à la pertinence de ce terme.
La France connaît-elle, factuellement, une hausse structurelle des violences ? Béatrice Brugère, vice-procureur de la République au TGI de Paris et Christophe Soullez, directeur de l’Office national de la délinquance et des réponses pénales, répondent à RT France.
Les serviteurs de l'Etat subissent-ils de plein fouet un «ensauvagement» de la société ? Auprès de RT France, certains fonctionnaires dénoncent un phénomène d'agressions gratuites les visant, d'autres pointent un abandon de la part des gouvernants.
De Palavas-les-Flots (Hérault) à Colombes (Hauts-de-Seine ) en passant par Marseille et Lyon, des initiatives associatives et citoyennes se développent, qui cherchent à alerter les autorités sur la délinquance et les incivilités – voire à les contraindre à agir.
Dans l'émission Interdit d'interdire, Frédéric Taddeï reçoit Sebastian Roché, directeur de recherche au CNRS, éditeur (Europe) de la revue Policing and Society, et Christophe Soullez, responsable de l'Observatoire national de la délinquance.