Par Philippe Migault Tous les articles de cet auteur
Philippe Migault est directeur du Centre européen d'analyses stratégiques, analyste, enseignant, spécialiste des questions stratégiques.

La Corée du Nord dans le collimateur des Etats-Unis : ridicules trumpettes de Jéricho

La Corée du Nord dans le collimateur des Etats-Unis : ridicules trumpettes de Jéricho© Handout Source: Reuters
Le porte-avions américain Carl Vinson (CVN 70) dans la mer de Chine méridionale.
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Ayant annoncé le retour du gendarme du monde en Syrie, Trump promet de «régler le problème» nord-coréen. Le risque est gros – soit de perdre du crédit, soit de déclencher une catastrophe, explique l'expert miltaire Philippe Migault.

Il est de bon ton aux Etats-Unis, de se réclamer de Dieu et d’évoquer la «Destinée manifeste» de la nation américaine, nouveau peuple élu par le créateur pour apporter la lumière de la civilisation aux peuplades inférieures, Sioux et Cheyennes hier, Mexicains, Russes, Chinois… etc, aujourd’hui.

Donald Trump – dont le comportement depuis des années démontre la profonde piété… – ne fait pas exception à la règle. C’est en demandant à Dieu de l’«inspirer» et de «bénir» le monde entier, qu’il a justifié la semaine dernière la frappe de missiles Tomahawk visant une base aérienne syrienne en guise de rétorsion au drame survenu à Khan Cheikhoun.

Trump a compris que la posture du chef de guerre victorieux est souvent assimilée à une carrure de chef d’Etat, et il a décidé de battre le fer tant qu’il est chaud

S’étant fait l’instrument de la justice divine, Donald Trump a aussitôt recueilli les lauriers d’une gloire bien méritée. La quasi-totalité des médias occidentaux a souligné qu’il avait osé, lui, punir Bachar el-Assad, que Barack Obama avait lâchement épargné. Quant aux leaders d’opinion de la «communauté internationale», ils ont aussitôt salué le retour du gendarme du monde américain. Peu importe que la destruction de quelques hangars d’aviation et Sukhoï hors d’âge ne change rien à la situation sur le théâtre syrien. Trump, critiqué aux Etats-Unis comme sur la scène internationale, a réussi son coup. Plus personne ne parle de son incapacité à faire passer ses réformes, de ses outrances, de ses reniements. Et parce qu’il a compris que la posture du chef de guerre victorieux est souvent assimilée à une carrure de chef d’Etat, il a décidé de battre le fer tant qu’il est chaud.

C’est en Asie qu’il entend ces jours-ci jouer les justiciers avec, dans son collimateur, la Corée du Nord.

Face à un «méchant» comme Kim Jong-un, Trump peut dérouler tout le storytelling du justicier musclé cher à son peuple

Dernier régime stalinien de la planète, celle-ci est la cible idéale pour une nouvelle opération de com’ à destination des gogos. Face à un «méchant» comme Kim Jong-un, Trump peut dérouler tout le storytelling du justicier musclé cher à son peuple. Et plus c’est gros, plus ça passe. Dans une phraséologie digne de John Wayne, le président américain a virilement déclaré qu’il allait «régler le problème» nord-coréen, avec l’assentiment de la Chine, si possible, sans si nécessaire. Joignant les actes aux paroles, Trump a dépêché vers la péninsule coréenne une task force composée d’un groupe aéronaval renforcé, ensemble qu’il a décrit avec une précision digne de Ségolène Royal. C’est «une armada. Très puissante. Nous avons des sous-marins. Très puissants. Bien plus puissants que le porte-avions. Ça, je peux vous le dire», a-t-il déclaré à Fox News, le média idéal pour ce genre de discours musclé. Oh yeah ! America’s back !Well done, Trump. Sauf…

Sauf que l’exercice a ses limites.

Elles ne se situent pas en Corée du Nord. Kim Jong-un pourra triompher vis-à-vis de son peuple lorsque le porte-avions USS Carl Vinson et son escorte s’éloigneront de son pays sans, probablement, n’avoir rien fait d’autre que des ronds dans l’eau. Il pourra encore jouer aux héros de la révolution ayant mis en déroute par sa fermeté et la clairvoyance de sa pensée le leader du monde capitaliste. Jusqu’au prochain épisode. Cela ne prête pas à conséquence pour Trump.

Sa frappe sur la Syrie n’a, au-delà des discours, guère impressionné

En revanche, celui-ci est observé par l’ensemble des Etats de la scène internationale. Que sa frappe sur la Syrie n’a, au-delà des discours, guère impressionné. Et s’il s’en tient – comme il faut espérer qu’il le fera ! – à une prudente expectative vis-à-vis de la Corée du Nord, prenant en considération les avertissements chinois et les réserves russes, chacun comprendra qu’il n’est qu’un bluffeur, n’ayant pas plus les cartes pour l’emporter sur la scène internationale que sur la scène politique américaine. Le président américain a donc pris un gros risque en décidant d’emboucher ses Trumpettes de Jéricho. Parce qu’il est face à une alternative simple. Soit il passe aux actes pour sauver la face, au risque de déclencher une catastrophe internationale. Soit il s’abstient et perdra le peu qu’il a su reconquérir de crédit.

Du même auteur : La Syrie, Rex Tillerson et le cortège d’absurdités occidentales

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