La population de Mossoul essaie d'échapper en même temps à Daesh et aux frappes aériennes de la coalition occidentale. Plus tard, il faudra faire face à un autre défi : la destruction massive des habitations, explique Iolanda Jaquemet.
RT : Comment évaluez-vous la situation humanitaire actuelle à Mossoul et dans les camps de réfugiés ?
Iolanda Jaquemet (I. J.) : Effectivement, nous sommes présents dans les camps qui accueillent les gens déplacés et nous avons été sur le terrain depuis le mois d'octobre, depuis le moment où la première étape de l'offensive a commencé. Nous sommes prêts à y aller avec des agences des Nations unies et d’autres organisations humanitaires afin d'accueillir les gens qui arrivent. Je dois ajouter qu’au cours des derniers jours, nous avons constaté la diminution du nombre de réfugiés. Au début ils étaient des milliers et maintenant on peut parler de centaines. Ils sont dans un piteux état de santé ; ils souffrent de déshydratation et sont profondément traumatisés par les combats. Aussi, nous leur fournissons de la nourriture, des couvertures avec des matelas, car dans leur fuite ils n'emportent que des vêtements et n'ont parfois même pas de chaussures.
Nous nous occupons de l’approvisionnement en eau potable et de l’assainissement, ce qui est essentiel pour les camps où s'entassent des milliers de personnes
Nous avons également renforcé notre réponse médicale dans les hôpitaux de la région. Et nous nous occupons de l’approvisionnement en eau potable, ainsi que de l’assainissement, ce qui est essentiel dans des camps où s'entassent des milliers de personnes. S’il n’y pas d’eau potable ni d’hygiène, il y a bien sûr un risque d’épidémies.
RT : Vous avez mentionné que le nombre de réfugiés avait diminué au cours des derniers jours, tandis que la bataille s’intensifie. D'après votre expérience, le nombre va-t-il continuer à se réduire ou va-t-il s'accroître ? Et l’état de santé des personnes qui fuient va-t-il s’aggraver ?
I. J. : Il est très difficile de répondre. Les voies d’évacuation dépendent de la ligne de front et personne ne sait comment cette ligne va se déplacer. Comme le reste de la communauté humanitaire, nous ne sommes pas capables de prédire d’où les gens vont arriver un jour donné, parce qu’ils fuient quand ils en ont la possibilité sans risquer leur vie.
Nous ne cessons de répéter aux parties au conflit qu’elles ont l'obligation, en vertu du droit international humanitaire, d’épargner les civils et les équipes médicales
RT : Les gens veulent échapper à l’Etat islamique, mais ont peur de périr dans les bombardements de la coalition dirigée par les Etats-Unis. Pensez-vous qu’on en fait assez pour s'assurer que les civils qui fuient ne seront pas pris dans des tirs croisés ?
I. J. : Certainement, nous sommes très préoccupés par la sécurité des civils. Il est évident que, malheureusement, au milieu d’une bataille, il y beaucoup de victimes. Et nous ne cessons de répéter aux parties au conflit qu’elles ont l'obligation, en vertu du droit international humanitaire, d’épargner les civils et les équipes médicales, ainsi que de permettre le libre passage à ceux qui veulent fuir, aux blessés et aux malades.
RT : Nous avons vu un couloir humanitaire être établi à Alep. Est-il nécessaire à Mossoul ?
I. J. : L’établissement d’un couloir humanitaire implique que toutes les parties se sont mises d’accord pour le créer afin qu'ensuite des organisations humanitaires comme la nôtre aident à évacuer les civils. Dans le cas présent, il n’y pas eu d’accord de ce type.
Les batailles causent des destructions massives et il est extrêmement difficile pour les gens de revenir dans leurs maisons
RT : Quelle est la situation à l’ouest de Mossoul ? Une fois que la bataille sera terminée, les civils pourront-ils regagner leurs maisons ?
I. J. : Le problème c’est que nous ne sommes pas présents à l’ouest de Mossoul ; c’est une des difficultés. Nous ne connaissons pas non plus d'autre organisation humanitaire qui serait présente sur le terrain. D'après notre expérience irakienne, nous savons que les batailles causent des destructions massives et qu'il est extrêmement difficile pour les gens de revenir dans leurs maisons. Les dernières années de conflit ont engendré des dizaines de milliers de réfugiés qui pourraient vouloir retourner dans leurs villages après les combats. Mais, très souvent, leurs habitations sont gravement endommagées, sinon détruites. Aussi nous ferons face à un défi après les combats : aider les gens à regagner leurs maisons et à recommencer leur vie.
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