L’explosion de la violence au Gabon suite aux résultats de l’élection présidentielle remportée par le président sortant sont en grande partie la conséquence de la politique irréfléchie des gouvernements français, selon le député européen Louis Aliot.
RT France : Peut-on dire qu’une révolution est en cours au Gabon ?
Louis Aliot (L. A.) : Je crois qu’on arrive à la fin du système qui a été malheureusement partagé par les gouvernements français et les présidents que la France a mis en place là-bas. Le système est vermoulu, les richesses sont confisquées au profit des dirigeants ou de grands groupes industriels, commerciaux, pétroliers et au détriment du peuple qui n’a pas l’éducation, la santé... C’est dramatique pour la vie de ces pauvres gens. Le Gabon aujourd’hui c’est une cocotte-minute, mais il y a quelques mois c’était pareil au Congo-Brazzaville et la France n’a pas régi de la même manière. Je pense qu’il y a encore des intérêts cachés entre un certain nombre de personnes et de dirigeants, on peut donc plus facilement soutenir les uns au détriment des autres et ainsi tenter de sauver le système de la Françafrique tel qu’il existe.
La politique de la terre brûlée qui a consisté à favoriser finalement la déstabilisation de beaucoup de pays a favorisé l’immigration
RT France : Voulez-vous dire que la France est aussi responsable de cette situation ?
L. A. : Tous les gouvernements français. On dit qu’il faut lutter contre la Françafrique depuis François Mitterrand. Il faut donc arrêter cette hypocrisie. Je pense que le continent africain est très important pour l’Europe, son développement, sa croissance. Le partenariat sincère que nous pourrons nouer serait à la fois un gage d’opportunité pour notre propre économie, mais aussi un élément de stabilité humaine par le contrôle de l’immigration, parce que la politique de la terre brûlée qui a consisté à favoriser finalement la déstabilisation de beaucoup de pays, on peut dire, a favorisé l’immigration. Cela a été valable pour la déstabilisation de la Libye, on l’a connu avec d’autres pays de manière moins importante. Je pense que la clé est là : il faut faire confiance à la nouvelle génération d’Africains voulant faire revivre le continent.
La France doit revoir de A à Z sa politique africaine
RT France : Que doit précisément faire le gouvernement français ?
L. A. : D’abord, il doit arrêter de soutenir les mafias qui existent, les réseaux de corruption. Il doit éviter de s’ingérer dans des affaires qui ne sont pas les siennes et soutenir ceux qui en Afrique soutiennent une véritable politique de développement, veulent de l’éducation, de la santé, veulent faire vivre leurs ressortissants chez eux. Beaucoup d’Africains vous disent cela, la France doit donc revoir de A à Z sa politique africaine. Tant que nous ne le ferons pas, nous contribuerons malheureusement aux problèmes démographiques et mondiaux que nous connaissons, avec les conséquences qui existent et dont nos gouvernements sont en partie responsables.
RT France : On peut voir à l'heure actuelle que les deux camps opposés utilisent des méthodes assez violentes pour tenir leurs positions. A votre avis, y-a-t-il au Gabon quelqu’un que le France devrait soutenir ?
L. A. : Je pense qu’il existe des gens tout à fait formés et qualifiés pour des postes à responsabilité au Gabon et des gens qui ne sont pas dans les réseaux de corruption habituels. Je pense que la France a dû les identifier et on peut leur faire confiance. Il en existe d’ailleurs en exil en France. Ce serait une occasion peut-être de tenter de réconcilier ces pays-là pour un nouveau développement avec l’Afrique, mais je doute, au regard des réactions des pouvoirs du parti socialiste et des républicains, que nous allions vers cette situation.
Tant que la France ne rompra pas avec ces vieilles pratiques de la Françafrique, nous aurons durablement des problèmes sur le continent africain
RT France : Selon vous, les actions actuellement entreprises par la France ne contribuent pas à la pacification du pays ?
L. A. : Non, parce que le Gabon c'est une chose, mais ce que j’ai vu faire au Congo, un référendum illégal, une élection tronquée et le soutien illicite de la France au régime congolais, prouve que la France n’a pas rompu avec les vieilles pratiques. Tant que la France ne rompra pas avec ces vieilles pratiques de la Françafrique, nous aurons durablement des problèmes sur le continent africain, et c’est le peuple qui en paye directement la note. Ne vous inquiétez pas, les classes dirigeantes sont bien implantées, ont bien planqué leur fric, cela ne pose aucun problème à personne.
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