La langue de bois de Washington sur l’accord de cessez-le-feu démontre non seulement une diminution des attentes quant à son succès, mais aussi la préparation d’une alternative, estime Brian Becker, membre de la coalition anti-guerre «ANSWER».
RT : Il y a quelques jours, John Kerry a annoncé la possibilité d’un plan B pour la Syrie qui impliquerait la partition du pays. Est-ce que c’était du sérieux ? Que doit comprendre ce plan B s’il existe ?
Brian Becker : Je pense que nous pouvons constater que la déclaration de John Kerry au sujet de ce qu’on appelle le plan B et le discours du président Obama, dans lequel ce dernier a presque complétement anéanti les attentes selon lesquelles le Plan A – qui est l’accord de cessez-le-feu entre les Etats-Unis et la Russie – pourrait être un succès, démontre non seulement que le gouvernement américain abaisse systématiquement ses attentes quant au succès du plan de cessez-le-feu, mais bien évidemment, il sert aussi à préparer une alternative.
Pour les officiels américains dire que le "plan A ne marchera probablement pas" signifie qu’ils font tout leur possible pour minimiser son succès
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En fin de compte, cela ne peut être qu’un signe d’encouragement de l’administration Obama à destination des «groupes armés modérés», comme on les appelle, de continuer le combat parce que le cessez-le-feu n’est pas le seul accord, que ce n’est pas un véritable accord. Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’en termes de rhétorique et de formulation, l’administration Obama se distancie de l’engagement sur le cessez-le-feu, de l’engagement qu’ils disent avoir pris précédemment avec les Russes, un engagement que les Syriens espèrent désespérément. A présent, l’administration Obama et le président Obama lui-même disent : «L’intervention russe en Syrie a aggravé la catastrophe humanitaire.» Voilà qui n’est certainement pas une bonne façon de s’exprimer si les Etats-Unis formaient un partenariat avec la Russie en vue d’un cessez-le-feu.
Commentant le cessez-le-feu, le journaliste et auteur David Swanson a dit à RT : «Je pense que les doutes et les méfiances des autres parties peuvent avoir un effet et peuvent mener à un échec, comme ce fut le cas par le passé. Et je pense qu’il est clair que beaucoup de gens aux Etats-Unis et dans d’autres nations impliquées désirent que cela soit un échec et désirent être en mesure de dire : «On a essayé cela et à présent, on va essayer quelque chose d’autre», ce qui veut dire, selon le point de vue du secrétaire d’Etat John Kerry, la partition de la Syrie qu’il n’est pas habilité à décider. A mon avis, il a subdivisé sa conscience.
RT : Le cessez-le-feu est entré en vigueur. Pourquoi John Kerry a-t-il mentionné le plan B avant de donner au cessez-le-feu la chance d’aboutir ?
B.B. : Deux choses découlent du plan B. L’une est la possible fragmentation, ou partition de la Syrie, ce qui signifie la destruction de la Syrie actuelle, une civilisation vieille de 10 000 ans, en fragments ethno-sectaires, conséquence d’une guerre civile financée depuis l’étranger qui a commencé en 2011. L’autre aspect du plan B, qu’un officiel américain anonyme a qualifié d’approche plus agressive, signifie l’escalade de l’intervention militaire de la part des Etats-Unis, peut-être avec la Turquie, peut-être en essayant d’instituer une «zone d’exclusion aérienne» qui ne viserait pas Daesh ni les terroristes mais bien le gouvernement souverain de Bachar el-Assad.
RT : Le ministre russe des Affaires étrangères Sergeï Lavrov affirme qu'aucun plan B n’est envisageable. A quel point cela risque-t-il de devenir un point de friction entre Washington et Moscou ?
B.B. :Le plan B est complétement voué à l’échec pour les Russes, parce qu’il signifie la négation du plan de cessez-le-feu que les Etats-Unis et la Russie ont négocié durant plusieurs mois, d’abord à Vienne, puis Vienne 2 et à Genève... Pour les officiels américains dire que le «plan A ne marchera probablement pas» signifie qu’ils font tout leur possible pour minimiser son succès. S’ils sont honnêtes, sérieux et sincères à l’égard du cessez-le-feu, pourquoi ne disent-ils pas qu’ils sont déterminés à le faire aboutir ? Pourquoi reculer et commencer à parler du plan B avant même que le plan A ne soit entré en vigueur ? Cela démontre un manque d’engagement, un manque de sérieux de la part de l’administration Obama.
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Michael Maloof, ex-analyste de la politique de sécurité du Bureau du secrétaire à la Défense, amplifie l'analyse :
«Je pense que des éléments extérieurs vont essayer de faire en sorte que cela soit un échec. Je pense en particulier à l’Arabie saoudite par exemple. Le maintien du régime d’Assad n’est vraiment pas de leur intérêt. L’idée même du cessez-le-feu consiste à ce que toutes les parties s’assoient à la table de négociations et parviennent à instaurer des élections. Mais, cela nécessite, bien évidemment, l’implication d’Assad et cela ne présage rien de bon pour des pays tels que l’Arabie saoudite ou la Turquie, qui ont juré d’en finir avec lui. Et à présent, ils font marcher leurs troupes vers les frontières. Pour moi, il s’agit d’une provocation.»
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