Navalny : Moscou regrette que Berlin n'ait toujours pas répondu à la demande russe d'aide judiciaire
Moscou regrette que Berlin n'ait pas répondu à la demande de coopération de la justice russe sur l'affaire Navalny. En outre, selon le Kremlin, le lancement d'une enquête est compliqué par le fait «que des objets ont été liquidés, sortis de Russie».
«Nous sommes malheureusement limités dans nos capacités à mener une quelconque enquête [sur l'affaire Navalny]. Car il s'avère que des objets ont été liquidés, sortis de Russie et qu'on ne peut pas prendre connaissance des analyses effectuées [en Allemagne]», a déclaré le 18 septembre le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov. La Russie, en effet, dit toujours attendre la réponse de l'Allemagne à la demande d'aide judiciaire adressée le 27 août par le parquet national de Russie au sujet de l'affaire Alexeï Navalny.
La veille, les partisans de l'opposant russe, actuellement soigné dans un hôpital berlinois, ont publié une vidéo dans laquelle ils affirment que l'agent neurotoxique de type Novitchok, auquel font référence les autorités allemandes, a été détecté sur une bouteille qu'ils ont retrouvée dans la chambre d'hôtel où se trouvait Navalny le jour de son malaise, fin août, à Tomsk (Sibérie). Ils ont assuré avoir pris cette bouteille et d'autres indices avec eux, et les avoir emportés en Allemagne, où l'opposant russe est hospitalisé, car ils étaient convaincus que les autorités russes n’enquêteraient pas.
La seule chose qui permettra de faire la lumière sur ces événements, c'est un échange d'informations, de prélèvements biologiques, d'indices et un travail en commun si nécessaire
«Si la bouteille existe vraiment, pourquoi l'avoir emmenée quelque part ? Peut-être qu'il y a des gens qui ne veulent pas qu'une enquête ait lieu ?», a commenté Dmitri Peskov. «La seule chose qui permettra de faire la lumière sur ces événements, c'est un échange d'informations, de prélèvements biologiques, d'indices et un travail en commun si nécessaire», a-t-il ajouté.
Dans une interview à Sputnik diffusée ce même 18 septembre, le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov a lui aussi évoqué l'attente de la justice russe concernant sa requête auprès de Berlin : «Dès le 27 août, le Parquet général de Russie a envoyé une demande d'aide judiciaire et il n'y a toujours pas eu de réponse. [...] On nous a dit [que cette demande] avait été transférée au bureau du procureur de Berlin, mais qu'il n'allait rien nous dire sans le consentement de la famille ; il a ajouté : allez-y, lancez une enquête criminelle». Or, le chef de la diplomatie russe a souligné que son pays avait «ses propres lois, selon lesquelles [il n'était pas possible d']engager des poursuites pénales sur la seule parole prononcée par quelqu'un». «Il faut respecter certaines procédures», a précisé le ministre, rappelant en outre qu'une «investigation préliminaire» avait été lancée après l'incident et était «toujours en cours».
Plusieurs capitales occidentales enjoignent la Russie à ouvrir une enquête sur l'empoisonnement présumé d'Alexeï Navalny et menacent de prendre des sanctions. La Russie, déclarant valoir n'avoir aucun indice susceptible d'indiquer qu'un crime a été commis, n'a en conséquence pas ouvert d'enquête.
Plusieurs versions médicales s'affrontent sur le cas Navalny
Alexeï Navalny a été victime d'un malaise le 20 août alors qu'il se rendait de Tomsk à Moscou en avion. Il a été admis dans un hôpital d'Omsk dans un état grave, placé en réanimation et relié à un respirateur artificiel, avant d'être transféré en Allemagne, l'entourage de l'opposant ne faisant pas confiance à l'établissement hospitalier russe où il était soigné.
Deux versions s'opposent actuellement sur son cas. D'une part, celle des médecins russes qui ont initialement pris en charge l'opposant, selon laquelle «aucun poison ou trace de poison dans le sang ou dans l'urine n'a été trouvé».
D'autre part, la thèse de Berlin, confirmée par des laboratoires français et suédois, qui soutient le contraire, affirmant que des tests toxicologiques réalisés par un laboratoire de l'armée allemande ont apporté des «preuves sans équivoque» de «la présence d'un agent chimique neurotoxique de type "Novitchok"» dans le corps d'Alexeï Navalny.