Gendarmes des champs et policiers des villes... la réforme express de Darmanin verra-t-elle le jour?

Gendarmes des champs et policiers des villes... la réforme express de Darmanin verra-t-elle le jour?© Thomas Coex Source: Reuters
Gérald Darmanin au ministère de l'Intérieur, Paris, juillet 2020 (image d'illustration).
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Mieux répartir les forces de police et de gendarmerie sur le territoire : c'est l'une des réformes enclenchées par Gérald Darmanin avant 2022. Mais le jeune ministre pourra-t-il mener à bien un tel chantier ? Et pourquoi cette agitation soudaine ?

Selon les informations du Figaro publiées le 10 janvier, le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin entretient le projet de «mieux répartir les forces de sécurité sur le territoire» : c'est-à-dire de modifier les zones de compétence entre police et gendarmerie. Mais pour ce faire, il lui reste peu de temps d'ici à la fin potentielle de son mandat à Beauvau en avril 2022.

Et le quotidien conservateur d'opportunément rappeler : «Nicolas Sarkozy s’était attelé à ce chantier délicat, en son temps, avant de rencontrer des résistances.» La comparaison est fréquente entre Gérald Darmanin et l'ancien président de la République qui occupa lui aussi, et avec ostentation, le fauteuil de Georges Clémenceau. Logique : Gérald Darmanin, plus jeune ministre de l'Intérieur de la Ve République est issu des rangs de l'ancien chef d'Etat et semble parfois marcher dans ses pas.

Alors l'élève dépassera-t-il le maître en réformant à tout crin la sécurité publique française, en seulement quelques mois ? La grande idée affichée serait ici de rationaliser les zones partagées entre police et gendarmerie, qui se sont progressivement imbriquées au fil des années avec l'explosion de certaines agglomérations comme celle de Toulouse.

Le Figaro cite le ministre : «Dans l’agglomération de Toulouse, il y a quatre villes sous l’autorité de la police, et tout le reste de la zone, très urbanisée, est sous le contrôle de la gendarmerie. Il faut sans tabou aller vers une organisation plus efficace.»

Le journal souligne également que la France compte environ 100 000 gendarmes pour environ 150 000 policiers, avec plus 95% du territoire national en zone gendarmerie. Mais pour harmoniser encore plus une répartition qui voudrait voir les gendarmes à la campagne et les policiers nationaux à la ville, encore faudrait-il concilier toutes les susceptibilités locales des sénateurs, des députés, des maires et de la population en général.

Le livre blanc de la sécurité intérieure paru au mois de novembre 2020 caressait déjà le projet d'une rationalisation et une réforme administrative connexe pointait déjà son nez. Ainsi que le relève Le Figaro, une direction départementale de sécurité unique dans chaque département avec la police des frontières et la police judiciaire sous ses ordres est envisagée. La même source précise d'ailleurs qu'une expérimentation en ce sens sera mise en place au début de l'année 2022 dans trois départements touchés par la question de la crise migratoire : le Pas-de-Calais, la Savoie et les Pyrénées-Orientales.

Une fin de mandat tambour battant pour Darmanin

On comprend donc que Gérald Darmanin veuille utiliser tout le temps qu'il lui reste à Beauvau pour enclencher des réformes structurelles en police et en gendarmerie, ainsi qu'on a pu le constater avec l'annonce un peu précipitée d'une nouvelle unité de «Super-CRS» d'ici l'été prochain, sans aucune concertation préalable avec les corps intermédiaires. Au chapitre d'une politique de la «gesticulation», selon les détracteurs de Darmanin, on peut encore ajouter les conférences de presse destinées à présenter régulièrement l'action du ministère en compagnie de Marlène Schiappa ou encore la tardive publication du livre blanc de la sécurité intérieure en novembre 2020 – juste après la publication du nouveau schéma national du maintien de l'ordre, vite taclée par l'annonce d'un énigmatique Beauvau de la sécurité... Le tout avec la proposition de loi relative à la Sécurité globale en toile de fond. Une volonté de Gérald Darmanin de tenter de faire oublier les deux ministres qui l'ont précédé dans le même fauteuil depuis 2017 ?

Interrogé par RT France, l'ancien commandant de police Jean-Pierre Colombiès ricane : «C'est le vieux serpent de mer cette histoire de compétences gendarmerie ou police... Il y a beaucoup d'intérêt qui se croisent et s'affrontent sur ce terrain. Il faut même évoquer la caste des commissaires qui ne veulent pas voir disparaître un commissariat pour ne pas perdre des commissaires, tout simplement. C'est plus une bagarre d'intérêts qu'une bataille pour l'intérêt général, malheureusement... Mais assigner les gendarmes à la campagne et les policiers à la ville correspond aussi à une certaine philosophie dans chaque maison : les gendarmes sont moins soumis à la culture du résultat en termes de mises à disposition à la justice. En revanche, ils ont une mentalité très militaire qui rassure les élus en général. Les flics, ça discute, ça négocie. Et les gendarmes ont aussi une capacité à projeter des moyens énormes sur le terrain très rapidement, notamment pour faire une cellule d'enquête par exemple.»

Revers de la médaille, selon l'ex-policier : «Par contre la gendarmerie, la nuit, elle est fermée, alors que le commissariat de police nationale, c'est toujours ouvert. Mais en fin de compte, Darmanin est surtout le digne hériter de Sarkozy et c'est un paramètre à prendre en compte : s'il veut réformer, c'est par impératif budgétaire et pour avoir moins de fonctionnaires... N'oublions pas non plus que de nouveaux enjeux se font jour actuellement avec une nouvelle émergence des polices municipales et du secteur de la sécurité privée ! Mais cette réforme, avec ce qu'elle emportera de guerres de chapelles et d'egos, peut-elle s'enclencher en seulement un an ? J'en doute fort.»

Antoine Boitel

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