Dimanche 14 juin
Le chef de l'Etat a fait savoir qu'il s'adresserait aux Français en juillet pour «préciser un nouveau chemin», et «lancer les premières actions».
«Nous avons devant nous des défis historiques. Pour les relever, n'oublions jamais nos forces, notre histoire, notre jeunesse, notre sens du travail et de l'engagement, notre volonté de justice, notre capacité de créer pour vivre et changer le monde, notre bienveillance», a-t-il déclaré.
Emmanuel Macron a assuré que «de nouvelles décisions fortes pour l'égalité des chances», seraient prises.
«Nous serons intraitables face au racisme, à l'antisémitisme et aux discriminations. Notre combat doit se poursuivre et s'intensifier pour permettre d'obtenir les diplômes et les emplois qui correspondent aux mérites et talents de chacun, et lutter contre le fait que le nom, l'adresse, la couleur de peau réduisent encore trop souvent dans notre pays les chances que chacun doit avoir», a-t-il ajouté.
Alors que les manifestations contre les violences policières se multiplient, Emmanuel Macron a déclaré que les policiers et gendarmes méritaient «le soutien de la puissance publique et la reconnaissance de la Nation».
«Sans ordre républicain, il n'y a ni sécurité ni liberté. Cet ordre, ce sont les policiers et gendarmes sur notre sol qui l'assurent. Ils sont exposés à des risques quotidiens en notre nom», a-t-il ajouté.
«La République n'effacera aucun nom ou aucune trace de son histoire», a affirmé Emmanuel Macron, sur fond de polémique sur les monuments liés à l'histoire coloniale ou la traite esclavagiste.
La France «ne déboulonnera pas de statues», a déclaré le chef de l'Etat, alors que l'ancien Premier ministre et actuel président de la Fondation pour la mémoire de l'esclavage, Jean-Marc Ayrault, a demandé de rebaptiser une salle Colbert à l'Assemblée nationale ainsi qu'un bâtiment de Bercy portant le nom du ministre à l'initiative en 1685 du Code noir.
Le chef de l'Etat a salué l'action de l'Europe durant la crise sanitaire, qui s'est selon lui «hissée à la hauteur du moment» en dépit de «débuts difficiles». Pour le chef de l'Etat, la relance économique passera avant tout par l'Europe, il a notamment évoqué «l'accord franco-allemand autour d'un endettement conjoint, et d'un plan d'investissement pour redresser l'économie du continent est un tournant historique en empruntant pour la première fois ensemble avec la chancelière d'Allemagne».
Selon Emmanuel Macron, il s'agit d'«une étape inédite de notre aventure européenne et la consolidation d'une Europe indépendante qui se donne les moyens d'affirmer son identité, sa culture, sa singularité face à la Chine, aux Etats-Unis, et dans le désordre mondial que nous connaissons. Une Europe plus forte, plus solidaire, plus souveraine».
«Il nous faut d'abord tout faire pour éviter au maximum les licenciements. C'est pour cela qu'avec les syndicats et le patronat, nous avons lancé une négociation pour que dans toutes les entreprises, nous arrivions à préserver le plus d'emplois possible malgré les baisses d'activité», a fait savoir Emmanuel Macron.
Le président poursuit la présentation de son plan de relance économique : «Il nous faut créer de nouveaux emplois en investissant dans notre indépendance technologique, numérique, industrielle et agricole. Par la recherche, la consolidation filière, l'attractivité et les relocalisations lorsque cela se justifie. Un vrai pacte productif.»
«Il nous faut aussi créer les emplois de demain par la reconstruction écologique qui réconcilie production et climat, avec un plan de modernisation du pays autour de la rénovation thermique de nos bâtiments, des transports moins polluants, du soutien aux industries vertes», a-t-il ajouté. «Cette reconstruction doit aussi être sociale et solidaire», a déclaré Emmanuel Macron, évoquant le Ségur de l'hôpital.
Le président a exclu d'augmenter les impôts pour financer les dépenses liées à la crise sanitaire.«Notre pays est déjà l'un de ceux où la fiscalité est la plus lourde, même si depuis trois ans, nous avons commencé à l'abaisser. La seule réponse est de bâtir un modèle économique durable plus fort, de travailler et de produire davantage pour ne pas dépendre des autres. Et cela, nous devons le faire alors même que notre pays va connaître des faillites et des plans sociaux multiples en raison de l'arrêt de l'économie mondiale», a-t-il déclaré.
Le chef de l'Etat a défendu les mesures économiques prises par le gouvernement pour faire face à la crise : «Depuis le premier jour de la crise, notre mobilisation est totale. Quoi qu'il en coûte, tel était l'engagement que j'avais pris devant vous dès le mois de mars. Chômage partiel, prêts aux entreprises, accompagnement des commerçants, des indépendants, soutien des plus précaires. Tout a été mis en œuvre par le gouvernement pour sauvegarder nos emplois et pour aider chacun. Nous avons décidé d'un plan massif pour les plus durement touchés : l'industrie automobile, l'aéronautique, le tourisme, la culture, la restauration, l'hôtellerie.»
«Au total, nous avons mobilisé près de 500 milliards d'euros pour notre économie, pour les travailleurs, pour les entrepreneurs, mais aussi pour les plus précaires», a-t-il fait valoir.
Emmanuel Macron a toutefois reconnu certains errements : «Bien sûr, cette épreuve a aussi révélé des failles, des fragilités, notre dépendance à d'autres continents, pour nous procurer certains produits, nos lourdeurs d'organisation, nos inégalités sociales et territoriales. Je veux que nous tirions toutes les leçons de ce que nous avons vécu.»
Le chef d'Etat a défendu la gestion de crise du gouvernement : «Nous n'avons pas à rougir, mes chers compatriotes, de notre bilan. Des dizaines de milliers de vies ont été sauvées par nos choix, par nos actions. Nous avons su doubler en quelques jours nos capacités de réanimation, organiser des transferts de centaines de patients, entre régions et avec les pays voisins, approvisionner nos commerces, réorienter notre production industrielle, inventer des nouvelles solidarités.»
«La nouvelle phase qui s'ouvre à partir de demain va permettre d'accélérer la reprise. Nous devons faire pleinement repartir notre économie en continuant de protéger les plus fragiles», a déclaré le chef de l'Etat, après avoir félicité les Français pour leur comportement durant la crise sanitaire.
Emmanuel Macron ouvre son allocution sur la seconde phase du déconfinement. «A partir de demain, nous allons pouvoir tourner la page du premier acte, en quelque sorte, de la crise que nous venons de traverser», a-t-il déclaré. Le président a annoncé que tout le territoire allait passer en zone verte. Les déplacements seront possibles en Europe dès demain, et hors d'Europe à partir du 1er juillet.
Le président de la République française, Emmanuel Macron, présente ce 14 juin à 20h ses projets de redémarrage du quinquennat en pleine période de mobilisations sociales et à moins de deux ans de l'échéance présidentielle.
Il devrait d'abord s'exprimer sur les sujets d'urgence, à commencer par la troisième étape du déconfinement prévue le 22 juin et ses principaux enjeux : réouverture des restaurants en Ile-de-France, assouplissement des règles dans les écoles et levée de l'interdiction des rassemblements de plus de 10 personnes – d'autant que le Conseil d'Etat a rétabli le 13 juin la liberté de manifester.
Emmanuel Macron devrait aussi revenir sur sa gestion de la crise sanitaire, dont il n'a guère tiré de bénéfices politiques, sa cote de popularité continuant de baisser, à l'inverse de celle du Premier ministre Edouard Philippe.
Ségur de la santé, réformes des retraites : Macron prépare l'après-Covid
Cette allocution doit également permettre au chef de l'Etat, contraint de gérer l'urgence sanitaire depuis trois mois, de commencer enfin à se projeter sur l'après-Covid. A une semaine de la fin des travaux de la Convention citoyenne pour le climat, le chef de l'Etat pourrait évoquer ses intentions sur l'écologie, priorité affichée de la fin de son quinquennat. Les propositions de la convention pourraient ainsi faire l'objet d'un référendum. Lors d'un déjeuner avec des éditorialistes, le 11 juin, Emmanuel Macron s'est dit convaincu d'avoir fait les bons choix depuis trois ans, et n'envisage donc pas de retour d'un impôt sur les plus riches, ni d'un «Grenelle des salaires».
Il compte également reprendre le chantier de la retraite par points, malgré le conflit social qu'elle a suscité, et espère rallier des syndicats en revoyant des dispositions clivantes, comme l’âge pivot.
L'agenda présidentiel perturbé par le mouvement Black Lives Matter
Mais le locataire de l'Elysée est bousculé par un nouveau front, celui des manifestations contre le racisme et les violences policières, après la mort de George Floyd aux Etats-Unis et le rappel de celle d'Adama Traoré en 2016. «Il ne faut pas perdre la jeunesse», s'était-il inquiété le 11 juin.
De son côté, le ministre de l'Intérieur, Christophe Castaner, a annoncé trop rapidement des sanctions à l'encontre de policiers en cas de «soupçon avéré» de racisme, provoquant leur colère, avant de reconnaître une erreur.
Les syndicats de police demandent à être reçus par le chef d'Etat, alors que de nouvelles manifestations ont été organisées le 13 juin par le comité Adama Traoré. A Paris, ils étaient 15 000 d'après la préfecture à réclamer «justice», contre 20 000 le 2 juin.
Au sein du gouvernement, plusieurs ont avancé leurs idées pour mieux lutter contre les discriminations : la porte-parole Sibeth Ndiaye souhaite rouvrir «le débat autour des statistiques ethniques», et le ministre de la Ville, Julien Denormandie, a annoncé de nouveaux «testings» dans les entreprises. Il prône également la suppression du mot «race» du préambule de la Constitution.