Gilets jaunes : Macron déplore les morts, félicite la police, mais ignore les blessés graves
L'exercice était attendu depuis le début de la mobilisation des Gilets jaunes : un mot du président pour les victimes. Pour autant, Emmanuel Macron s'est contenté de n'évoquer que les personnes décédées, et de rendre hommage aux forces de l'ordre.
Ce 28 janvier, Emmanuel Macron a pour la première fois évoqué, à distance et depuis le Caire, les Français qui ont trouvé la mort en marge des actions des Gilets jaunes. Il a précisé que ceux-ci n'étaient pas décédés du fait de la police, mais n'a pas eu un mot pour les dizaines de blessés, souvent graves, répertoriés depuis le début de la mobilisation. «Je déplore que 11 de nos concitoyens français aient perdu la vie durant cette crise [...] Je note qu'ils ont bien souvent perdu la vie en raison de la bêtise humaine mais qu'aucun d'entre eux n'a été la victime des forces de l'ordre», a argumenté le chef de l'Etat.
Et, afin de ne laisser aucun doute planer, de conclure : «Ce que la France vit depuis plusieurs semaines est inédit et je veux rendre hommage au professionnalisme des forces de l'ordre dans ce contexte.»
Une stratégie de communication risquée ? Le président a choisi d'évoquer les victimes, dont aucune n'a été tuée du fait des forces de l'ordre, mais de passer sous silence les centaines de blessés, parfois graves, touchés par, entre autres, par des grenades de désencerclement ou des tirs de lanceurs de balles de défense (LBD). Le nombre de morts lui-même retenu par Emmanuel Macron interroge.
Je veux rendre hommage au professionnalisme des forces de l'ordre dans ce contexte
L'AFP rappelle ainsi que depuis le début du mouvement des Gilets jaunes, le bilan était jusqu'à présent de dix morts. Contacté par l'agence de presse, le ministère de l'Intérieur a précisé que la 11e victime était un Gilet jaune de 52 ans, frappé par un malaise cardiaque le 26 janvier, mais sans lien avec les incidents survenus dans la capitale.
Selon un décompte minutieux, le journaliste et réalisateur David Dufresne a de son côté signalé quelque 353 cas de violences, blessures et mutilations au cours du mouvement. Au 28 janvier, le bilan provisoire serait ainsi de 159 blessures à la tête, 18 personnes éborgnées et quatre mains arrachées. Si les manifestants constituent le plus gros contingent de blessés et mutilés, David Dufresne a relevé des victimes parmi les lycéens et les passants.
Début janvier, la place Beauvau relevait déjà un bilan (avant l'acte 9 du mouvement) estimé à 1 700 blessés parmi les manifestants contre environ un millier chez les forces de l'ordre.
allo @Place_Beauvau - c'est pour un bilan (provisoire) sur @Mediapart
— David Dufresne (@davduf) 28 janvier 2019
Mise à jour 7h20, ce lundi. https://t.co/2knUYyBpR8pic.twitter.com/2Jq6kYvHVA
Dernière personne mutilée en date : l'une des figures du mouvement, Jérôme Rodrigues, blessé gravement au niveau de l’œil sur la place de la Bastille à Paris, lors de l’acte 11 du mouvement social.
Interrogé de son côté sur l'utilisation des lanceurs de balles de défense (LBD) et des grenades de désencerclement, le secrétaire d'Etat à l'Intérieur, Laurent Nunez, a jugé ce 28 janvier que les forces de l'ordre faisaient un usage «proportionné» de ces «armes intermédiaires».