Victoire de Fillon : «La droite française avait un peu envie de revenir aux fondamentaux»

Victoire de Fillon :  «La droite française avait un peu envie de revenir aux fondamentaux»
François Fillon après sa victoire à la primaire de droite et du centre
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Selon Thierry Mariani, la victoire de François Fillon est à mettre au crédit de son sérieux, sa cohérence et ses valeurs. Pour le député LR, cela ne fait aucun doute, la primaire à gauche va être beaucoup plus violente que celle de la droite.

RT France : La victoire de François Fillon à la primaire est-elle une surprise pour vous ?  

Thierry Mariani (T. M.) : Si on regarde la situation il y a un mois – c’est évidemment une bonne surprise. Il y a un mois, personne en France n'aurait misé sur François Fillon. Souvenez-vous, Juppé était déjà donné gagnant d’office, et l’outsider était Sarkozy. Moi, je soutiens Fillon depuis le début de cette année parce que je pense que c’était en réalité celui qui avait les convictions les plus fortes et surtout une personnalité qui n’avait pas les côtés excessifs de l’un et les côtés, dirais-je, trop discrets de l’autre. Donc, le premier tour était une vraie surprise. Je m’attendais à ce qu'il figure au deuxième tour, mais pas avec une telle avance. Ensuite, soyons honnêtes, le deuxième tour n’était pas une vraie surprise. Quand vous avez tant d’avance au premier tour, et que de surcroît Nicolas Sarkozy, avec élégance, a appelé à voter pour François Fillon, la victoire était assurée.

Alain Juppé a déçu

RT France : Pourquoi les médias présentaient-ils François Fillon comme un outsider avant le premier tour ?

T. M. : Parce que je pense, qu’en France, les médias sont par moment très orientés : si vous n’êtes pas dans un certain moule... Regardez, par exemple, quelqu’un comme Nathalie Kosciusko-Morizet - que j’aime bien : on vous la présente comme une personnalité phare de la droite. Elle fait 5%. C’est-à-dire que son opinion, qui est la sienne, n’est pas une opinion majoritaire au sein de l’électorat de droite. Pourquoi François Fillon est-il une surprise ? Parce que c’était un peu la voix des Français de droite silencieux, ceux qui ne font pas de bruit, qui ne manifestent pas, qui ne font pas dans l’excès, qui habitent la France profonde, ou qui sont à Paris mais qui se taisent et qui vont bosser, etc. Ce ne sont pas des gens flamboyants. Et je crois que Sarkozy avait un peu lassé avec son style. Et puis, en France, on ne revient pas une deuxième fois [à un tel style]. Je crois que c’est la grande leçon.

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Ensuite, Alain Juppé a déçu. Au départ, Alain Juppé apparaissait comme l’alternative à Nicolas Sarkozy, et petit à petit, on a vu pendant la campagne que beaucoup de gens se sont dit finalement : «Bon, il a des qualités, mais ce n’est pas du tout le niveau qu’on attendait.» Et, parallèle, François Fillon a petit à petit décollé, parce que c’était lui qui a le plus travaillé son programme. On peut faire beaucoup de reproches à François Fillon, mais il a toujours était constant sur plein de dossiers. Permettez-moi de vous rappeler que c’est le seul, aujourd’hui, qui avait appelé à voter «non» au traité de Maastricht, avec Pasqua, avec Séguin, etc. Alors que tous les autres passent leur temps à dire «l’Europe, l’Europe, l’Europe !», comme si c’était une religion. François Fillon a été le premier qui, en tant que premier ministre de Nicolas Sarkozy – et ça a été d’ailleurs leur première dispute – avait osé dire que la France était en faillite. Dons je pense qu’avec tout ça, les Français avaient besoin de quelqu’un pour les représenter à droite, avec des convictions solides, et d’un personnage, je dirais, serein, calme. Et, à mon avis, François Fillon était le bon personnage.

Les Français votent en pleine indépendance

RT France : Après le Brexit et Trump, c’est une nouvelle défaite des sondages ?

T. M. : D’abord, on n’a gagné que les primaires. Il faut gagner le match le plus important : on verra dans quelques mois. Mais est-ce que c’est une défaite des sondages ? Oui. Ça prouve surtout que rien n’est gagné d’avance. Vous savez, il faut toujours se souvenir de quelque chose en France – et pour moi ça a été la plus grande leçon – le référendum sur le traité d'Amsterdam : 90% du Parti socialiste est pour, 90% de l’opposition est pour, 90% de la presse est pour. Le résultat – 55% des Français sont contre. Donc, ce n’est pas parce ce qu’on a une sorte d’environnement qui laisse entendre que tout le monde est pris par une sorte de griserie, une sorte d’autosatisfaction... [qu'il faut y croire]. Les Français votent en pleine indépendance.

Jusqu’au bout, les gens peuvent changer d’avis

RT France : Qui profite de ses mauvaises prévisions? 

T. M. : Personne. Je cois que ça prouve aussi que, jusqu’au bout, les gens peuvent changer d’avis. Sur la primaire, si vous regardez – je vais défendre pour une fois les instituts de sondage –, ils ne se sont pas vraiment trompés. En réalité, les 15 derniers jours on voyait très bien que c’était presque comme une sorte d’ivresse. D’un coup on a vu dans les 15 derniers jours  Fillon faire 14, 15, 18, 20, 25, 28, voilà. Et le soir, le jour de l’élection, les sondages disaient quoi ? Ils disaient que Sarkozy, Fillon et Juppé étaient au coude à coude. Sauf qu’une sorte d’euphorie dans l’autre sens est apparu. Et Fillon a complètement décollé. Donc, les sondages avaient quand-même perçu, dans les 10 derniers jours, qu’il y avait une vraie tendance pour François Fillon. Ils n’en avaient juste pas mesuré l’ampleur.

François Fillon n’a rien pour plaire à une certaine caste

RT France : Pourquoi est-ce que les médias, pendant la semaine qui précédaient le deuxième tour, étaient quasiment tous contre François Fillon ?

T. M. : Parce que François Fillon n’a rien pour plaire à une certaine caste. Il défend la France traditionnelle, il est plutôt quelqu’un qui n’aime pas les talk-show, les émissions mélange d'humour et de politique. Il est plutôt quelqu’un qui représente la France catholique, traditionnelle, fière de son histoire. Vous savez, si vous voulez être à la mode, c’est très simple : vous dites que la France est un pays multiculturel où tout le monde a sa place, où les délinquants sont des victimes et où les Français qui sont là depuis toujours n’ont qu’à s’y faire. S’ils ne le font pas, ce sont des horribles réactionnaires, des fascistes. [Si vous faites ainsi], vous êtes sûr de vous faire applaudir sur tous les plateaux.

RT France : Ce vote pour François Fillon serait donc une fronde contre l’establishment de la presse ?

T. M. : Cela montre que la droite française est avant tout traditionnelle et qu’elle avait un peu envie de revenir aux fondamentaux. C’est un peu le profil de Georges Pompidou. On oublie trop souvent Pompidou en France : on considère qu’il y a eu Charles de Gaulle et François Mitterrand. A mon avis les deux ne sont pas au même niveau et on oublie qu’au milieu il y a eu Georges Pompidou, qui était un grand président. C’est lui qui a hissé la France à un niveau industriel faisant qu’on était à jeu égal avec l’Allemagne. Mais Pompidou ne faisait pas les talkshows, les cocktails en ville, etc. C’était plutôt un profil discret. François Fillon me fait penser à cela. [...] C’est le sérieux et le retour à certaines valeurs traditionnelles qui ont payé.

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Ce que vous avez vu à droite ce n’est rien par rapport à ce qui vous attend à la primaire socialiste

RT France : Après toutes les querelles et les insultes qu'on a pu constater au sein du parti Les Républicains pendant cette primaire, qu’adeviendra-t-il de ce parti ?

T. M. : Les primaires se sont bien passées. On n’a jamais franchi la ligne jaune. Oui, il y a eu deux ou trois attaques. Mais regardez le débat de jeudi dernier [24 novembre] – il était très correct. Sur l’essentiel on est d’accord. Il y a des différences de personnalités. Mais sur l’essentiel du programme il n’y a pas de vrai désaccord sauf peut-être sur la politique étrangère. C’est le seul point sur lequel il y a un vrai désaccord entre ce que proposait, par exemple, Alain Juppé et ce que propose François Fillon. Sur la Syrie et la Russie il y a un vrai désaccord. Pour le reste, quels étaient les désaccords ? L’un disait qu’on allait supprimer 400 000 fonctionnaires, l’autre – 500 000. Il y a quand même en plus l’idéologie, qui fait que, à droite, les cicatrices seront très vite refermées et elles ne seront pas très profondes. Les quatre semaines à venir vont être un régal, on va voir un président de la République s’affronter avec son Premier ministre, des ministres se battre entre eux. Franchement, ce que vous avez vu à droite ce n’est rien par rapport à ce qui vous attend à la primaire socialiste. Je pense que vous aurez du spectacle.

Emmanuel Macron ne franchira pas le premier tour

RT France : Pensez-vous que François Fillon soit capable de battre un Emmanuel Macron et une Marine Le Pen dans le cadre de la campagne présidentielle?

T. M. : Je pense que vous vous trompez sur Emmanuel Macron, il ne franchira pas le premier tour. Cela va faire comme avec Alain Juppé pendant la campagne – ça va très vite se dégonfler. Emmanuel Macron c’est qui ? C’est un banquier de chez Rothschild qui a fait toutes les grandes écoles. Après, pendant deux ans et demi, il a été le conseiller économique du président de la République. Pendant un an il a été son ministre. C’est-à-dire qu’il assume tout le bilan économique. Sa seule qualité, c’est d’avoir trahi celui qui l’a propulsé au sommet. Le personnage suscite en moi peu de sympathie. Pour moi, en politique il y a une certaine fidélité à avoir. Emmanuel Macron me rappelle cette période, il y a dix ans, où tout le monde nous expliquait ce qu’on allait voir avec Dominique de Villepin – un personnage intelligent, brillant, cultivé, mais solitaire, sans trop de principes en politique et qui, au bout de compte, finit tout seul.

La candidature de François Fillon est la pire des choses pour Marine Le Pen

RT France : Et pour ce qui est de Marine Le Pen ?

T. M. : Marine Le Pen est une candidature plus sérieuse, mais je pense que celle de François Fillon est la pire des choses pour elle. C’est quelqu’un qui n’a jamais eu de problème avec la justice, c’est quelqu’un dont les convictions ont toujours été très claires. Marine Le Pen sera très probablement présente au second tour, puisque la gauche est totalement divisée. Mais, après, je pense qu’elle fera un beau premier tour et n’a aucune chance de gagner au second.

Fidel Castro est mort et c’est un mauvais signe pour la gauche

RT France : Les candidats de gauche n’ont donc aucune chance selon vous ?

T. M. : Pour moi il n’y a aucune chance que la gauche figure au second tour aujourd’hui, sauf si par miracle ils se mettent tous d’accord. Mais à gauche on est rarement chrétien, et on ne croit pas trop au miracle. En plus Fidel Castro est mort et c’est un mauvais signe pour la gauche.

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