Quand la Libye demande l’aide de perceurs de coffre-fort pour accéder à l’or de l’ère Kadhafi

Quand la Libye demande l’aide de perceurs de coffre-fort pour accéder à l’or de l’ère Kadhafi© Michael Dalde Source: Reuters
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La poursuite du conflit est due à la course aux ressources libyennes, l'une des principales causes de l'intervention internationale, explique Edmund Ghareeb, professeur d'histoire du Moyen-Orient à l’American University de Washington.

Dans l’Est de Libye, la ville côtière d’El Beïda recèle une chambre forte remplie d'or et d'argent, pour un montant de quelque 160 millions d’euros et appartenant à la banque centrale. Mais le gouvernement libyen de Tobrouk, à court de fonds, n'a pas le code pour l'ouvrir et a dû embaucher des perceurs de coffres pour prendre possession de ces ressources.

 

RT : L’un des deux gouvernements libyens, celui de Tobrouk, à l'Est du pays, a donc une réserve de pièces d'or et d'argent, mais n’y a pas d’accès. N’est-ce pas une situation comique?

Tout cela a été une reproduction de ce que nous avions vu en Irak : une intervention basée sur des prétextes, sur des données de manipulées du renseignement, sur des accusations non confirmées

Edmund Ghareeb (E. G.) : Si seulement la situation en Libye n’était pas aussi tragique et terrible avec deux gouvernements en place et, plus récemment, un troisième gouvernement établi par la communauté internationale. Les différentes zones du pays sont contrôlées par différentes milices et tribus. Certaines d'entre elles sont salafistes, certaines d'entre elles [ont des implications] idéologiques, certaines – [des implications] ethniques. Cela pourrait en effet être une situation très comique, elle serait peut-être bonne pour un scénario de thriller. Mais la situation est tragique et, dans une certaine mesure, résulte de la politique de changement de régime, des interventions extérieures qui ont renversé le régime de Mouammar Kadhafi et ont provoqué la fin grotesque et horrible de sa vie.

Tout cela a été une reproduction de ce que nous avions vu en Irak : [une intervention] basée sur des prétextes, sur [des données de] manipulées du renseignement, sur des accusations non confirmées par la suite. Et donc, à bien des égards, nous observons un pays qui est en cours de fragmentation. Et il y a encore la menace d'une nouvelle intervention ou de nouvelles interventions de la part des puissances occidentales. Nous entendons que les forces américaines, britanniques, françaises, italiennes sont dans le pays – en petit nombre, bien sûr. Mais ce nombre peut augmenter. Nous voyons que certaines zones sont sous contrôle de Daesh. Donc, la situation est extrêmement instable et complexe. Mais une fois de plus, tout cela est la conséquence d'une invasion qui, apparemment, n'a pas été bien planifiée. Le général Carter Ham, qui était le chef de l'Africom, a dit quelques jours avant l’invasion de la Libye : «[Dans le cas de] ce conflit, apparemment nous n'avons pas de plan adéquat pour demain et pour l'avenir.» La Libye souffre donc toujours et dans une certaine mesure des conséquences de cette invasion.

La poursuite du conflit est en partie due à une concurrence importante quant aux ressources libyennes, qui étaient l'une des principales causes de cette intervention

RT: Que peut-on faire, désormais, pour que les gouvernements de Tripoli et de l’Est de la Libye commencent à discuter ?

E. G. : Malheureusement, jusqu’à ce jour, on n'a pas vu de très bon projet. Il y a des efforts – et ces efforts devraient être encouragés – visant à réunir les différentes forces, en particulier celles qui veulent une résolution pacifique [du conflit] et une reconstruction du pays. [La poursuite] du conflit est en partie due à une concurrence importante quant aux ressources libyennes, qui étaient l'une des principales causes de cette intervention. Il y a aussi une lutte pour l’accès aux ressources des fonds d'investissement de la Libye – les chiffres varient, mais j'ai entendu [parler] de montants s’élevant à près de 60 milliards d’euros – et pour [déterminer] ceux qui vont mettre la main sur cet argent... Mais je pense que les gens ont besoin d'une vraie solution pour sortir du bourbier actuel et essayer de commencer à reconstruire le pays, de se réunir, et de laisser les gens vivre une vie paisible et normale.

RT : Quel rôle devrait jouer la communauté internationale désormais ? Quels efforts sont nécessaires pour y apporter la stabilité ?

E. G. : Je pense qu’il faut principalement essayer de les amener à se parler, et essayer de faire participer [à ce dialogue] d'autres forces et d'autres groupes. Fondamentalement, il n'y a pas que ces deux gouvernements – et, maintenant, il y en a un troisième. Les gens doivent commencer à parler les uns avec les autres, ce serait la meilleure chose pour faire en sorte que les parties étrangères et la communauté internationale aident les Libyens pour commencer à s’en sortir. Cela va prendre des années pour que la Libye recouvre une vie normale. Mais, au moins, s’ils peuvent commencer à faire cela - amener les différents acteurs à accepter la création d’un gouvernement plus représentatif - alors nous nous mettrons au moins sur un chemin qui pourrait, un jour, conduire à une vie normale pour les Libyens.

Il y a aussi une lutte pour l’accès aux ressources des fonds d'investissement de la Libye [...] s’élevant à près de 60 milliards d’euros

RT : Comment commenteriez-vous l’engagement de perceurs de coffre-fort pour ouvrir une chambre remplie de pièces précieuse ?

E. G. : Eh bien, encore une fois, si ce n'était pas aussi tragique, ce serait comique. Le directeur de la Banque centrale n'a pas assez d'argent pour payer les employés, alors il engage deux perceurs. En outre, ils veulent fondre l'or, même si probablement ils obtiendraient beaucoup plus d'argent en vendant les pièces de monnaie en l’état parce que les gens aimeraient avoir des souvenirs ou des objets de collection. Mais à cause de l'image de Kadhafi sur les pièces de monnaie, ils ne veulent pas faire face à de potentielles conséquences politiques. Ils sont donc prêts à les fondre et à dégager moins d'argent que dans le cas où ils le vendraient sous forme de pièces de monnaie. En plus de cela, les gens de la ville affirment qu’il s’agit là de leur argent. C’est une situation très confuse et complexe.

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