Accord sur le nucléaire, relation avec Riyad : quel mandat pour le nouveau président iranien ?
Le vainqueur de la présidentielle iranienne Ebrahim Raïssi souhaite obtenir la levée des sanctions imposées par les Etats-Unis à l'Iran, pour relancer une économie en berne. Mais il refuse de rencontrer Joe Biden.
Après le double mandat de Hassan Rohani, l'Iran a élu le 19 juin son nouveau président en la personne d'Ebrahim Raïssi, ancien chef de l'Autorité judiciaire iranienne. Il héritera en août, à sa prise de pouvoir, d'une économie nationale plombée par les sanctions imposées par Washington contre l'Iran, après la décision de l'ancien président américain Donald Trump de dénoncer l'accord international sur le nucléaire iranien conclu en 2015.
Quelle diplomatie compte mettre en œuvre Ebrahim Raïssi vis-à-vis des Etats-Unis et de son rival régional, l'Arabie saoudite? Quelles sont ses opinions sur la politique intérieure, fortement influencée par les sanctions internationales ? RT France fait le point.
Levée des sanctions... et refus de rencontrer Joe Biden
Bien que candidat de l'Association du clergé militant, parti principaliste – appelé communément «conservateur» – , Raïssi a assuré pendant la campagne électorale que sa priorité était d'obtenir la levée des sanctions imposées à l'Iran : «Nous considérons l’accord comme un contrat que le Guide suprême [Ali Khameinei] a validé et nous nous engageons à le respecter», a-t-il assuré au cours d'un débat télévisé début juin. Son élection ne devrait donc pas avoir d'effet sur les négociations en cours pour sauver l'accord de Vienne en y réintégrant les Etats-Unis.
Alors qu'un nouveau cycle de négociations s'est achevé le 20 juin à Vienne, Ebrahim Raïssi a expliqué ce 21 juin lors de sa première conférence de presse post-élection que l'Iran ne permettra «pas de négociations pour le plaisir de négocier» sur son programme nucléaire. «Toute rencontre doit produire des résultats [...] pour la nation iranienne», a-t-il ajouté depuis Téhéran. «J'exhorte les États-Unis à revenir à leur engagement envers l'accord [...] Toutes les sanctions imposées à l'Iran doivent être levées et vérifiées par Téhéran», a-t-il insisté, cité par Reuters.
Le futur président a également donné le ton sur ses rapports avec son rival américain, assurant n'avoir aucune intention de rencontrer le président des Etats-Unis Joe Biden. «Non», a-t-il répondu alors qu'un média américain lui demandait s'il souhaitait discuter en face-à-face avec son homologue américain afin d'alléger les sanctions contre l'Iran, et «régler» les problèmes entre deux pays ennemis depuis plus de 40 ans.
Réchauffement des relations avec Riyad, protection des droits humains
«Notre politique étrangère ne se limitera pas à l'accord nucléaire. Nous aurons des interactions avec le monde. Nous ne lierons pas les intérêts du peuple iranien à l'accord nucléaire», a néanmoins précisé Ebrahim Raïssi.
Au sujet d'un autre adversaire historique de l'Iran, l'Arabie saoudite, Raïssi a voulu faire preuve de diplomatie en déclarant qu'il «n'y a pas d'obstacles, du côté de l'Iran, à la réouverture des ambassades» et à la reprise des relations diplomatiques entre les deux nations, rompues depuis 2016. Dans la guerre en Syrie, Téhéran est le principal soutien militaire régional du président Bachar el-Assad, alors que l'Arabie saoudite a soutenu les rebelles. En outre, l'Iran est aussi accusé par Riyad et Washington de soutenir militairement les rebelles au Yémen, ce que Téhéran dément.
Par ailleurs, le futur président a été interrogé ce 21 juin sur le respect des droits de l'Homme en Iran : «Tout ce que j'ai fait au cours de mes années de service a toujours été orienté vers la défense des droits humains», a-t-il affirmé auprès de l'AFP, renvoyant les Occidentaux à leurs propres «violations» dans le domaine.
Ebrahim Raïssi avait également évoqué l'économie iranienne lors du premier des trois débats télévisés entre les candidats à la présidentielle, s'inquiétant notamment de l'inflation, «l'un des graves problèmes auxquels les gens sont confrontés aujourd'hui». «Les prix des produits de base ont considérablement augmenté», avait-il ajouté.
Si la bonne santé de l'économie iranienne dépend notamment de la levée des sanctions, Ebrahim Raïssi avait expliqué au cours de ce débat qu'il fallait néanmoins tenter de redresser la barre sans attendre de bonnes nouvelles concernant l'accord de Vienne : «L’autorité à l’étranger est une prolongation de l’autorité à l’intérieur. Lorsque vous ne pouvez pas fournir assez de poulets dans le pays, vous êtes aussi incapables de faire appliquer l’accord.»
Enfin, sur les questions sociétales, Ebrahim Raïssi s'était engagé pendant la campagne à être le défenseur de la «liberté d'expression», des «droits fondamentaux de tous les citoyens iraniens» et de la «transparence». Sur ce dernier point, il avait notamment jugé pendant le débat télévisé du 5 juin, en citant de «nombreux sondages», que «l'une des préoccupations de la population» était «la malhonnêteté de certains responsables» du gouvernement. Il a ainsi promis de former un «gouvernement du peuple pour un Iran puissant» et d'exterminer les «foyers de la corruption».