Equateur : Quito placée sous couvre-feu et contrôle militaire par le président Lenin Moreno
Le président équatorien a ordonné le couvre-feu et l'instauration d'un contrôle militaire sur Quito, au 11e jour d'une mobilisation de la société civile contre la hausse spectaculaire du prix des carburants, conséquence d'un accord avec le FMI.
Confronté à d'importantes manifestations contre sa politique économique, Lenin Moreno a donné l'ordre d'instaurer un couvre-feu à partir de 15h, heure locale [22h à l'heure de Paris], le 12 octobre, pour faciliter selon ses termes «le travail de la force publique face aux intolérables débordements de violence». L'annonce a été faite par le chef d'Etat sur Twitter. Concrètement, l'armée a décrété, selon les informations de la chaîne vénézuélienne TeleSur, une interdiction pour la population de se rendre dans «toute zone sensible et importante» jusqu'à nouvel ordre. Dans le communiqué cité par ce même média, la mesure restrictive s'applique à tout le territoire national et concerne des lieux comme les aéroports et ports, les raffineries ou encore les infrastructures de la police ou de l'armée.
He dispuesto el toque de queda y la militarización del DMQuito y valles. Empezará a regir a las 15:00. Esto facilitará la actuación de la fuerza pública frente a los intolerables desmanes de violencia.
— Lenín Moreno (@Lenin) October 12, 2019
Cette annonce intervient alors que des affrontements entre forces de l'ordre et manifestants ont eu lieu dans le nord de Quito, où un groupe d'activistes encagoulés a mis le feu et saccagé le bureau de l'Inspection générale des finances. Une cible qui ne doit rien au hasard puisque le mouvement de protestation, auquel participent notamment les indigènes, est né du rejet par la population des réformes négociées par Lenin Moreno en échange d'un prêt de 4,2 milliards de dollars du FMI, qui se sont notamment traduites par une spectaculaire hausse du prix des carburants, de 100%.
Le bâtiment a été attaqué avec des cocktails Molotov et peu après un groupe d'hommes – la plupart avec le visage masqué ou portant des casques – y est entré. Les autorités ont annoncé sur Twitter l'évacuation de la zone pour «que les équipes de secours puissent lutter contre l'incendie et s'occuper du personnel qui se trouve à l'intérieur».
Les locaux de la chaîne de télévision privée équatorienne Teleamazonas et du journal El Mercurio à Quito ont également été violemment pris pour cible.
11 jours de mobilisation
Le président équatorien a été contraint par la mobilisation de masse, de quitter la capitale avec son gouvernement le 7 octobre. Il a transféré le siège de l'exécutif à Guayaquil, deuxième ville du pays située au sud-ouest de l'Equateur et épargnée par les protestations. C'est depuis cette cité portuaire que Lenin Moreno avait accusé le président vénézuélien Nicolas Maduro et son prédécesseur Rafael Correa d'être derrière les troubles que traversent le pays.
Les manifestations, qui se traduisent également par des blocages de points stratégiques comme des puits de pétrole, ont régulièrement donné lieu à des affrontements avec les autorités. Selon les chiffres communiqués par le gouvernement équatorien, cinq morts et 2 000 blessés sont à déplorer depuis le début du mouvement de contestation.
L'état d'urgence a été décrété pour 60 jours dans le pays alors que 74 000 militaires et policiers ont été déployés. La principale organisation indigène d'Equateur, une des principales forces dans ce mouvement social, a cependant annoncé le 12 octobre qu'elle acceptait le dialogue avec Lenin Moreno pour discuter du «retrait ou [de] la révision du décret» mis en cause par les manifestants.
Le président équatorien de son côté peut compter sur le soutien de Washington qui, par la voix de son secrétaire d'Etat Mike Pompeo, a salué les «efforts» du gouvernement équatorien «pour institutionnaliser les pratiques démocratiques et appliquer les réformes économiques nécessaires».