Grand débat : les enfants aussi proposent des idées à rebours de la politique présidentielle

av© François Guillot Source: AFP
Le Grand débat national pour les enfants le 20 mars 2019, animé par Adrien Taquet.
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Cent enfants ont été convoqués à Paris le 20 mars par le nouveau secrétaire d'Etat à la protection de l'enfance en vue de contribuer au grand débat national. Or la plupart de leurs rêves ne sont pour le moment pas dans la ligne de mire du président.

Intellectuels, associatifs, femmes, jeunes, prisonniers : le grand débat national souhaité par Emmanuel Macron n'a voulu oublier aucun citoyen français. Lors de l'édition du grand débat national pour les enfants le 20 mars, les jeunes participants ont fait part de leurs rêves, aux antipodes du programme présidentiel.  

Une centaine d'enfants, entre huit et quatorze ans, sont venus de toute la France pour participer au débat organisé à la Cité des sciences et de l'industrie à Paris. Ils avaient été sélectionnés parmi des associations telles que SOS Villages d'enfants, l'Association nationale des conseils d'enfants et de jeunes ou Scoutisme français. Certains participent déjà dans leur région au débat d'idées, et interviennent même au conseil municipal.

Ouvert par Brigitte Macron, l'épouse du président, qui a rapidement quitté les lieux, le débat était animé par Adrien Taquet, le nouveau secrétaire d'Etat à la protection de l'enfance qui avait été nommé 10 jours après la diffusion le 16 janvier d'un documentaire sur France 3 révélant les maltraitances graves et autres abus sexuels vécus par les enfants placés par l'Aide sociale en France. 

A la Cité des enfants, les jeunes participants au débat ont pu énoncer leurs rêves et colères sur des tableaux prévus à cet effet. Les organisateurs avaient choisi d'orienter la discussion autour de quatre thèmes : citoyenneté, environnement, violences scolaires et santé. Difficile de préparer les questions de cette jeune foule à l'avance, ou d'apposer le cynisme ou la langue de bois à la candeur des évidences. Une grande partie des suggestions des enfants, qu'on peut difficilement accuser d'être politisés, allaient à rebours de la politique présidentielle.

Dès la première intervention, une petite fille s'est indignée que l'on puisse laisser des sans domicile fixe dormir dans la rue.

Le président lui-même partageait, il y a un temps, la consternation de la fillette. Il avait d'ailleurs promis qu'il n'y a aurait plus de sans-abris «dans la rue, dans les bois», d'ici fin 2017. Une promesse qui a fait long feu face au décompte alarmant du nombre de SDF, qui selon certaines estimations, est évalué à 200 000 personnes. Les places d'hébergement sont pourtant en augmentation (plus de 132 000 pérennes au cours de l’hiver 2017-2018), y compris durant le mandat d'Emmanuel Macron, mais elles ne suffisent pas à accueillir tous les demandeurs. Le 115, qui propose bien souvent des conditions d’accueil très précaires, se voit obligé de refuser des demandes.

Des enfants très préoccupés par l'environnement

Semblant bien mieux saisir l'urgence écologique que leurs aînés, les votants en devenir ont aussi plaidé pour davantage d'aliments bio et locaux.

La consommation d'aliments issus de l'agriculture biologique a augmenté de 30 % entre 2006 et 2010. Fin 2016, le marché du bio en France était évalué à 6,9 milliards d'euros. Ce marché potentiellement juteux ne peut se développer qu'au prix d'aides dites «à la conversion» pour des agriculteurs souvent plus fragiles. Elles sont actuellement de cinq ans après installation. Or le président de la République s’était déclaré en faveur d’une réduction de ces aides à trois ans.

Il a fallu que la Fédération nationale de l'agriculture biologique (FNAB) s'acharne pour obtenir une réponse claire du gouvernement. Le ministère de l’Agriculture vient finalement d'annoncer qu’il n’y aurait pas de changement quant à la durée de versement des aides bio. La profession avait cependant senti le vent du boulet depuis plusieurs mois.

Il est difficile de comprendre que le président ait pu penser que sans ces aides l'objectif de la France dans son programme Ambition Bio «de passer de 6,5 à 15 % de surface agricole utile d’ici 2022 convertie en agriculture biologique» serait imaginable... et parallèlement, 20 000 agriculteurs bio attendent le versement de leurs aides en retard. A tel point que trois d'entre eux, excédés de ne pas avoir touché les sommes qui leur sont dues depuis trois ans ont décidé d'attaquer l'Etat en justice, après avoir saisi le défenseur des droits.

Les enfants ont aussi exprimé leur colère liée à la surabondance des pesticides. Or la France a manqué ses objectifs de réduction des pesticides. Le plan Écophyto visait à diviser par deux l'utilisation de pesticides en France entre 2010 et 2018, une échéance repoussée à 2015. En réalité l'utilisation des pesticides a augmenté en 2017. Les derniers chiffres officiels dévoilent même qu'entre 2009 et 2016, elle a augmenté de 12,4 %. 

La jeune assemblée s'est aussi émue du déclin des abeilles... qui est en partie liée à l'utilisation des pesticides. Personne n'a cependant voulu troubler la fête en annonçant aux enfants que l’Assemblée nationale avait reporté, le 16 mars, de trois ans l’interdiction de produire, stocker et faire circuler en France des pesticides prohibés par l’Union européenne.

Adrien Taquet s'est dit «très heureux» que les enfants se sentent à ce point concernés par l'écologie. Il ne lui reste plus qu'à communiquer cet enthousiasme juvénile au ministre de la Transition écologique François de Rugy, qui s'est jusqu'ici montré très timoré sur les dossiers polémiques.

«Vous pouvez lui dire ce que vous avez sur le cœur et lui va faire»

Finalement, c'est dans le domaine de l'égalité entre femmes et les hommes que les enfants pourront peut-être enfin exaucer leurs rêves. L'Etat vient de créer un index que les entreprises de plus de 50 salariés devront rendre public et qui permettra d'évaluer les disparités salariales. Ils pourront être passibles de sanctions financières si les femmes sont discriminées.

En revanche, sur la question des violences à l'école, qui selon les enfants présents, ne semble pas être prise en charge par les adultes, Adrien Taquet s'interroge : «Normalement, les enseignants ont été formés, il y a une journée de sensibilisation, qu’est-ce qu’il faudrait de plus ?» Et le nouveau secrétaire d'Etat de lancer des idées pour remédier à ce grave problème qui persiste depuis de nombreuses années. Seront-elles suivies d'effet ?

Les remarques des enfants vont être consignées au même titre que celles des adultes dans les registres du grand débat national. «Allez-y il n’y a pas de frein, vous pouvez lui dire ce que vous avez sur le cœur et lui va faire», avait assuré Brigitte Macron aux enfants en préambule au débat, en évoquant son époux. Promis juré ?

Lire aussi : Grand débat national : La République en marche formule des propositions... cosmétiques ?

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