Le débat de Macron avec les intellectuels descendu en flamme par l'un des participants
Invitée au débat d'Emmanuel Macron avec d'autres intellectuels, la sociologue Dominique Méda en est ressortie pour le moins frustrée, estimant que ces derniers avaient été «pris en otage» par un président qui n'a fait qu'«asséner ses convictions».
«Après celui avec les maires, c’était au tour des intellectuels de tomber dans le piège : car de débat il n’y en eut point» : dans une tribune publiée par Libération, la sociologue Dominique Méda dresse un constat sans appel de la soirée du 18 au 19 mars, lors de laquelle 64 intellectuels ont été invités à l'Elysée par Emmanuel Macron, en guise de dernière étape du grand débat national.
La sociologue estime ainsi qu'il s'agissait tout simplement d'un «non-débat», consistant en une «litanie inexorable de "réponses" d'Emmanuel Macron aux questions posées par les intellectuels». Déplorant le manque de temps dont disposaient les invités pour exposer leur vision, Dominique Méda explique qu'en conséquence, il n'y a eu qu'une «juxtaposition de questions-réponses au cours desquelles le président a eu tout loisir d’asséner ses convictions devant des intellectuels pris en otage».
«En le regardant parler pendant huit heures, écoutant certes chacun et répondant en effet aux questions, j’ai compris à quoi nous servions. Comme les maires, nous constituions le mur sur lequel le président faisait ses balles, jouissant de la puissance de ses muscles et de la précision de ses gestes et donc de la propre expression, cent fois ressentie, de son moi. Nous étions son faire-valoir», juge-t-elle sans équivoque.
Plusieurs personnalités avaient préféré décliner l'invitation du président de la république. Dans une lettre ouverte, le philosophe Frédéric Lordon avait notamment justifié son choix en dénonçant la responsabilité, selon lui, du chef de l'Etat dans le climat de violence actuel : «Vous avez fait du peuple un ennemi de l'Etat.» L'économiste Thomas Piketty, qui avait également refusé de participer au débat, avait confié à Libération que cet exercice représentait «le sommet de la dérive monarchique».