Affaire Tariq Ramadan : les plaignantes disent être harcelées quotidiennement
Henda Ayari, la première femme à avoir porté plainte contre Tariq Ramadan, est désespérée après avoir retrouvé sa voiture vandalisée, ce qu'elle impute aux soutiens de l’islamologue. Les trois plaignantes françaises se disent victimes de harcèlement.
Henda Ayari, la première femme à avoir porté plainte contre Tariq Ramadan le 20 octobre 2017, a exprimé sur Twitter son exaspération après le vol et la détérioration de sa voiture, un fait à ajouter au harcèlement quotidien dont elle s'estime victime, à l'instar des deux autres plaignantes françaises.
Le 15 avril, Henda Ayari affirme sur le réseau social avoir retrouvé sa voiture dégradée dans le parking des Halles, à Paris. Ses affaires personnelles et ses documents auraient été volés. Elle s'indigne que son dépôt de plainte et d’un complément d’information ait duré plusieurs heures.
Sous le choc ! En allant récupérer mon véhicule ce matin garé dans le parking du Forum des Halles j'ai découvert (une fois de plus)ma voiture vandalisée et cette fois toutes mes affaires ont été volés tout à été volé !Je me sais surveillée. Cette fois je craque ! Je suis à bout !
— Henda Ayari (@Henda_Ayari) 15 avril 2018
S’estimant mal reçue par le commissariat alors qu’elle craint être suivie par des soutiens de Tariq Ramadan, qui l’auraient repérée jusque dans ce parking, elle se plaint de ne pas être prise au sérieux, et dit même finir par regretter d’avoir entamé des poursuites judiciaires contre l'islamologue suisse.
Qu'est ce que je dois faire pour être entendue par ceux qui ont le pouvoir de nous apporter un minimum de sécurité et de protection?Je vis ds l'angoisse et la peur je suis surveillée et agressée régulièrement,je n'en peux plus! je commence à regretter d'avoir porter plainte !
— Henda Ayari (@Henda_Ayari) 15 avril 2018
Je ne peux plus faire mes courses, je ne peux plus me balader dans la rue
Henda Ayari explique avoir été abandonnée par sa famille après son dépôt de plainte et recevoir des dizaines de menaces de mort chaque jour. Elle dit faire l’objet d’insultes et d’agressions lorsqu'elle sort de chez elle. «Je ne peux plus faire mes courses, je ne peux plus me balader dans la rue. Je sors désormais avec une casquette, un bonnet, des lunettes de soleil et la tête baissée», a-t-elle confié à l'hebdomadaire Marianne. Au rassemblement d'hommage à Mireille Knoll, l'octogénaire juive assassinée à Paris, un homme lui aurait craché au visage.
Elle implore le droit à une protection policière, mais rien ne lui aurait été accordé selon elle.
J'ai été reçu une seconde fois au commissariat car on m'a expliqué que le premier policier qui avait pris ma plainte n'avait pas noté certains détails importants. J'ai passé l'après-midi à attendre juste pr faire un complément de plainte.Toujours aucune protection pr moi ce soir.
— Henda Ayari (@Henda_Ayari) 15 avril 2018
En effet contrairement à ce qui a été dit ds certains médias ns ne bénéficions d'aucune protection,j'ai moi-même été agressée ds le métro à Paris la semaine dernière en allant à la manif pr la mémoire de Mireille Knoll contre l'antisémitisme.Les fous de T R n'ont aucune limite ! https://t.co/o7rj0LbmEl
— Henda Ayari (@Henda_Ayari) 3 avril 2018
Sur son compte Twitter, Henda Ayari sensibilise régulièrement les internautes aux difficultés rencontrées par elle-même ou les autres victimes, à cause des fanatiques de Tariq Ramadan. Elle a par exemple évoqué l’enfer vécu par Marie, la troisième plaignante, qui elle, ne communique pas sur les réseaux sociaux.
Tant qu'aucune solution d’hébergement ds un endroit sécurisé pr mon amie M,la 3ème plaignante,ne sera trouvée pr la proteger,je continuerai à dénoncer les agissements des pro T R qui lui font vivre l'enfer depuis son dépôt de plainte.Elle est en danger DE MORT ! il faut l'aider !
— Henda Ayari (@Henda_Ayari) 3 avril 2018
Les deux autres plaignantes décrivent également des harcèlements
Selon Marianne, «Marie» (nom d'emprunt), qui a porté plainte pour viols contre le prédicateur suisse le 7 mars, s’est fait passer à tabac le 24 mars par quatre hommes dans le hall de son immeuble. Ils l’auraient aspergée d’eau et l’auraient prévenue que la fois suivante, ils l’arroseraient d’essence. Le propre frère de Marie l’aurait menacée de mort, en lui envoyant le message suivant : «Tu n’as que ce que tu mérites.»
Il aurait aussi dévoilé sa véritable identité sur internet. Selon Marianne, la jeune femme a mentionné un autre incident : des inconnus se seraient arrêtés en voiture à son niveau et auraient menacé ses enfants. Elle a par la suite annulé un rendez-vous avec son avocat.
La plaignante prénommée «Christelle» dans un article de Vanity Fair de février, se plaint elle aussi de menaces et insultes quotidiennes sur les réseaux. Elle a constaté que ses détracteurs disposaient d’«informations très précises sur [s]a vie privée, sur [s]on emploi du temps». «Cette surveillance nous terrorise», a-t-elle confié à Marianne. Elle a débranché son interphone, estimant que son appartement était assiégé par des soutiens de Tariq Ramadan, alors qu'elle rapporte s'être fait traiter de «sale nègre» et «sale pute» dans la rue. Mais elle dit ne pas souhaiter retirer sa plainte, tout comme à ce jour les deux autres victimes, malgré les harcèlements qu'elles disent subir.
La secrétaire d'Etat Marlène Schiappa avait dénoncé début avril sur son compte Twitter les «menaces, intimidations voire agressions» dont seraient victimes les trois femmes.
Les menaces intimidations voire agressions en direction de femmes ayant déposé plainte pour viol sont intolérables.
— MarleneSchiappa (@MarleneSchiappa) 3 avril 2018
Autorités compétentes alertées et en action.
J’invite tout témoin à en référer à la police afin que la justice ne souffre aucune entrave dans sa procédure en cours.
Parallèlement, l'enquête concernant l’islamologue, détenu depuis le 2 février, se poursuit. La Tribune de Genève a révélé le 13 avril que Tariq Ramadan était visé par une cinquième plainte pour viol, cette fois en Suisse. Une femme l’accuse de l'avoir violée et retenue contre son gré pendant plusieurs heures dans une chambre d'hôtel de Genève en 2008. Par ailleurs, le journal belge Le Vif et Mediapart ont rapporté que Tariq Ramadan avait versé 27 000 euros à une femme, afin de la contraindre à effacer ses publications sur internet, où elle témoignait notamment de leur relation compliquée.
Lire aussi : Tariq Ramadan visé par une cinquième plainte pour viol