La guerre froide est terminée depuis longtemps, mais pas pour tout le monde. Un nouveau conflit pointe-t-il ou Donald Trump saura trouver un terrain d'entente avec Moscou ? Suzanne Massie, ex-conseillère du président Ronald Reagan, répond à RT.
RT : Vous faites des discours au sujet des relations avec la Russie. Pourquoi à votre avis les voix comme la vôtre sont-elles ignorées ?
Suzanne Massie (S. M.) : Elles ne le sont pas. Les Américains ont un avis très différent de ce que l'on entend venir des Etats-Unis, qui vient de Washington et de certains médias. Parfois même la Russie oublie que Washington, ce n'est pas la même chose que les Etats-Unis, tout comme Paris n'est pas la même chose que le reste de la France. Nous avons d'autres endroits, et je le dis toujours : au lieu d'essayer de se concentrer tout le temps sur Washington, il faut regarder ailleurs aux Etats-Unis. Je ne prendrais donc pas trop au sérieux tout ce que l'on dit à l'heure actuelle, et je crois que la population est du même avis. Aucun Américain que j'aie jamais rencontré ne veut de guerre avec [la Russie].
Rappelez-vous qui dirige les médias traditionnels – très peu de gens en fin de compte
RT : Toute personne qui tente de vouloir développer les liens entre la Russie et les Etats-Unis est automatiquement qualifiée d'«espion du Kremlin». Y a-t-il une place pour une vision positive de la Russie dans les médias traditionnels américains ?
S. M. : Oui. Mais, rappelez-vous qui dirige les médias traditionnels – très peu de gens en fin de compte. Je ne sais pas combien de personnes contrôlent réellement les principaux médias – je pense à CNN, à Fox News, etc. Ce sont des sociétés, ce sont ces personnes qui rectifient tout... Les médias traditionnels, c'est ce qu'on entend d'habitude, mais je vous le dit : il ne faut pas leur accorder trop d'importance.
RT : Croyez-vous que l'administration actuelle va surmonter les objections de l'establishment politique pour procéder à un dégel des relations avec la Russie ?
S. M. : Je l'espère. Beaucoup de personnes sont préoccupées par l’approche qu'adoptera la nouvelle administration. Ce n'est même pas encore décidé pour le moment. Je pense que vous avez raison. Il y a un groupe de personnes, à Washington, pas tout à fait transparentes, ce sont ceux qui voudraient contrarier Donald Trump. Tout dépendra donc de savoir si Donald Trump a le courage d'aller à contre-courant de l'ensemble de l'establishment qu'il ne connaît pas.
Donald Trump a gagné beaucoup d'argent, mais n'a pas vraiment beaucoup parlé au peuple
RT : Pensez-vous qu'il y a actuellement la possibilité de rétablir la confiance entre les dirigeants américains et la Russie ?
S. M. : Je l'espère. Nous avons travaillé dans cette direction. Je peux vous dire qu'il y a énormément de gens qui seraient capables de le faire, mais nous ne savons pas encore qui sera aux commandes. Je pense que nous devons attendre un peu et voir ce qui se passe, c'est le conseil que je donnerais à tout le monde.
Il y a des personnes qui s'y opposent au Sénat et dans d'autres institutions On verra qui va l'emporter. Mais ce que je peux vous dire, c'est que la population ne veut pas de guerre avec la Russie, ce qui n'est pas surprenant. Je préfère donc faire confiance à l'intelligence des Américains. Je pense qu'ils aspirent vraiment aux changements à cause de plusieurs choses, et pas seulement à cause de la Russie ou de la politique étrangère. Maintenant ils l'ont, et tout le monde doit s'adapter à ce changement et aux nouvelles personnalités. Après tout, en parlant de Ronald Reagan, il avait beaucoup d'expérience en gouvernance. Mais il avait beaucoup d'expérience avec le peuple. Il savait parler au peuple. C'est ce qui manque maintenant. Donald Trump a gagné beaucoup d'argent, mais n'a pas vraiment beaucoup parlé au peuple et le connaît pas très bien. Il nous faut donc... attendre.
C'est comme à l'époque du maccarthysme, on ne pouvait rien dire
RT : Beaucoup de gens se demandent actuellement pourquoi les Russes sont devenus le bouc émissaire pour toutes les choses négatives qui se passent aux Etats-Unis. L'apparition du hashtag #RussiansDidIt est assez symptomatique...
S. M. : Il y a toutes sortes de blagues à ce sujet. Les gens comprennent, ils ne sont pas stupides, que cela va un peu trop loin. Je pense que c'est très dangereux, j'ai lutté contre cela comme je pouvais, parce que je sentais qu'il était difficile de dire quoi que ce soit. C'est comme à l'époque du maccarthysme où l'on ne pouvait rien dire.
RT : Vous portez l'accent sur les relations personnelles, et Donald Trump en parle justement. Les contacts personnels entre les dirigeants peuvent-ils faire changer les choses, cela suffit-il ?
S. M. : Reagan l'a fait, il voulait beaucoup le faire, et il croyait profondément dans les relations personnelles. C'est une question d'expérience. Il a toujours pensé que si les gens pouvaient se parler face à face, on pouvait aller beaucoup plus loin que via d'autres moyens, et il le faisait dans la vie réelle.
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