L'habitude de l'UE de suivre les instructions américaines devient problématique face à une possible levée des sanctions anti-russes : désormais, elle devra justifier toute démarche devant son public, estime le journaliste Guy Mettan.
RT France : Certains médias annoncent que Donald Trump aurait préparé un décret pour lever les sanctions contre la Russie. Si un tel décret devait être signé, les dirigeants européens, qui ont imposé ces sanctions de concert avec les Etats-Unis, vont-ils à nouveau suivre l’exemple américain et lever les sanctions ?
Guy Mettan (G. M.) : Oui, effectivement, j’ai vu cette nouvelle sur les réseaux sociaux. Si c’était le cas, cela serait une bonne nouvelle qui permettrait d’apaiser les tensions entre les Etats-Unis et la Russie. Ce qui serait une excellente chose. D’autre part, cela pourrait avoir effectivement une influence positive sur les gouvernements européens. Ce qu’il faut savoir c’est qu'actuellement les gouvernements européens actuels, en France, en Allemagne et en Angleterre, sont tout à fait opposés à la levée des sanctions. Les Allemands et les Français sont très critiques vis-à-vis du président Trump, et ils sont toujours très favorables aux sanctions. Donc, cela n’arrivera pas tout de suite.
On aura d’abord des changements électoraux, et ensuite la pression deviendrait telle, que les gouvernements européens devront changer d’avis et lever les sanctions
En revanche, si les Etats-Unis levaient les sanctions, les forces populaires qui sont opposées aux sanctions, les opinions publiques, les Européens qui sont contre les sanctions, tous seraient grandement encouragées. Je crois que, dans quelques mois, on aura d’abord des changements électoraux, et, ensuite, la pression, soit des entreprises, soit des opinons publiques, soit des certains partis politiques deviendrait telle, que, vraisemblablement, les gouvernements européens qui sont actuellement hostiles, devront changer d’avis et lever les sanctions à leur tour.
RT France : S’ils ne le font pas juste après Donald Trump, cela ne constituera-t-il pas une nouvelle ligne de fracture entre les dirigeants européens et le nouveau président américain, les relations étant, entre eux, déjà assez tendues ?
G. M. : Oui, tout à fait. En même temps, ces dirigeants avaient déjà pris des positions très hostiles à l'égard de Donald Trump. Et ils se retrouvent probablement très embarrassés à l’idée de devoir changer d’avis et de suivre la décision du gouvernement américain rapidement. Ils vont essayer de trouver des artifices pour tenter de prolonger les sanctions. Cela dit, je pense que, à terme, dans quelques mois à peu près, ils seront obligés de le faire. D'une part parce qu'ils sont en contradiction avec leur propre opinion publique. Et d’autre part, parce qu'ils auront beaucoup de peine à justifier les sanctions alors que la première puissance mondiale les aurait abolies. Cette contradiction va être gênante pour eux. Cela ne sera pas immédiat, mais je pense que cela aura lieu quoi qu'il arrive.
L’opinion publique occidentale a été complètement dupée par les médias mainstream qui, depuis des années, essayent de convaincre que la Russie est l'ennemi public numéro un
RT France : Vous avez mentionné l’opinion publique en Europe. On a vu, depuis un certain temps déjà, des parlements, des hommes politiques et des experts demander la levée des sanctions. Si les dirigeants européens suivent les Etats-Unis et n'agissent pas de leur propre initiative, comment cela sera-t-il vu au sein de leur propre pays ?
G. M. : Je pense que cela va être justement difficile. Le problème des gouvernements actuels est qu’ils ont peur de perdre la face, et les dirigeants n’aiment pas perdre la face. Ils vont donc essayer de justifier la prolongation des sanctions pendant un certain temps. C’est comme cela que tout risque de se produire, cela viendra progressivement : les Européens ne vont pas lever les sanctions en 48 heures après les Etats-Unis, cela prendra un peu plus de temps.
RT France : L’opinion publique sera-elle critique envers les gouvernements, parce qu’ils n'auront pas pris cette décision par eux-mêmes ?
G. M. : L’opinion publique occidentale a été complètement dupée par les médias mainstream qui, depuis maintenant des années, enseignent l’idée, tentent de convaincre que la Russie est l'ennemi public numéro un. Une bonne partie de cette opinion reste convaincue que c’est le cas.
Le parti de l’abolition des sanctions va rentrer dans le débat public
Une partie de l’opinion publique va finir par se convaincre qu’on l'a trompée et que la levée des sanctions s’impose. Cela risque de prendre quelques mois, mais pas plus. Cela ne doit pas durer longtemps, parce que je ne vois pas, comment l’Union européenne va maintenir un programme de sanctions, alors même que les Etats-Unis les a abandonnées.
RT France : L’opinion publique pourrait donc devenir favorable à la levée des sanctions ?
G. M. : Exactement. Il y a un débat qui va se mettre en place, le parti de l’abolition des sanctions va rentrer dans le débat public de manière de plus en plus manifeste, jusqu’à ce qu’ils soient en mesure de forcer le gouvernement à changer d’avis, et cela peut se faire assez rapidement.
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