L'érosion du soutien à Angela Merkel, devenu manifeste après les élections locales, annonce la montée d'une vague populiste et constitue un véritable tournant pour l'Allemagne, estime l'économiste Jacques Sapir.
Les élections locales à Berlin qui se sont tenues ce dimanche clôturaient une série de scrutins locaux. Ces scrutins montrent l’érosion du soutien à Angela Merkel et la montée du parti populiste controversé Alternative pour l’Allemagne ou AfD. L’Allemagne semble donc, elle aussi, être sensible à la vague dite «populiste». Ceci pourrait constituer un véritable tournant. Il est clair que le consensus humaniste sur la question des réfugiés n’a pas résisté au choc de la réalité.
A Berlin, l’AfD fait son apparition à la chambre locale avec 14,2% des suffrages, tandis que la CDU [Union chrétienne-démocrate d'Allemagne] de Madame Merkel fait son plus mauvais résultat. Une analyse des bureaux de vote montre que l’AfD a fait ses meilleurs résultats dans le nord-est et l’est de Berlin. Il jouxte d’ailleurs les zones où Die Linke, le parti issu de la scission à gauche du SPD (social-démocrate) est le plus important. Il semble bien que ces deux partis, pourtant avec des positions opposées quant à l’accueil des réfugiés, prospèrent sur le même électorat.
Plus de vingt-cinq ans après la réunification, la culture politique de l’ouest et l’est de l’Allemagne reste toujours différente
Il est d’ailleurs important de remarquer que tant la CDU que le SPD et les Verts perdent à ce scrutin. Le SPD maintenant ses positions dans l’ancien quartier ouvrier de Spandau. On peut aussi noter la différence des résultats entre l’ancien «Berlin-Ouest» et l’ancien «Berlin-Est». Cela joue bien sûr pour les résultats de Die Linke, ou la différence entre l’Est et l’Ouest est très marquée, mais cela joue aussi pour le vote de l’AfD. Plus de vingt-cinq ans après la réunification, la culture politique de l’ouest et l’est de l’Allemagne reste toujours différente. Il y a là une importante leçon à tirer qui concerne aussi l’Union européenne.
Cela montre bien que l’électorat de l’AfD est un électorat essentiellement populaire et ouvrier
Il est par contre tout aussi significatif de noter que l’AfD dépasse le SPD dans le vote ouvrier, et fait jeu égal avec la social-démocratie dans le vote des chômeurs. Cela montre bien que l’électorat de l’AfD est un électorat essentiellement populaire et ouvrier.
D’une manière plus générale, et en dépassant le cas de Berlin, les statistiques compilées par Coralie Delaume montrent que la CDU perd nettement du terrain depuis le début de l’année 2016 ainsi que le SPD (sauf dans le land de Rhénanie-Palatinat). Les gains de l’AfD sont massifs alors que Die Linke semble en perte de vitesse, sauf à Berlin. Le développement du vote AfD se fait à la fois au détriment des «grands partis» et de Die Linke dont on voit, dans le cas de Berlin, qu’il est un concurrent (malheureux) de l’AfD.
Source : russeurope.hypotheses.org
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