Selon le chef du renseignement extérieur russe, les Occidentaux cherchent un «remplaçant» à Navalny
Le directeur du renseignement extérieur russe considère que ses homologues occidentaux ont constaté une baisse d'intérêt de la population russe pour l'opposant Alexeï Navalny. Partant, ils chercheraient un opposant «qui pourrait le remplacer».
«Aujourd’hui, la communauté du renseignement des Etats-Unis et des pays de l’UE est obligée d’admettre que l’intérêt de la population pour le patient berlinois diminue constamment», a déclaré ce 15 décembre le directeur du Service des renseignements extérieurs de la fédération de Russie (SVR) Sergueï Narychkine, dans un entretien au magazine russe Argoumenty i Fakty, en référence à Alexeï Navalny, souvent dépeint en Occident comme le principal opposant au président Vladimir Poutine.
Je dirai plus, ils recherchent déjà un autre emblème de la contestation russe
«Je dirai plus, ils recherchent déjà un autre emblème de la contestation russe qui pourrait le remplacer. La population russe s’est avérée beaucoup plus prudente et judicieuse que les stratèges politiques occidentaux sont habitués avec arrogance à le croire», a déclaré par ailleurs le patron du SVR.
Alexeï Navalny a été soigné à Berlin, après avoir été pris en charge dans un premier temps dans un hôpital d'Omsk en Russie, à la suite d'un malaise survenu dans un avion en août 2020. Il est sorti sans séquelles de l'hôpital berlinois puis a regagné en janvier 2021 la Russie, où il a été incarcéré pour des violations répétées de son contrôle judiciaire.
Il accuse le Kremlin d'avoir tenté de l'empoisonner – une version également défendue par plusieurs gouvernements, dont ceux de la France, des Etats-Unis et de l'Allemagne –, ce que réfute Moscou. Ces accusations ont aggravé des relations déjà tendues entre la Russie et l'Occident et ont été invoquées pour la prise de nouvelles sanctions anti-russes.
Le prix Sakharov du Parlement européen pour Alexeï Navalny
A la mi-journée de ce 15 décembre, le Parlement européen recevait Daria Navalnaya, la fille de l'opposant emprisonné en Russie pour des violations répétées de son contrôle judiciaire, pour recevoir en son nom le prix Sakharov du Parlement européen pour la liberté de l'esprit. La cérémonie a été retranscrite en direct sur les réseaux sociaux et on a pu y voir la jeune femme longuement applaudie par les parlementaires. «[C'est] un message aux dizaines de millions de concitoyens dans mon pays pour continuer à se battre pour un avenir meilleur pour la Russie», a-t-elle déclaré lors d'un discours donné en anglais aux parlementaires.
Alexeï Navalny a été placé fin février 2021 en colonie pénitentiaire après qu'un tribunal de Moscou a confirmé en appel la révocation d'un sursis prononcé en 2014, pour violations répétées des conditions de ce même sursis. En effet, Navalny ne s'était pas présenté à l'enregistrement auprès de l’inspection pénitentiaire à au moins six reprises au cours de l'année 2020 : le 13 janvier, le 27 janvier, le 3 février, le 16 mars, le 6 juillet et le 17 août. Il avait été condamné en 2014 trois ans et demi de prison avec sursis pour le détournement de 26 millions de roubles au détriment de Yves Rocher-Vostok.
En juin, le Conseil de l'Europe a demandé à la Russie (qui en est membre) la libération immédiate d'Alexeï Navalny et l'annulation de sa condamnation. Il faisait notamment valoir que la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) «avait estimé que les requérants [Alexeï Navalny et son frère Oleg, condamné dans l'affaire Yves Rocher] avaient été condamnés pour des actes qui ne se distinguaient pas d'activités commerciales régulières, par des décisions judiciaires arbitraires, imprévisibles et manifestement déraisonnables».