Meurtre du Géorgien à Berlin : la Russie dénonce les accusations «sans fondement» de l'Allemagne
L'affaire du Géorgien tué à Berlin continue de ternir les relations entre l'Allemagne et la Russie qui estime que les accusations des autorités allemandes selon lesquelles Moscou aurait commandité cet assassinat sont «sans fondement».
Les accusations de l'Allemagne selon lesquelles la Russie aurait commandité l'assassinat d'un citoyen géorgien à Berlin en août 2019 sont «sans fondement», a jugé ce 19 juin l'ambassadeur de Russie en Allemagne, Sergueï Netchaïev.
L'Allemagne estime en effet que les autorités russes ont commandité cet assassinat : «A une date inconnue antérieure au 18 juillet 2019, les autorités du gouvernement central de la Fédération de Russie ont ordonné au [suspect] de liquider le citoyen géorgien d'origine tchétchène», accuse dans un communiqué le parquet fédéral allemand, chargé des dossiers sensibles et en particulier des affaires d'espionnage.
Cette affaire empoisonne les relations bilatérales entre les deux pays. Le gouvernement allemand a fait savoir, par la voix du porte-parole d'Angela Merkel, qu'il prenait «très au sérieux» ces «graves accusations» et a menacé la Russie de nouvelles sanctions. Berlin avait déjà expulsé deux diplomates russes fin 2019 pour protester contre leur manque de coopération dans cette enquête. L'ambassadeur de Russie en Allemagne a souligné pour sa part que si de nouvelles mesures devaient être prises par Berlin, ces dernières «ne resteraient pas sans réponse».
En déplacement à Vienne, le ministre allemand des Affaires étrangères, Heiko Maas, a évoqué une affaire «extraordinairement grave» et annoncé que l'ambassadeur russe en Allemagne allait de nouveau être «invité à une rencontre».
Le libre arbitre du meurtrier en question
Le 23 août 2019, dans un parc de la capitale allemande, un Géorgien issu de la minorité tchétchène du pays, âgé de 40 ans et identifié comme Tornike Kavtarashvili, avait été tué de trois balles d'une arme avec silencieux. Des témoins avaient évoqué une «exécution». Vadim Krassikov, le suspect interpellé dans la foulée près des lieux du crime, est depuis emprisonné à Berlin, où il garde le silence.
«L'ordre de tuer vient de l'opposition de la victime à l'Etat central russe, aux gouvernements de ses républiques autonomes de Tchétchénie et d'Ingouchie, et au gouvernement pro-russe de Géorgie», affirme le parquet allemand qui rappelle en outre que la victime avait «combattu contre la Fédération de Russie en tant que chef d'une milice tchétchène lors de la deuxième guerre de Tchétchénie, de 2000 à 2004». La Russie avait classé l'homme «comme terroriste et l'[avait] accusé d'être membre du groupe terroriste "Emirat du Caucase"», selon le parquet.
La justice allemande se fait moins catégorique quand il s'agit du mobile de l'accusé. «Soit il espérait une récompense financière, soit il partageait le mobile de ses clients de tuer un opposant politique en représailles à son implication dans des conflits antérieurs avec la Russie», détaille ainsi le parquet, laissant entendre que le meurtrier aurait possiblement agi de son propre chef, par conviction.
L'ombre du GRU ?
Des médias avaient aussi évoqué la piste du président tchétchène Ramzan Kadyrov, voire des «islamistes tchétchènes» qui auraient «peut-être agi par vengeance dans le cadre de rivalités liées au crime organisé».
Der Spiegel, Bellingcat et The Insider, trois médias qui se sont intéressés à cette affaire, avaient révélé l'an dernier que le numéro du passeport du suspect conduisait à une unité du ministère de l'Intérieur à Moscou ayant déjà délivré par le passé des documents pour le GRU, le renseignement militaire russe. Le GRU est par ailleurs cité dans l'enquête sur l'empoisonnement de l'ancien agent double Sergueï Skripal, dans le sud-ouest de l'Angleterre en mars 2018.