Choléra en Algérie : vent de panique après l'attitude contradictoire des autorités
Un mort et une quarantaine d'autres personnes diagnostiquées comme souffrant du choléra en Algérie. Une nouvelle que les autorités ont mis une semaine à officialiser semant le doute au sein d'une population s'estimant peu informée.
C'est la stupeur en Algérie où 41 cas de choléra, dont un mortel, ont finalement été annoncés par les autorités sanitaires ce 23 août, après une semaine de tergiversations, faisant planer le doute sur le début d’une épidémie dans le pays. La population dénonce le manque de réactivité du gouvernement et semble méfiante quant à l'ampleur de la crise sanitaire, accusant les autorités de cacher la réalité des chiffres. La rumeur a en effet enflé durant une semaine avant que la nouvelle soit officialisée par les autorités. Dès le 15 août, le quotidien arabophone El Khabar évoquait quatre cas de décès de causes inconnues, dont trois personnes issues d’une même famille présentant une forte fièvre et des douleurs au foie, dans un hôpital de Bouira, au sud-est d'Alger. Une enquête avait alors été ouverte pour identifier la maladie. Dès les premières hospitalisations, le mot «choléra» avait circulé mais l'hypothèse a été immédiatement contredite par les autorités sanitaires, qui faisaient état d'une «maladie non identifiée», provoquant les mêmes symptômes qu'une intoxication alimentaire, à savoir des vomissements et une diarrhée.
Les contradictions des autorités sanitaires
Un démenti catégorique avait même été apporté par l'Institut Pasteur d'Algérie. «Les analyses préliminaires ont suffi à prouver qu'il ne s'agit nullement de cas de choléra», avait ainsi affirmé le 20 août son directeur général, Zoubir Harrat, au cours d'une conférence de presse conjointe avec le directeur de la prévention au ministère de la Santé, Djamel Fourar.
Mais, trois jours plus tard, le 23 août, les même porte-paroles ont tenu le discours inverse lors d'une nouvelle conférence de presse à l’Institut national de la santé publique à Alger. Ils ont en effet confirmé avoir détecté des cas de choléra. Ces déclarations contradictoires ont provoqué la stupéfaction et la méfiance au sein de la population.
#choléra en Algérie est un "scandale sanitaire"
— Dr.Amin MAHFOUDI (@mahfoudi_amin) 24 août 2018
le premier responsable du secteur doit démissionner et rendre des comptes. Il s'agit de vies humaines. Les responsabilités doivent être situées et les responsables sévèrement sanctionnés,C'est de l'incompétence à très grande échelle pic.twitter.com/7BfHwVOa5B
Quatre wilayas [divisions administratives] ont d'ores et déjà été touchées : Alger, Blida, Tipaza et Bouira, toutes proches les unes des autres. Mais du côté du ministère, on essaye désormais d'éteindre la polémique et de rassurer : «Ce sont des cas isolés, concentrés au niveau des familles», a précisé Djamel Fourar, ajoutant que la situation était «maîtrisée». Selon ce porte-parole, «la possibilité que la contamination se soit faite par l'eau a été rejetée», sinon la propagation aurait été plus massive et plus rapide, a-t-il expliqué. L'hypothèse privilégiée actuellement est une contamination par des légumes ou des fruits mal lavés. Mais, selon ce responsable du ministère de la Santé, la situation «n’est pas inquiétante et ne nécessite pas l’instauration d’un état d’urgence». Il a en outre appelé les citoyens au respect des règles d’hygiène, à savoir «bien se laver les mains, rincer les fruits et les légumes avant leur consommation et s’abstenir de rendre visite aux malades atteints de choléra dans les hôpitaux». Preuve que l'ampleur de la contamination reste à déterminer, le ministère de la Santé a fait savoir ce 25 août dans un communiqué que la source de Sidi El Kebir, dans la wilaya de Tipaza, était contaminée par le choléra. Les analyses effectuées ont en effet révélé la présence du vibrion cholérique.
Panique dans la population
Même si la piste de la contamination hydrique a été écartée par le ministère des Ressources en Eau et de l’Environnement, les Algériens semblent peu convaincus et se sont rués sur les packs d'eau minérale dans les magasins. La confirmation de l’épidémie a en effet provoqué des mouvements de foule dans les supermarchés, les habitants cherchant à se fournir en eau potable.
Dans les hôpitaux également, la panique s'est fait sentir. Des centaines de personnes pensant avoir contracté le choléra ont afflué, entraînant la saturation des établissements. Certains hôpitaux ont même fermé leurs portes et fait appel à des agents de sécurité. Sur les réseaux sociaux, l'inquiétude gagne les internautes, sur fond de mise en cause de la gestion gouvernementale du pays.
41 cas confirmés de choléra en Algérie.
— So' (@So_f_i_a_) 23 août 2018
Rappelons que le choléra touche principalement les pays pauvres ou en proie à la guerre, catastrophes naturelles, camps de réfugiés etc qui n'ont pas accès à l'eau potable ou à des conditions d'assainissement satisfaisantes.
Tout va bien.
Pour lutter contre le choléra :
— kenzi (@kenziRM) 24 août 2018
1)bien se laver les mains
2) ouvrir le tiroir
3) prendre son passeport
4)se casser de se pays le plus tôt possible
5) ne pas se retourner
#الكوليرا_في_الجزاير#choléra
— Mohamed Cherif Amokrane (@AmokraneCherif) 24 août 2018
La gravité de la situation ne vient pas des effets sanitaires de l'épidémie mais de ce que celle-ci représente en matière d'echéc politique, social et économique.
Les derniers cas sporadiques de choléra recensés en Algérie remontaient à 1996. La dernière épidémie date elle de 1986, où 4 500 personnes avaient été contaminées. Le choléra est une infection diarrhéique aiguë provoquée par l'ingestion d'aliments ou d'eau contaminés par un vibrion qui provoque de fortes diarrhées et des vomissements. Il peut entraîner une déshydratation sévère et la mort en l'absence de traitement.