Moscou, Téhéran et Damas exhortent les Etats-Unis à ne plus frapper la Syrie
A Moscou, la Russie, l'Iran et la Syrie ont déclaré que les frappes américaines contre la Syrie étaient un acte d'agression internationale et exigé de nouveau une enquête sur la présumée attaque chimique du 4 avril imputée par Washington à Damas.
«Nous avons réitéré notre position et sommes unanimement d'accord pour dire que la frappe [américaine contre la base militaire syrienne d'Al-Chaayrate, près de Homs] était un acte d'agression qui viole de manière flagrante les principes du droit international et de la Charte des Nations unies», a déclaré le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov lors d'une réunion avec ses homologues iranien et syrien, Mohammad Javad Zarif et Walid Mouallem à Moscou.
Moscou appelle au respect de la souveraineté de la Syrie
«Nous appelons les Etats-Unis et leurs alliés à respecter la souveraineté de la Syrie en s'abstenant à l'avenir d'actions semblables à celles qui se sont produites le 7 avril et qui ont eu de graves conséquences non seulement pour la sécurité régionale, mais aussi mondiale», a ajouté Sergueï Lavrov.
Il faisait référence au bombardement américain du 7 avril, lorsque 59 missiles Tomahawk se sont abattus sur la base syrienne d'Al-Chaayrate, tirés depuis des navires de guerre américains stationnés en Méditerranée orientale.
Russia, Syria & Iran demand no further US strikes on #Syria – foreign ministers https://t.co/6jTXvYZ6Mbpic.twitter.com/VG9khpK0Wj
— RT (@RT_com) 14 avril 2017
Washington avait ordonné l'attaque après avoir accusé Damas de l'utilisation d'armes chimiques contre son peuple dans la localité de Khan Cheïkhoun, dans la province d'Idlib, tenue par les rebelles anti-gouvernementaux. Les Etats-Unis affirment que les armes chimiques avaient été lancées depuis des avions militaires stationnés sur la base aérienne d'Al-Chaayrate. La Russie a condamné la frappe, indiquant que les Etats-Unis n'avaient livré aucune preuve tangible pour étayer leurs accusations.
«Les rapports d'experts, dont certains sont Américains et Britanniques, montrent un trop grand nombre d'incohérences et de lacunes dans la version des événements présentée pour justifier l'agression [américaine]», a déclaré Sergueï Lavrov.
Une «provocation» visant à «saboter les négociations» politiques en Syrie
Le ministre russe a par ailleurs ajouté que Moscou soupçonnait fortement que les frappes chimiques à Idlib étaient un acte de provocation destiné à déroger aux négociations entre le gouvernement syrien et les groupes dits rebelles modérés pour une transition politique dans le pays. Sergueï a déclaré que les auteurs de l'attaque chimique devaient être retrouvés.
«De tels actes d'agression visent sans aucun doute à saboter le processus de paix, qui a été approuvé dans une résolution adoptée à l'unanimité par le Conseil de sécurité de l'ONU et qui proclame que le sort de la Syrie ne devra être décidé que par le peuple syrien», a déclaré Sergueï Lavrov.
Le diplomate russe a également accusé les États-Unis de relancer les objectifs de l'administration Obama qui selon lui, voulait renverser le gouvernement syrien au lieu de chercher une solution politique.
«Nous exigeons l'ouverture d'une enquête approfondie, objective et impartiale concernant l'utilisation de substances chimiques à Khan Cheïkhoun le 4 avril», a martelé Sergueï Lavrov, ajoutant que les spécialistes devront être choisis parmi différentes nations pour assurer l'objectivité de l'enquête.
Les propos de Lavrov font ainsi écho à ceux du président russe Vladimir Poutine qui a avait déclaré le 11 avril que l'action entreprise par Washington était similaire à celles entreprises il y a près de 15 ans pour justifier l'intervention américaine en Irak.
«Cela ressemble beaucoup aux événements de 2003 quand, lors d'une réunion du Conseil de Sécurité, on a parlé des soi-disant armes chimiques qui auraient été retrouvées en Irak. Après cela a été lancée une campagne militaire en Irak qui s'est soldée par la destruction de l’Irak, par l'aggravation de la menace terroriste et l’apparition de Daesh à l’échelle mondiale. La même chose a désormais lieu en Syrie», avait indiqué Vladimir Poutine.
Lors de la rencontre avec ses homologues iranien et syrien, Sergueï Lavrov a promis que la Russie continuerait d'apporter son soutien à Damas dans la lutte contre le terrorisme et pour le rétablissement de la paix en Syrie.
Le ministre syrien des Affaires étrangères Walid Mouallem a promis la pleine coopération de Damas dans la réalisation de cette enquête.
Son homologue iranien Mohammad Javad Zarif a, quant à lui, mis l'accent sur l'hypocrisie de «certains pays», rappelant que l'Iran avait subi une attaque chimique lancée par l'Irak de Saddam Hussein pendant la guerre des années 1980.
Des fichiers déclassifiés de la CIA ont en effet montré que les États-Unis étaient entièrement au courant du fait que Saddam Hussein utilisait des armes chimiques contre les Iranien, mais ne s'y sont jamais opposés.