Gaza : le soutien de Biden à Israël remis en cause par des employés du Département d’Etat américain
Les critiques à l’égard de la politique de Joe Biden sur le conflit israélo-palestinien se multiplient au sein de la diplomatie américaine. Axios le 13 novembre, et Politico il y a quelques jours, ont dévoilé des notes internes au Département d'Etat particulièrement hostiles au président américain et à Antony Blinken.
Les notes de dissidences s’enchainent au sein du Département d’Etat des Etats-Unis. Le media israélien Axios relate ce 13 novembre qu’une lettre «cinglante», signée par une centaine d’employés du Département d’Etat et de l’USAID, a été adressée au début du mois à la direction du service.
Dans leur ligne de mire : les propos de Joe Biden lors de son discours du 10 octobre. Le président américain est ainsi accusé d’avoir ni plus ni moins diffusé «de la désinformation» sur la guerre entre Israël et le Hamas, «sans donner d'exemple précis» commente Axios.
Si d’entrée les «récentes atrocités commises par le Hamas le 7 octobre» seraient mentionnées, relate Axios, les signataires de ce mémo s’insurgent à l’encontre de la réponse militaire de l’Etat hébreu et du soutien que Washington lui a apporté. À leurs yeux, les actions entreprises par l’Etat hébreu dans sa riposte contre le Hamas, telles que couper l’électricité et l’eau à la bande de Gaza, limiter l’acheminement de l’aide ou encore pousser des centaines de milliers de Palestiniens à fuir vers le sud, «constituent toutes des crimes de guerre et/ou des crimes contre l’humanité au regard du droit international». Cette centaine de signataires exhorte leurs hauts responsables à réévaluer leur position à l’égard d’Israël.
Le memo serait par ailleurs «rédigé par un jeune diplomate qui a énoncé sur les réseaux sociaux que le soutien de Biden à Israël l'avait rendu "complice du génocide" à Gaza», toujours selon la même source.
Biden n’a «aucune confiance» dans les chiffres du Hamas
«Nous avons doublé notre aide militaire inébranlable au (gouvernement israélien) sans lignes rouges claires ou réalisables», indique le mémo, toujours cité par Axios, dans lequel Joe Biden est également critiqué pour «remettre en question le nombre de morts» à Gaza.
Le 25 octobre, interrogé sur le nombre de morts à Gaza, Joe Biden avait déclaré n’avoir «aucune confiance» dans les chiffres fournis par le ministère de la Santé du Hamas, tout en se disant «sûr que des innocents avaient été tués». «Dans le passé, les cinq, six cycles de conflit dans la bande de Gaza, ces chiffres étaient considérés comme crédibles. Personne n’a jamais vraiment contesté ces chiffres», avait déclaré, deux jours plus tard, le patron de l'Agence de l'ONU pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA), Philippe Lazzarini. Le Hamas avait, quant à lui, répondu aux critiques du président américain en publiant une liste sur laquelle figurait alors 6 747 noms.
Depuis, le bilan n’a cessé de s’alourdir. Selon les chiffres du ministère de la Santé du Hamas, plus de 11 180 personnes, essentiellement des civils, et incluant 4 609 enfants et 3 100 femmes, ont été tuées dans les bombardements israéliens sur la bande de Gaza depuis le début du conflit.
Une «mutinerie qui couve» au sein de la diplomatie américaine
Plusieurs notes de dissidence circuleraient au sein du Département d’Etat, en quête de signatures, relatait Politico le 6 novembre, révélant l’une d’elles qui appelle Washington à «critiquer publiquement les violations par Israël des normes internationales». Un ton qui ne serait pas celui de la note mise à nue aujourd’hui, assure Axios qui précise que ce type de documents a cours au sein du Département d’Etat depuis la guerre du Vietnam.
«Il y a en gros une mutinerie qui couve au sein de l'État à tous les niveaux», avait déclaré mi-octobre un responsable du Département au HuffPost, où il était notamment question de la rédaction en interne de plusieurs de ces fameux mémos. Le site américain relatait que des responsables du Département d'État lui avaient confié que le chef de la diplomatie des Etats-Unis «Antony Blinken et ses plus hauts conseillers négligeaient la frustration interne généralisée».
Depuis le début de la riposte israélienne, plusieurs projets de résolutions déposés au Conseil de sécurité des Nations unies et appelant à un cessez-le-feu ont été retoqués par Washington qui préfère appeler à «une pause» humanitaire.
Face à ce blocage de son organe suprême, le 27 octobre, l’ONU avait adopté en Assemblée générale une résolution – non contraignante – présenté par la Jordanie et appelant notamment à une «trêve humanitaire immédiate, durable et soutenue», à ce que toutes les parties respectent le droit international et à une aide continue et sans entrave dans la bande de Gaza. Projet auquel les Etats-Unis s’opposèrent. Le jour-même, le porte-parole du Conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche, John Kirby, avait déclaré : «nous ne traçons pas de lignes rouges pour Israël».
L'armée américaine a aussi dépêché dans la région deux porte-avions. Craignant une escalade régionale, Washington semble aussi y contribuer.