«Ça peut rendre tout le monde très heureux» : le Planning familial accusé de promouvoir le polyamour
Une campagne de l'association explique qu'il «est possible de changer souvent d’amoureux.ses, ou d’avoir plusieurs amoureux.ses en même temps». Sa vice-présidente dit vouloir «déconstruire certaines normes, comme celle de la famille traditionnelle».
Une publication le 23 mars sur Facebook du Mouvement français pour le planning familial (dit Planning familial) a provoqué une polémique, l'association d'éducation à la sexualité étant accusée de faire la promotion du polyamour, le fait d'avoir plusieurs partenaires sentimentaux.
«Qu’on soit enfant ou adulte, il est possible de changer souvent d’amoureux.ses, ou d’avoir plusieurs amoureux.ses en même temps», a notamment expliqué en écriture inclusive l'organisme, en commentaire d'un visuel où il est marqué : «Savoir que j'ai le droit de jouer dans la cour de récré c'est bien. Savoir que j'ai le droit d'avoir plusieurs amoureux.euses aussi.»
«Si toutes les personnes sont au courant et qu’elles sont d’accord, ça peut rendre tout le monde très heureux ! Plus de personnes, plus d’amour, c’est aussi plus de bonheur, de câlins…», développe le texte. L'image adjointe fait partie d'une campagne d'éducation «à la vie affective et sexuelle» lancée le 1er septembre 2020. Dans sa communication au sujet du polyamour, le Planning familial prend néanmoins soin de préciser que «tout le monde n’a pas forcément envie d’avoir une relation amoureuse avec plusieurs personnes, c’est un modèle qui ne convient pas à tout le monde». «Mais l’important, c’est de savoir que ça existe et qu’on peut avoir le choix», conclut-il.
«Imaginer que je peux aimer plusieurs personnes, c’est être libre de mes choix»
Cette publication a notamment fait réagir le député LREM François Jolivet. «Laissez donc les enfants se construire en liberté, plutôt que de les instrumentaliser à des fins idéologiques», a-t-il écrit le 29 mars sur Twitter. «C'est de l'idéologie à 100%. Et je regrette que le planning familial s'éloigne de sa mission, qui est utile. Il semble inféodé lui aussi à l'esprit de déconstruction à la mode», a-t-il par la suite développé auprès du Figaro.
Laissez donc les enfants se construire en liberté, plutôt que de les instrumentaliser à des fins idéologiques @leplanning. #Evergreen#CancelCulture#Wokepic.twitter.com/qw3ptkEaYK
— François Jolivet (@FJolivet36) March 29, 2021
Un autre visuel diffusé par le Planning familial au sujet du polyamour a créé la controverse : «Mettre en scène la pièce de Roméo et Juliette, c’est sympa. Mais imaginer que je peux aimer plusieurs personnes, c’est être libre de mes choix», est-il indiqué. Auprès de La Croix, la vice-présidente de l'association Sarah Durocher a justifié cette communication par une volonté de lutter contre «une forme de violence faite aux femmes», expliquant souhaiter «déconstruire certaines normes, comme celle de la famille traditionnelle». Elle souligne toutefois que le message «était peut-être mal dit».
Plusieurs polémiques depuis 2018
Dans Le Figaro, l'association répond également que cette «campagne s'adresse aux enfants, et non aux adultes : ce n'est pas la sexualité génitale qui est visée, mais ce qui se passe comme découvertes entre les enfants». Le quotidien de droite donne également la parole à l'historienne du genre Marie-Jo Bonnet, selon qui «encourager la polygamie chez les jeunes, ça n'a plus rien à voir avec le Planning familial que j'ai connu dans mon enfance !».
«Cela fait longtemps que cette association est passée aux mains de militants qui ne défendent plus les droits des femmes. Ils s'imaginent progressistes, mais il y a en réalité une perte totale des valeurs», poursuit la militante féministe. Des propos en écho aux différentes polémiques déclenchées par le Planning familial depuis 2018 pour des prises de position dites «intersectionnelles».
Un article de Marianne de septembre 2018 pointait notamment l'antenne marseillaise de l'association : à l'époque, une campagne de communication de la branche locale défendait le port du voile musulman, et le Planning familial 13 refusait de condamner explicitement la pratique de l'excision sur les femmes, prétextant «le libre choix de chacun-e.» Un an plus tard, en septembre 2019, Charlie Hebdo rapportait le projet de retrait de la notion de laïcité de la charte de l'association lors d'un congrès à Niort, avancée par l'une des trois motions soumises au vote des adhérents. «Le racisme et l’islamophobie s’expriment parfois sous couvert de laïcité», justifiait la synthèse de cette motion.
Marlène Schiappa, alors secrétaire d’Etat chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes, avait demandé des «éclaircissements sur le sujet», avertissant la présidente de l'association des conséquences d'un tel vote sur la subvention annuelle de 272 000 euros versée par le gouvernement. La motion n'avait finalement pas été votée, les adhérents du Planning familial choisissant plutôt une orientation de «féminisme universaliste s’articulant dans le cadre d’analyse de l’intersectionnalité», représentée par la motion de «compromis», qui avait recueilli 64 voix. La motion intersectionnelle, qui demandait la suppression de la notion de laïcité, était arrivé en deuxième position, avec 54 votes. La motion dite «universaliste», défendant la laïcité, n’avait réuni que 10 voix.