Mis en cause dans le dossier du financement libyen, Eric Woerth reste «légitime», selon LREM
L'ancien ministre de François Fillon est de nouveau dans le collimateur de la justice dans le dossier du financement de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy mais ses prérogatives à l'Assemblée ne devraient pas en souffrir.
En matière de mise en examen, les règles concernant les responsables politiques restent floues. Un ministre comme Richard Ferrand avait dû renoncer à son poste, mais il ne semble pas en aller de même pour les députés – question de visibilité et d'impact dans l'opinion publique. Mis en cause par la justice, le député républicain (LR) Eric Woerth s'activerait en coulisse, d'après Le Monde, pour faire valoir la présomption d'innocence, malgré sa mise en examen le 29 mai.
Aujourd'hui député de l'Oise et président de la prestigieuse commission des Finances de l'Assemblée nationale, Eric Woerth peut compter sur la solidarité de ses confrères de La République en marche (LREM), membre de cette même commission. Ce 30 mai, le groupe LREM, par la voix de Gilles Le Gendre, a jugé Eric Woerth «légitime» à la tête de la commission des Finances de l'Assemblée, malgré sa mise en examen dans l'enquête sur des soupçons de financement libyen de la campagne de Nicolas Sarkozy en 2007.
En ouverture de la réunion de la commission, Eric Woerth avait toutefois préparé le terrain, avec un «petit mot [sur son] actualité personnelle». «Je ne ferai pas part de mes sentiments personnels [mais] vous pouvez peut-être les imaginer», a-t-il ajouté avec humilité. «Je n'ai évidemment pas l'intention que tout cela puisse nuire à notre commission [...] Je suis prêt à parler avec quiconque le souhaite, en groupe ou seul, je suis prêt à rentrer dans le fond des faits qui me sont reprochés, dans le fond total, je suis très à l'aise avec tout cela», a-t-il poursuivi.
Nous considérons que vous êtes absolument légitime à la tête de cette commission
Conquis, Gilles Le Gendre a alors pris la parole, en sa qualité de vice-président du groupe LREM pour faire part de sa compréhension. «Nous considérons que cette affaire n'a pas à impliquer qui que ce soit, n'a pas à justifier la moindre opposition et encore moins la moindre récupération du groupe majoritaire», a-t-il jugé. Et d'ajouter, déclenchant les applaudissements des autres députés, d'après l'AFP : «Nous considérons que vous êtes absolument légitime à la tête de cette commission.»
«On ne peut pas vivre dans une société où soupçon vaut mise en examen, et mise en examen vaut culpabilité», a ajouté dans la foulée Patrick Mignola, vice-président du groupe MoDem, faisant écho aux déboires de François Bayrou et de Marielle de Sarnez en juin 2017.
«Moralisation de la vie politique»
Le maintien d'Eric Woerth à la présidence de la commission des Finances ne fait toutefois pas tout à fait l'unanimité dans les rangs de LREM. «Ca pose surtout un problème symbolique [...] Les Français sont en attente justement d’avoir des politiques exemplaires, et il faudrait vraiment que cette moralisation de la vie politique se concrétise rapidement pour qu’on regagne la confiance de l’ensemble des Français», a ainsi objecté la députée LREM Catherine Fabre sur LCP.
C'est comme trésorier de la campagne présidentielle victorieuse de 2007 qu'Eric Woerth est à nouveau inquiété par la justice, alors que Nicolas Sarkozy lui-même a été mis en examen fin mars 2018 sur fond de soupçons de financements occultes par la Libye.
Selon l'avocat d'Eric Woerth, cité par l'AFP, les enquêteurs soupçonnent le versement d'environ 11 000 euros en liquide aux collaborateurs de la campagne. Son trésorier adjoint Vincent Talvas et lui ont riposté en avançant que ces fonds provenaient, selon eux, de dons anonymes par courrier.
A.K.
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