L’interdiction du glyphosate ne sera pas inscrite dans la loi, la classe politique s'indigne
C’est un déferlement de colère : à droite comme à gauche, les politiques voient rouge à la suite du rejet des amendements visant à inscrire la sortie du glyphosate dans la loi d’ici trois ans, alors qu'Emmanuel Macron l'avait promis.
C'est l'étonnement général : l’Assemblée nationale a rejeté les amendements prévoyant une date de sortie du glyphosate en 2021, malgré l'engagement qu'avait pris le président Emmanuel Macron, en novembre 2017 et pendant sa campagne. Aucune date ne sera déterminée pour l'interdiction de ce pesticide en France, produit par l'industriel américain Monsanto, alors même qu'il est classé substance cancérogène probable par l’Organisation mondiale de la santé (OMS).
Ce recul du législatif a provoqué la colère d’une grande partie de la classe politique, de Jean-Luc Mélenchon à Nicolas Dupont-Aignan, en passant par Benoît Hamon, qui a largement dénoncé le poids des lobbies industriels.
Les députés ont abordé le sujet du glyphosate dans la nuit du 28 au 29 mai, alors que l'examen du projet de loi sur l’Agriculture et l’alimentation commençait le 28 mai. Politiques et citoyens ont découvert à cet égard qu’une promesse présidentielle sur un sujet phare n’avait pas vocation à être gravée dans le marbre des textes.
Face au tollé sur les réseaux sociaux, Benjamin Griveaux, le porte-parole du gouvernement, a assuré le 29 mai au micro de Franceinfo que l'interdiction se ferait bel et bien, tentant un raisonnement acrobatique pour légitimer le fait que la sortie du glyphosate, maintes fois abordé par Emmanuel Macron et Nicolas Hulot, le ministre de la Transition écologique et solidaire, ne figure pas dans la loi.
L’engagement du président @EmmanuelMacron à sortir du glyphosate dans 3 ans est clair. Il n’est pas toujours utile de tout inscrire dans la loi. Nous devons travailler en confiance avec les acteurs de la filière pour trouver ensemble les solutions.#8h30politique
— Benjamin Griveaux (@BGriveaux) 29 mai 2018
Benjamin Griveaux a assuré que la sortie de ce pesticide se ferait «en partenariat avec les industriels» et non «avec les agriculteurs», une formulation qui en dit long selon Eric Coquerel, député la France insoumise (LFI), qui met en cause le poids des lobbies du secteur agro-industriel dans le rejet de l'amendement.
Voilà, tout est là : @BGriveaux aurait pu dire « en partenariat avec les agriculteurs » mais non, l essentiel c’est que les profits des industriels qui fabriquent ce poison cancérigène n’aient pas à souffrir de son arrêt. Le reste n’est que de l’enfumage. #Glyphosate@franceinfohttps://t.co/9rLMfGluMz
— Eric Coquerel (@ericcoquerel) 29 mai 2018
Le 29 mai, un grand nombre de députés LFI avaient voté pour l'amendement relatif à la sortie prochaine du glyphosate. Comme Jean-Luc Mélenchon, qui a demandé : «Qui paiera pour nos cancers ?»
#Macron recule sur l’interdiction du #glyphosate. «Make our planet great again» n'est qu'un coup de com.
— Jean-Luc Mélenchon (@JLMelenchon) 23 mai 2018
La @FranceInsoumise avait proposé par amendement l'interdiction. Refusé par LREM. Qui paiera pour nos cancers ?
François Ruffin, autre député LFI, a blâmé ce recul, ainsi que le rejet des lois en faveur du bien-être animal.
Sur le bien-être animal comme sur le #glyphosate, la loi #agri est une loi a minima : on ne met pas grand chose à l'intérieur. Des mois d'Etats Généraux, avec un niveau d'engagement énorme, pour accoucher d'une souris. #E1Matin
— François Ruffin (@Francois_Ruffin) 29 mai 2018
Le Parti socialiste (PS) a aussi dénoncé le poids des lobbies, tout comme Benoît Hamon, fondateur du mouvement Génération.s.
Le gouvernement et sa majorité repoussent un amendement visant l’interdiction du #Glyphosate dans les 3 ans. C’est un abandon d’un engagement d’E.Macron et une victoire des lobbies industriels contre notre santé. https://t.co/EZcVIjbL5w
— Parti socialiste (@partisocialiste) 29 mai 2018
Mais qui gouverne vraiment? Le gouvernement abandonne l'engagement d'@EmmanuelMacron sur l'interdiction sur le #glyphosate d'ici 3 ans. La santé pèse peu de choses face aux lobbies agricoles et chimiques. pic.twitter.com/47OhDWbW6C
— Benoît Hamon (@benoithamon) 29 mai 2018
Yannick Jadot, député européen, a sévèrement jugé Stéphane Travert, le ministre de l'Agriculture : «Il est le lobby», a-t-il déclaré sur France Inter.
Yannick Jadot au sujet de Stéphane Travert : "il est le lobby" #glyphosate#le79interpic.twitter.com/ZpKfq9DX8E
— France Inter (@franceinter) 29 mai 2018
A droite également, de nombreuses voix se sont faites entendre, comme celle de Florian Philippot, fondateur du parti Les Patriotes, qui dénonce la responsabilité de la Commission européenne. En effet, en avril 2018, Cecilia Malmström, la commissaire européenne au Commerce, avait déclaré au sujet de l’interdiction par la France du glyphosate en dépit de l'autorisation imposée pour cinq ans par l'Union européenne : «C'est pas possible.»
Recul (prévisible et annoncé) sur le #glyphosate : mon communiqué de presse ▶️ pic.twitter.com/sT38Rstlqg
— Florian Philippot (@f_philippot) 29 mai 2018
Nicolas Dupont-Aignan a fait quant à lui un plaidoyer en faveur de l'écologie.
Refus d'inscrire l'interdiction du #glyphosate dans la loi : @enmarchefr recule, les lobbies avancent. Les promesses présidentielles n'engagent que ceux qui y croient ! Redonnons la primeur à l'#écologie et accompagnons nos #agriculteurs dans cette phase de transition nécessaire. pic.twitter.com/WnVcOaLepz
— N. Dupont-Aignan (@dupontaignan) 29 mai 2018
L'amendement pour l'interdiction du glyphosate d'ici 2021 était proposé par Matthieu Orphelin, député La République en Marche (LREM) du Maine-et-Loire, proche du ministre de la transition écologique et solidaire, Nicolas Hulot. Son amendement n'a pas été retenu, même au sein de sa propre majorité par 63 votes contre, seuls 20 députés ayant voté pour. Pourtant, il comportait des dérogations pour ne pas nuire à certains secteurs agricoles. Matthieu Orphelin s'est plaint du peu de cas accordé à l'examen de cet amendement, examiné à 1h40 du matin.
On discute donc de la question du #glyphosate à 1h40 du matin. Tout est normal. #EGAlimpic.twitter.com/RGHNkAO42D
— Matthieu ORPHELIN (@M_Orphelin) 28 mai 2018