Le score du parti d'Emmanuel Macron est loin d'être «glorieux» mais lui permettra néanmoins de gouverner sans passer par des ordonnances au sein du Parlement, estime le professeur des universités Claude Rochet.
RT France : Peut-on considérer le score du parti d’Emmanuel Macron comme un succès compte tenu de l’abstention record (51%) lors de cette élection ?
Claude Rochet (C. R.) : C’est un faux succès. C’est un vote contre les partis traditionnels qui disparaissent, et surtout le Parti socialiste qui disparaît complètement. Emmanuel Macron n’a pas du tout transformé l'espèce de vague d’adhésion dont il a bénéficié au deuxième tour de l'élection présidentielle et qui était en réalité une vague de rejet. Cela ne va pas jeter les bases d'un régime stable. Parce que si on prend son pourcentage de 32 et quelques pourcents, multiplié par 48% de votants, cela fait dans les 16% d’électeurs : ce n’est pas du tout glorieux.
Il n’y aura plus besoin de passer par les ordonnances
RT France : La République en marche disposera d’une majorité absolue au Parlement, sans opposition réelle. Cela implique-t-il que l’Assemblée nationale ne fera qu'enregistrer toutes les initiatives du président ?
C. R. : Oui, il n’y aura plus besoin de passer par les ordonnances. C’est un régime unique, un régime sans opposition : le Parti socialiste est d’accord sur le fond avec la politique de Macron, Les Républicains ont très peu de différences. C’est la France Insoumise qui va faire du bruit, le Front national aura de quatre ou cinq députés mais ce ne sera pas une réelle opposition. On se dirige vers un régime de type autoritaire.
Nombre de scandales vont éclater
RT France : Pensez-vous qu'il sera difficile pour les députés de LREM de s’entendre, le parti réunissant des gens aux convictions variées ?
C. R. : Non, parce qu’il n’y a aucune différence entre la droite et la gauche. Si le système a créé Macron, c’est pour acter qu’il n’y avait plus de différence entre la droite et la gauche et qu’on n’avait plus besoin de cette alternance entre le PS et Les Républicains, des partis discrédités. Ils ont donc rajeuni le système et y sont très bien parvenus, l’opération a été très bien menée. Ils sont d’accord sur l’essentiel – l’intégration européenne et le programme de l’Union européenne. Il va y avoir des dissensions, mais liées à l’incompétence de ces gens qui commencent déjà à raconter n’importe quoi : on voit dans certaines interviews qu’ils ne connaissent pas leur sujet, ils ne savent pas parler et, en plus, l'entourage d'Emmanuel Macron n’a pas eu le temps de vérifier l’intégrité de ces gens. Nombre de scandales vont donc éclater, mais ils ne seront pas liés à des dissensions politiques. Il y a des stratégies personnelles, c’est propre à tout parti. Mais je ne pense pas qu’il y ait des divergences internes.
On en vient à une démocratie oligarchique
RT France : Quelle est la conclusion la plus importante à tirer de cette élection ?
C. R. : Que c’est là le pouvoir absolu de la presse, des grandes entreprises, des banques. On en vient à une démocratie oligarchique : l’oligarchie a investi tous les pouvoirs, il n’y a plus d’opposition. Toute la presse écrite est aux mains du système, l’opposition c’est internet et quelques journaux, dont Causeur. Cela a été bien préparé, on n’a pas vu venir le coup, on pensait que Macron n'était qu'un enfant... mais pas du tout. On verra ce que cela va donner, et qui tire les ficelles en coulisse.
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