L'attentat de Saint-Pétersbourg, un «défi direct à Poutine» et à la guerre contre le terrorisme

Attaquer la ville de naissance du président russe tandis qu'il s'y trouvait est tout un symbole pour le journaliste Frédéric Pons. Pour lui, la Russie est aujourd'hui visée pour sa lutte contre le terrorisme djihadiste en Syrie comme dans le Caucase.

RT France : Après l'explosion dans le métro de Saint-Pétersbourg qui a fait au moins dix morts, les autorités russes ont ouvert une enquête pour «acte de terrorisme». Les médias évoquent plusieurs pistes de Daesh aux nationalistes des pays limitrophes de la Russie. Laquelle vous semble la plus plausible ?

Frédéric Pons (F. P.) : La piste la plus plausible – en attendant de savoir exactement ce qui s'est passé – est celle des gens qui ont menacé à plusieurs reprises la Russie de frappes terroristes. C'est-à-dire toute la mouvance du totalitarisme islamiste qui est à l'œuvre non seulement en Syrie, mais également dans tout le Caucase. Cet attentat à Saint-Pétersbourg est un symbole contre Vladimir Poutine car c'est sa ville de naissance et la deuxième du pays. Cela a d'autant plus une portée symbolique qu'il y était présent avec un autre chef d'Etat. Ce défi direct à Vladimir Poutine est un peu une réponse aux activités de la Russie contre le terrorisme djihadiste dans le Caucase et en Syrie. Cela confirme que la Russie est la cible du djihadisme islamiste et qu'elle est en première ligne de cette guerre menée avec efficacité.

Tous les pays qui sont au premier rang de la guerre contre le terrorisme islamiste sont potentiellement des cibles

RT France : La Russie n'avait pas connu d'attentat depuis 2013. Pourquoi aujourd'hui, selon vous ? 

F. P. : Ce qu'on observe, c'est que depuis presque une vingtaine d'années maintenant, le territoire russe a été victime d'attentats terroristes majeurs à intervalles réguliers : en 1999, en 2002, en 2004... Si on compte, les attentats terroristes sur le territoire russe ont fait environ un millier de morts. Pourquoi aujourd'hui ? Peut-être les terroristes ont-ils bénéficié d'un relâchement des services de sécurité, mais il y a aussi eu l'opportunité de frapper au bon moment. On savait que plus Daesh et plus les islamistes allaient être en difficulté en Syrie et en Irak, plus ils allaient vouloir répliquer par des attentats terroristes contre tous ceux qui leur font la guerre là-bas. C’est aujourd'hui la Russie mais c'est la France, la Grande-Bretagne, les Etats-Unis : tous les pays qui sont au premier rang de la guerre contre le terrorisme islamiste sont potentiellement des cibles. Pourquoi aujourd'hui ? Peut-être aussi parce que Vladimir Poutine était à Saint-Pétersbourg et que, symboliquement, les terroristes ont voulu avoir une caisse de résonance encore plus forte pour essayer d'humilier Vladimir Poutine et de mettre en cause la sécurité de la Russie.

Il faut cesser d'ostraciser la Russie sur ces questions sécuritaires.

RT France : Mathias Fekl, le ministre français de l'Intérieur, a d'ores et déjà annoncé un renforcement de la sécurité dans les transports publics français. De nombreuses personnalités politiques du monde entier ont apporté leur soutien aux victimes. Peut-on s'attendre à une meilleure coopération entre la Russie et l'Occident dans la lutte contre le terrorisme ?

F. P. : Cette coopération existe en réalité déjà de manière discrète. Même quand les hommes politiques s'affrontent ou affichent des désaccords sur de grands sujets de politique internationale, comme l'Ukraine ou la Crimée... On sait que la coopération sécuritaire et entre services de renseignement fonctionne bien. Entre la France et la Russie, sur ce plan-là, il y a constamment eu des échanges et cela va continuer. Ce qu'on peut espérer à la faveur de cette tragédie de Saint-Pétersbourg, c'est qu'enfin les politiques en Europe occidentale ouvrent les yeux. Qu'ils comprennent que pour la sécurité de l'Europe, il faut aussi s'entendre avec la Russie. Il faut pouvoir discuter fermement, franchement mais de façon cordiale avec Vladimir Poutine. Il faut cesser d'ostraciser la Russie sur ces questions sécuritaires.

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