Un regard attentif sur les pays touchés par l'interdiction d'entrée de Donald Trump laisse penser que ce dernier se préparerait à une guerre avec l'Iran. Le journaliste Martin Jay analyse les raisons de la démarche dite «antimusulmane» du président.
Le président Trump a insisté sur le fait que l'interdiction d’entrée aux musulmans – qui vient d'être suspendue – ne concernait pas la religion, et qu’il s’agissait plutôt du contrôle des flux de réfugiés. Un regard attentif sur les pays qu'il a choisi et sa rhétorique ardente laisse croire qu'il se préparerait à une guerre avec l'Iran.
Il semble que quelque chose d’important soit sur le point de se produire au Moyen-Orient. Cela pourrait être lié à la rapidité avec laquelle de Donald Trump a mené des appels téléphoniques avec de vieux alliés parmi les Etats arabes du Golfe, tout en envoyant son ministre de la Défense Jame Mattis faire la navette à travers la région - un manège qui en inquiète certains dans cette partie du monde.
La Maison Blanche a pris une position plus ferme envers l'Iran quand Michael Flynn, conseiller à la Sécurité nationale de Trump, a averti Téhéran que des mesures pourraient être prises après un récent test de missile, et quand de hauts responsables américains ont dit que l'administration «songeait» à une potentielle réponse.
Un nombre croissant d'indicateurs font croire certains experts que la guerre est imminente et que les sanctions sont moins un «test décisif» pour le régime de Téhéran qu’une provocation
La précipitation avec laquelle l'équipe de Trump œuvre dans la région, menant des pourparlers de haut niveau, et cette dernière annonce signifient-ils que les Etats-Unis se préparent à une guerre avec l'Iran ?
Cela peut sembler farfelu, mais la politique de Trump ne cesse de choquer. En outre, un nombre croissant d'indicateurs font croire certains experts que la guerre est imminente et que les sanctions sont moins un «test décisif» pour le régime de Téhéran qu’une provocation.
Les médias américains n’ont néanmoins identifié aucun de ces signaux d’alerte», mais préfèrent rester obsédés par de tristes histoires de réfugiés ou de titulaires cartes vertes incapables d'entrer aux Etats-Unis. Est-ce une tactique sinistre pour ternir Trump à une époque largement dominée par de fausses nouvelles ? Ou est-ce simplement que les médias américains ont détourné leur regard ?
Comment tant d'individus ont pu ne pas voir les indices du raid imminent de Donald Trump contre l'Iran ?
Le plus surprenant est le fait que la soi-disant «interdiction musulmane» n'a touché que sept pays arables, dont la majorité sont des alliés indéfectibles de l’Iran ?
En plus, n'y a-t-il pas eu la sinistre réaction des pays arabes du Golfe, riches en pétrole, qui ont publiquement soutenu ce plan ?
Mais encore plus de choses auraient dû alerter les médias d'une guerre au Moyen-Orient, guerre qui rétablira l’ordre ancien et transformera à nouveau l'Iran en un pays pauvre, ultra-conservateur et arriéré qui, commodément,demeurera l'ennemi de Washington, tout comme celui des deux partenaires américains de la région, l’Arabie saoudite et Israël.
Pour Donald Trump, il s'agit plus d'argent que d'un règlement de comptes ou de géopolitique
Donald Trump étant au pouvoir, Israël se sent plus que jamais enhardi, et sa avide frénésie avide entourant ses colonies en est un indice. Mais, maintenant, il donne à Donald Trump des conseils pour démonter l'Iran, et ce après la nomination en tant que chef de la Défense James Mattis, le «Mad Dog» et en tant que conseiller à la Sécurité nationale Michael Flynn - tous deux connus pour leur envie de faire la guerre à l’Iran.
Pour Donald Trump, il s'agit plus d'argent que d'un règlement des comptes ou de géopolitique. Il a déploré le fait que les Etats-Unis «auraient dû s'emparer du pétrole irakien» comme butin de guerre lorsqu'ils en avaient la possibilité. Il a même twitté à plusieurs reprises qu'il était dégoûté par le fait que les Etats-Unis aient donné à l'Iran 150 milliards de dollars dans le cadre de l'accord iranien.
Lors du mandat de Barack Obama, l'Irak a non seulement fait un marché de dupe avec les Etats-Unis, mais est également tombé dans le camp de l’Iran - financièrement, politiquement et idéologiquement - ce qui, selon certains, a été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase pour Donald Trump et son équipe.
Il est vrai que les présidents américains exercent beaucoup plus de pouvoir en politique étrangère qu'en politique intérieure, mais la vitesse à laquelle les hommes de Donald Trump se déplacent est extraordinaire.
L’essai du missile balistique effectué par l’Iran a été en même temps un catalyseur de l’antagonisme de Donald Trump et une erreur de la part de Téhéran
Cela pourrait-il s'expliquer par le fait que les récentes démarches de l’Iran ont provoqué Donald Trump et renforcé ce qui aurait été, une jour ou l'autre, une position militairiste des Etats-Unis ? De toute évidence, l’essai du missile balistique effectué par l’Iran a été en même temps un catalyseur de l’antagonisme de Donald Trump et une erreur de la part de Téhéran.
Mais il y a plus.
Les jusqu’au boutistes iraniens ont salué la victoire de Donald Trump aux élections étant donné que, avec l'accord iranien, et alors que les sanctions sont levées, et que ses combattants par procuration du Hezbollah quittent le champ de bataille syrien en vainqueurs, l’Iran ressentait sa puissance nouvellement obtenue.
Peut-être le gouvernement moderne et occidentophile de Hassan Rohan a-t-il laissé trop de marge à la vieille garde pour qu'elle puisse montrer ses muscles.
Si des journalistes américains estiment que de nouvelles sanctions sont une sorte d’épreuve pour Donald Trump afin de jouer contre l’Iran, ils ont manqué de remettre les choses en perspective avec ce qu'il s’est passé ces dernières semaines. L’Iran a commencé à utiliser de l’uranium enrichi dans leurs sous-marins de nouvelle génération, ce qui est en soi un double message : nous n’avons pas vraiment d’espoir quant à l'accord nucléaire et nous aussi pouvons mettre à l’épreuve la patience des Etats-Unis.
C'est comme si l’Iran faisait tout son possible pour susciter la colère de James Mattis et même d’Israël
Quelques semaines plus tard, l’Iran a testé un missile, et cela a fait péter un plomb au camp du président américain. Et juste au moment où la stratégie devait être appliquée, l’Iran a fait l’inimaginable, ce qui n’est toujours pas vraiment évoqué par Washington : il planifier désormais d’abandonner le dollar américain en tant que devises de réserve. Par le passé, quand l’Irak et la Libye avaient annoncé de telles intentions, les deux pays ont été durement frappés par l’armée américaine.
C'est comme si l’Iran faisait tout son possible pour susciter la colère de James Mattis et même d’Israël.
Se débarrasser de la devise américaine et opter pour un panier d’autres devises internationales pour les réserves de sa banque centrale c’est un défi presque plus grande que de tirer à l’aveuglette sur un vaisseau de guerre américain dans le golfe Persique.
A ce stade, personne ne peut prédire avec certitude jusqu’où Donald Trump peut aller, en «coupant les ailes» à l’Iran. Mais des experts militaires m’ont dit que les Etats-Unis pourraient opter pour un conflit ouvert avec ses navires militaires, afin de regarder jusqu’où les Iraniens iraient, ayant en tête que le minuscule budget de défense iranien atteint à peine quelques 30 milliards de dollars, par comparaison avec celui des Américains, 20 fois plus grand.
Mais la question n'est pas de savoir qui possède les plus grands et plus puissants canons. Donald Trump mise sur un nombre de facteurs, et surtout sur le fait que la Russie ne s'impliquera pas. Il compte aussi sur le fait que l’Iran n’aura pas le courage de lancer des roquettes depuis Liban sur des villes israéliennes, avec la possibilité d’atteindre Tel Aviv. Ou du moins qu'il n’en ait pas le temps.
Il est peu probable que Donald Trump attende longtemps pour réagir
Ses conseillers, qui ont des liens étroits avec Israël, peuvent envisager la possibilité de porter un premier coup au Hezbollah, au Liban, dont les 20 000 combattants disciplinés deviendraient un problème majeur pour l’Iran, s’ils étaient mis hors service ou s’ils subissaient de grosses pertes. Des - environ - 7 000 blessés en Syrie, 2 000 ont perdu des membres. Et cela a eu un impact sur le moral au sein de ce groupe militant de chiites libanais qui a acquis un pouvoir considérable au Liban au cours des dernières années.
L’Iran veut continuer à se débarrasser de ses réserves américaines en mars. Il est peu probable que Donald Trump attende longtemps pour réagir, d’autant que ses adversaires les plus déterminés doivent à leur grand dam admettre qu’il s’écarte rarement du scénario qu'il a choisi.
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