Pour le président américain Donald Trump la cohérence de l'Europe est largement entamée, il faudrait donc se demander si l'UE existe encore en tant qu'une institution cohérente, juge le chercheur Bruno Drweski.
RT France : Donald Trump et Vladimir Poutine ont eu un premier entretien téléphonique lors duquel ils ont discuté de relations commerciales mutuellement avantageuses tout en évitant le sujet des sanctions. Comment établir de telles relations commerciales malgré le maintien des sanctions ?
Bruno Drweski (B. D.) : Je pense que cette réponse a été un peu diplomatique. Evidemment, comment pourrait-on évelopper les relations économiques et commerciales, s’il y a des sanctions ? Je pense que, sans répondre à la question, ils ont répondu. Pour des raisons diplomatiques et internes aux Etats-Unis, Trump n’a pas voulu attaquer de front ses ennemis aux Etats-Unis sur la question, tout en laissant la porte ouverte. Compte tenu du nombre des sujets qu’ils ont abordés, on peut penser quand-même que, pour le moment, il y a plutôt une stratégie de rapprochement, dans lequel la possibilité de levée de sanctions apparaîtra, et sera négociée en temps voulu. C’était un premier contact – à mon avis, on ne pouvait pas de la part de Trump aller trop loin.
L’élection de Trump en soi démontre qu’une partie importante de la société et, sans doute, des élites américaines, a pris conscience que la politique appliquée depuis Bush c’est un échec
RT France : Il y a plusieurs analystes qui parlent d'un reset (redémarrage) des relations entre les deux pays. Il y en a déjà eu plusieurs auparavant, sous Bush, par exemple. Cela pourrait-il être différent cette fois-ci ?
B. D. : Nous ne savons pas encore quels sont les rapports de forces dans la nouvelle administration américaine, qui plus est, quelle est la force des néoconservateurs aux Etats-Unis, qui restent quand-même très influents. Ils sont toujours très présentes au niveau du Congrès et dans beaucoup d’autres institutions. Evidemment, dans ce contexte-là, les choses vont avancer lentement, mais l’élection de Trump en soi démontre qu’une partie importante de la société et, sans doute, des élites américaines, a pris conscience que la politique appliquée depuis Bush c’est un échec, et qu’il va donc falloir la revoir – dans quelle mesure ? Les mois qui viennent vont répondre.
Quand Donald Trump parle de l’Europe, il parle très souvent de l’Allemagne
RT France : En ce qui concerne les relations avec l’Europe, quelles conséquences ce possible rapprochement entre les Etats-Unis et la Russie pourrait avoir sur l’UE ?
B. D. : D’abord, il faudrait savoir si l’UE existe encore en tant qu’organe cohérent. C’est la première question, parce qu'entre l’Allemagne, la France, les pays d’Europe centrale, les négociations sur le Brexit, l’Italie et j’en passe, la cohérence de l’Europe aujourd’hui est largement entamée. Donald Trump le laisse d’ailleurs entendre : quand il parle de l’Europe, il parle très souvent de l’Allemagne. Evidemment, si par «Europe» on entend «l’Allemagne et ceux qui la suivent», c’est quelque chose de beaucoup plus clair, c’est-à-dire que c’est une partie de l’UE. Je pense que les contradictions vont apparaître, parce que l’Allemagne est quand même une puissance industrielle. Comme, au moins théoriquement, nous sommes aux Etats-Unis en phase de réindustrialisation, c’est un des objectifs de Donald Trump, on paiera forcément la concurrence entre deux puissances industrielles.
La France [...] a déjà une politique étrangère tout à fait bas de gamme depuis les deux derniers présidents
RT France : François Hollande a vivement critiqué Donald Trump à l’égard de ses dernières décisions, quelle serait la réaction ?
B. D. : De toute façon, François Hollande est un président finissant en position d’échec. Je pense que les déclarations de François Hollande sont très peu importantes. Ce qui va se préparer en France dans les mois qui viennent, le paysage est encore très flou, on ne sait pas du tout quelle sera l’équipe gouvernementale qu’on aura au milieu de l’année 2017, d’ici quelques mois. C’est à partir de ce moment-là qu’on pourra y voir plus clair. Pour le moment, la France qui a déjà une politique étrangère tout à fait bas de gamme depuis les deux derniers présidents, a atteint un point où l’on ne peut pas prendre Paris au sérieux aujourd’hui. Il faut simplement attendre de voir si Paris va redevenir un centre politique relativement important. C’est un membre malade de cette Union européenne, elle-même malade.
Lire aussi : May chez Trump : une obsession, une noyade et une ceinture de sauvetage
Les opinions, assertions et points de vue exprimés dans cette section sont le fait de leur auteur et ne peuvent en aucun cas être imputés à RT.