Israël a souvent bombardé les installations militaires syriennes, mais jamais Al-Qaïda - il ne considère pas ces derniers comme une menace et les soutient contre le Hezbollah, explique la journaliste indépendante Rania Khalek.
L’armée syrienne a accusé Israël de bombarder l’aéroport militaire de Mazzeh à l’ouest de Damas et a averti Israël qu'il y aurait des représailles pour cette «attaque flagrante». La frappe aurait endommagé l'une des installations militaires clés. La Syrie a vu un lien entre la prétendue frappe et «l’appui des groupes terroristes» par l'Israël.
RT : Quelle a été votre réaction au fait qu'Israël ait bombardé un aéroport militaire syrien ?
Israël a une sorte d’alliance tacite avec la branche d'Al-Qaïda en Syrie
Rania Khalek (R. K.): J’ai été surprise par cette information, mais, en même temps, nous savons que tout au long de la guerre civile en Syrie, Israël a à plusieurs reprises bombardé des installations militaires syriennes et pas une seule fois les groupes d'Al-Qaïda qui sont en Syrie... En fait, certaines personnes au sein du gouvernement syrien évoquent souvent Israël en tant que «force aérienne d'Al-Qaïda». Ce n'est pas non plus surprenant, parce qu'Israël a une sorte d’alliance tacite avec la branche d'Al-Qaïda en Syrie, surtout sur la frontière avec le plateau du Golan où ils leur ont offert de l'aide - et ils l'ont reconnu - assurant les soins médicaux à ceux qui luttaient aux côtés du Front al-Nosra, branche d'Al-Qaïda en Syrie, et les renvoyant ensuite sur le champ de bataille...
L'institut d'études de sécurité [nationale], important groupe de réflexion israélien, a publié récemment pour le gouvernement israélien un document stratégique de 300 pages préparé par des personnalité militaires et politiques israéliennes de premier ordre. Il avait une section sur la Syrie. Il a au fond été déclaré que, selon la position d'Israël, le mieux était de faire partir le gouvernement syrien maintenant, créant à sa place une sorte d'Etat sectaire sunnite. Je suppose, qu'il s'agissait là d'un pays à l'image de ce qu'on peut appeler l'Arabie saoudite ou n'importe quel autre Etat qui soutient les rebelles. La raison est qu'Israël considère le Hezbollah comme une des menaces les plus importantes dans la région... et préfère en effet soutenir Al-Qaïda contre le Hezbollah, parce que c'est le Hezbollah et pas Al-Qaïda, qui constitue la plus grande menace pour Israël.
C’est la même politique-ils n'ont fait qu'un relooking
RT : Vous avez participé à un événement du Conseil atlantique intitulé «Combattre Al-Qaïda en Syrie : une stratégie pour le prochain président». Parmi les participants se trouvaient des partisans de l'armement des soi-disant rebelles modérées en Syrie, y compris Charles Lister, membre principal de l’Institut du Moyen-Orient. Qu’avez-vous appris sur l’état actuel du conflit ?
R. K. : C’était vraiment intéressant, parce que ce sont des gens qui viennent des think tanks qui, pendant les cinq dernières années, ont fait pression pour une escalade militaire de la part de l'Occident. Maintenant nous allons avoir une nouvelle administration, celle de Donald Trump, qui a annoncé vouloir une désescalade de la situation en Syrie et n'a pas envie de renverser le gouvernement. Du coup, ce que j'ai vu lors de cette table ronde, c'était des think tanks de l'establishment qui réemballaient leurs opinions sur la Syrie de manière à ce que Donald Trump les apprécie. Au lieu de parler de «problème humanitaire», ils se sont focalisés sur la lutte contre Al-Qaïda en Syrie. Ce qui est intéressant est que, pendant les cinq dernières années, ces gens-là ont soutenu des politiques qui ont en effet donné de la puissance à Al-Qaïda en Syrie. Maintenant ils annoncent vouloir combattre Al-Qaïda en Syrie en faisant exactement ce qu'ils préconisaient... ce qui veut dire armer les groupes sunnites. Ils les appellent «opposition modérée», mais aucun des participants n'a donné les détails ou les caractéristiques d'un seul groupe de l'opposition modérée – ils n’en ont nommé aucun. Ils ont également parlé de la nécessité de se débarrasser du gouvernement syrien si possible, d'avoir une sorte de zone d’exclusion aérienne. Ainsi, c’est la même politique - ils n'ont fait qu'un relooking. La dernière chose que je veux ajouter est que ces participants voulaient non seulement continuer à armer les groupes rebelles mais ils ont évoqué en particulier l’Iran. Ils ont fait une campagne de terreur au sujet de l'Iran et du Hezbollah... C'est une autre chose importante pour Donald Trump - il est très anti-Iran, ils essayaient donc de jouer cette carte. Je ne sais pas si cela fonctionnera, mais... nous verrons ce qui va se passer. Espérons qu'ils ne parviendront pas à leurs fins.
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