Radio Free Europe, déjà connue pour l'intensité de sa propagande, atteint le comble de la russophobie. La rhétorique indigne de certains de ses animateurs est proche de celle des nazis des années 1940, estime l'analyste Bryan MacDonald.
«Ici l'Allemagne, ici l'Allemagne, ici l'Allemagne.» Ces mots ne voulaient dire qu'une chose à l'époque de la Seconde Guerre mondiale - qu'à la radio se trouvait William Joyce et qu'il répendait sa bile anti-britannique comme lui seul savait le faire.
Connu sous le nom «Lord Haw Haw», William Joyce, né aux Etats-Unis, essayait d'un ton sarcastique et méprisant de persuader le peuple britannique que la résistance à la machine militaire des nazis ne servirait à rien et que la défaite était inévitable. Basé à Berlin, il se lançait dans une agitprop grossière, évoquant la faiblesse de la Grande-Bretagne et de ses dirigeants et la supériorité du système allemand.
Son but est d'influencer les journalistes et les experts qui couvrent les affaires russes dans les médias occidentaux
De nos jours, à quelques centaines de kilomètres de là, on peut trouver à Prague l'héritier de la couronne d'épines du «Lord Haw Haw». Cet honneur douteux revient à Brian Whitmore, membre du diffuseur d'Etat américain RFE/RL (Radio Free Europe/Radio Liberty), qui, cinq jours de la semaine, est assis devant une image du Kremlin de Moscou au mur et raconte au monde à quel point ce pays est horrible. Le blog vidéo, connu sous le titre «Daily Vertical», fait tellement rire que je le suis de temps en temps, depuis que son animateur a été impliqué dans une prise de bec publique avec Ben Aris, un journaliste important.
Ce n'est que pour voir quand tout cela touchera à sa fin.
Entre temps, je n'ai toujours pas compris à qui était destiné le contenu. Si cela était censé influencer les Russes, ce serait certainement diffusé dans leur langue, car ceux qui parlent couramment anglais ne représentent qu'un tout petit pourcentage de la population du pays. Du coup, la seule explication qui reste est que son but est d'influencer les journalistes et les experts qui couvrent les affaires russes dans les médias occidentaux.
Un nouveau Nadir
Il est facile de se moquer des podcasts comme «Daily Vertical», ou «Power Vertical» qui l'accompagne, mais les ignorer complètement est peut-être naïf. Car le Broadcasting Board of Governors du gouvernement américain ne continuerait certainement pas de financer l'entreprise sans considérer qu'elle produit une sorte d'effet sur le discours.
Pourtant, le «Daily Vertical» a de nouveau touché le fond, et il n'est plus question de rigoler. Dans sa posture de méditation qui est sa marque de fabrique, Brian Whitmore a annoncé, regardant solennellement sur son prompteur : «Aujourd'hui, cela fait huit ans qu'est né la doctrine Poutine. Aujourd'hui, cela fait huit ans que le Kremlin a appris ce qu'il pouvait faire impunément dans les pays voisins. Aujourd'hui, cela fait huit ans que Moscou a prouvé qu'il pouvait bafouer aisément les règles et les normes internationales sans être puni. Aujourd'hui, cela fait huit ans que Moscou a envahi la Géorgie.»
Mikheil Saakachvili continue toujours de recevoir des louanges de l'Occident anglophone grâce à son penchant pro-américain
Sauf qu'il ne l'a pas fait, et les déclarations de Brian Whitmore - c'est de la merde. En réalité, le verdict de la mission indépendante de l'UE chargé d'établir les causes du conflit était simple : «C'est la Géorgie qui a commencé.»
Der Spiegel l'a rapporté à l'époque : «C'est la Géorgie qui a provoqué la guerre en attaquant Tskhinval (capitale de l'Ossétie du Sud)», a indiqué dans un communiqué Heidi Tagliavini, chef de la mission. La personne que l'UE pointait du doigt comme responsable du conflit, Mikheil Saakachvili, président de la Géorgie à l'époque, est maintenant gouverneur de la région d'Odessa, en Ukraine. Aujourd'hui, malgré le fait qu'il ait fait ses preuves en transformant le vin en eau, il continue de recevoir les louanges de l'Occident anglophone grâce à son penchant pro-américain.
Fausse comparaison
Beaucoup de médias essaient de mettre un signe d'égalité entre RT et RFE/RL, en les percevant comme financés par leurs gouvernements respectifs. Or, il existe une différence majeure. RT invite souvent des experts qui ne partagent pas ses positions, alors que RFE/RL ne le fait pas, ce qui est extrêmement significatif. On ne peut tout simplement pas comparer un réseau qui vient de recevoir une nomination pour l'International Emmy Award (comme c'est arrivé à RT cette semaine) à une organisation qui produit ce genre de journalisme bâclé pour lequel RFE/RL est célèbre.
Je me souviens bien que, ces dernières années, RT invitait des personnes extrêmement hostiles à la Russie. Parmi eux Michael Weiss de RFE/RL (qui est aussi lobbyiste auprès du Conseil Atlantique de l'OTAN), l'éditeur du Bild Zeitung Julian Reichelt et le jeune néo-conservateur américain Jamie Kirchick. RFE/RL par contre ne semble pas du tout accepter les dissidents. Le «Power Vertical» de Brian Whitmore en est un exemple. Les invités ne font que hocher la tête et n'ont rien de bien à dire sur la Russie.
Les standards du journalisme à RFE sont si bas, que personne ne la prend au sérieux
La censure à RFE/RL va encore plus loin. Le média a viré en 2014 le fameux journaliste anti-Poutine Andreï Babitsky pour avoir pris «une position incorrecte sur la Crimée» et avoir tenté de rapporter les crimes de guerre commis par les forces pro-Kiev lors de la guerre ukrainienne.
L'absurdité «verticale» de Brian Whitmore est symptomatique du pourrissement de RFE/RL. Cela dit, je laisserai les derniers mots à Ben Aris, car c'est son opposition courageuse à l'incapacité de RFE/RL qui a inspiré cet article. Il a écrit en mai une lettre à Johnson’s Russia List : « RFE n’essaye même pas d’apprendre quoi que ce soit sur la Russie, sur son peuple ou [Vladimir] Poutine, mais préfère répéter la même vieille invective basée sur des rumeurs et des faits fabriqués, et cela est déplorable.»
«[Si Vladimir Poutine avait dit que] la RFE appartenait au gouvernement américain et était utilisé en tant qu'instrument de propagande dénigrant la Russie et que ce média avait des standards de journalisme de charlatans, cela aurait été vrai. Le gouvernement américain dépense presque deux fois plus (c'est même proche de trois fois plus) que la Russie pour ses médias. Mais il ne l'a pas dit. Parce que les standards du journalisme à RFE sont si bas, que personne ne la prend au sérieux.»
Le «Lord Haw Haw» de Prague feraient bien d’écouter les sages propos de Ben Aris.
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