Iran : la justice suspend l'exécution de trois manifestants condamnés à mort en 2019
- Avec AFP
La justice iranienne a suspendu l'exécution de trois jeunes hommes condamnés à mort en novembre 2019. Ils sont reconnus coupable de «collusion en vue d'attenter à la sécurité intérieure» et de «destruction de biens publics».
L'Iran a suspendu l'exécution de trois jeunes condamnés à mort impliqués dans les manifestations de novembre 2019. Un verdict qui avait provoqué une indignation générale, a déclaré à l'AFP l'un des avocats de la défense.
L'Autorité judiciaire avait annoncé, le 21 juillet, la confirmation de la peine de mort les trois prévenus , affirmant que des preuves avaient été trouvées sur leurs téléphones, à savoir que le trio avait incendié des banques, des bus et des bâtiments publics lors de ces manifestations.
«Nous avons transmis une demande de réexamen du verdict à la Cour suprême et elle l'a acceptée. Nous espérons que le verdict sera annulé», a déclaré au téléphone l'avocat Babak Paknia.
Selon lui, les trois accusés sont des amis : Amirhossein Moradi, 26 ans, vendeur de téléphones portables, Saïd Tamdjidi, 28 ans, chauffeur de Snapp (équivalent iranien d'Uber) et Mohammad Radjabi, 26 ans, au chômage.
Les trois ont été condamnés à mort pour «collusion en vue d'attenter à la sécurité intérieure» et «incendier et détruire des biens publics dans l'intention d'affronter le système politique de la République islamique», a déclaré Babak Paknia, qui représente Amirhossein Moradi. Il a ajouté que les trois jeunes avaient également été condamnés à des peines de prison pour d'autres chefs d'accusation : notamment pour vol et pour avoir quitté illégalement le pays.
Un mouvement de contestation avait éclaté le 15 novembre 2019, dès l'annonce d'une forte hausse du prix de l'essence, en pleine crise économique. Cette colère populaire avait alors touché une centaine de villes. Des postes de police avaient été attaqués, des magasins pillés, des banques et des stations-services incendiées… Les autorités avaient en conséquence imposé une coupure d'internet d'une semaine.
Nous exhortons la justice iranienne à annuler immédiatement cette décision et à lancer une enquête indépendante
Après avoir refusé pendant des mois de fournir un bilan des victimes, les autorités iraniennes ont finalement parlé de 230 personnes tuées lors de ces émeutes, évoquant des «mensonges» pour les divers décomptes établis par les médias étrangers et les groupes de défense des droits de l'Homme.
«Un message terrible au monde», réagit Donald Trump
L’organisation Amnesty International, basée à Londres, a estimé à 304 le nombre de morts, tandis qu'un groupe d'experts indépendants travaillant pour l'ONU a avancé un bilan qui pourrait être supérieur à 400 morts (dont 12 enfants). Selon les Etats-Unis, la répression des manifestations de novembre a fait plus de 1 000 morts.
«Nous espérons vraiment que la peine [de mort] sera annulée, étant donné que l'un des juges de la Cour suprême s'est déjà opposé au verdict», a écrit la défense dans un communiqué publié le 19 juillet par l'agence officielle Irna.
Babak Paknia s'est montré optimiste, affirmant que le processus d'un éventuel recours en cassation «pourrait prendre quelques mois». La défense prévoit toutefois d'adresser une demande au chef de l'Autorité judiciaire du pays au cas où leur campagne actuelle échouerait.
Un groupe d'experts des droits de l'ONU avait critiqué le 16 juillet la décision de la justice iranienne, et appelé la République islamique à annuler les condamnations. «Aujourd'hui, nous nous joignons aux centaines de milliers d'Iraniens qui ont condamné sur les réseaux sociaux ces peines capitales. Nous exhortons la justice iranienne à annuler immédiatement cette décision et à lancer une enquête indépendante», avaient déclaré 13 experts indépendants de l'ONU dans un communiqué.
La France s'est déclarée «profondément choquée» par les condamnations à la peine capitale tout en réaffirmant «son opposition constante à la peine de mort». Pour sa part, le président américain, Donald Trump, avait indiqué, le 15 juillet dans un tweet, que «l'exécution de ces trois personnes enverrait un message terrible au monde et ne devrait pas avoir lieu !».