G7 : le coup de poker manqué d'Emmanuel Macron sur le dossier iranien
Avec l'invitation surprise du chef de la diplomatie iranienne au G7, précédée d'annonces optimistes – mais démenties –, le président français a tenté de forcer la main de ses partenaires pour s'imposer comme le médiateur du dossier. Sans succès.
Emmanuel Macron se rêverait en médiateur des crises internationales. A l'occasion du G7 qu'il préside cette année, le chef de l'Etat français avait préparé un véritable coup de poker sur le dossier du nucléaire iranien, qui en aurait fait, en cas de réussite, un candidat légitime pour enfiler le costume. Mais aurait-il mal analysé le jeu de ses adversaires, et plus encore celui de ses partenaires ? Retour sur une séquence confuse qui pourrait entamer la crédibilité du chef d'Etat – et de la diplomatie française – sur la scène internationale.
La visite surprise du ministre iranien des Affaires étrangères Mohammad Javad Zarif au G7 à Biarritz ce 25 août, sur invitation expresse de Paris, était bien partie pour constituer le point d'orgue d'une journée qui annonçait des avancées significatives dans le dossier iranien. Et pour cause, en fin de matinée, une source diplomatique française avait fait savoir à l'AFP que les dirigeants du G7 avaient «convenu de mandater» le président français pour mener le dialogue avec Téhéran, et qu'Emmanuel Macron aurait pour mission «d'adresser un message» à l'Iran sur la base des échanges ayant eu lieu lors de ce sommet.
Si l'on imagine sans mal que le président français, anticipant la venue de Mohammad Javad Zarif, a fait son possible pour pousser ses alliés à trouver une position commune afin qu'il puisse endosser le rôle de médiateur face à Téhéran, la diplomatie française a visiblement mis la charrue avant les bœufs. Quelques minutes après le message du quai d'Orsay, Donald Trump a en effet répondu qu'il n'avait «pas discuté» d'un éventuel message commun à l'Iran, sans même prendre la peine d'évoquer un quelconque mandat du président français sur ce dossier. Placé dans une position délicate, Emmanuel Macron a été contraint de reconnaître qu'il n'avait pas reçu «de mandat formel du G7» pour discuter avec Téhéran, et a en outre été contraint de laisser planer le doute sur une éventuelle déclaration commune.
Crispation de Washington, Berlin reste de marbre
Il y a fort à parier que Paris espérait se trouver en meilleure position lorsque l'avion du chef de la diplomatie iranienne a atterri. Ayant échoué dans sa stratégie initiale, le Quai d'Orsay a alors fait son possible pour limiter la casse. Dans des confidences glissées à l'AFP, une source diplomatique a laissé entendre que la partie française avait informé en amont son homologue américaine de la venue de Mohammad Javad Zarif. Réponse catégorique d'un responsable de la Maison Blanche cité par Reuters, selon qui Donald Trump n'a pas été prévenu à l'avance. Le dirigeant américain a toutefois rectifié, le 26 août, affirmant avoir été prévenu à l'avance.
Au-delà des Etats-Unis, qui se sont retirés de l'accord sur le nucléaire et dont les positions sur le dossier sont sensiblement éloignées de celles de Paris, l'initiative de la diplomatie française n'a pas davantage récolté l'assentiment de Berlin. Le palais présidentiel de l'Elysée a beau avoir précisé que des conseillers diplomatiques allemands et britanniques avaient été associés à une partie de la réunion, Angela Merkel n'a pas hésité à se désolidariser de l'initiative d'Emmanuel Macron, estimant que la rencontre entre Mohammad Javad Zarif et une délégation française constituait un «événement parallèle», et ne faisait aucunement partie du G7 proprement dit. La chancelière allemande, qui n'aurait été prévenue de la visite de Mohammad Javad Zarif que deux heures avant celle-ci, selon une journaliste de NBC, n'aurait-elle pas particulièrement apprécié la surprise ?
Pour couronner le tout, cette séquence diplomatique ne semble pas avoir apporté de réel progrès, même symboliques, en termes de négociations avec l'Iran, dont le ministre des Affaires étrangères avait déjà rencontré Emmanuel Macron seulement deux jours auparavant, le 23 août.
Selon une source diplomatique iranienne citée par Reuters, l'Iran a en effet rejeté ce 25 août toute négociation sur ses capacités balistiques incluse dans le cadre de la proposition française. «Le chemin est difficile, mais ça vaut la peine d'essayer», a conclu le chef de la diplomatie iranienne dans un tweet. Une vision partagée par Emmanuel Macron ?