Budget de l'Italie : traité de marchand de tapis par Moscovici, Salvini s'offusque et réplique
- Avec AFP
Après que le commissaire européen Pierre Moscovici a déclaré qu'un accord avec l'Italie ne pouvait être une discussion de «marchands de tapis», le ministre italien de l'Intérieur, Matteo Salvini, s'est vexé et a exigé le respect des Italiens.
«J'en ai marre des insultes qui arrivent chaque jour de Bruxelles et de Paris». Le vice-Premier ministre italien, Matteo Salvini, s'est offusqué ce 22 octobre de remarques faites par le commissaire européen aux Affaires économiques, Pierre Moscovici, sur le budget italien, retoqué par Bruxelles, dans un climat déjà tendu entre les deux hommes. Pierre Moscovici a en effet laisser entendre qu'un accord entre l'Italie et l'Union européenne ne pouvait être le fruit d'une négociation de «marchands de tapis». Une remarque qui a piqué au vif le ministre italien.
Tout a commencé le 21 novembre, quand Matteo Salvini, leader de la Ligue du nord, un des deux partis de la coalition au pouvoir avec le Mouvement 5 étoiles, a ironisé sur la décision de Bruxelles de rejeter le budget italien. «La lettre de l'UE est arrivée ? J'attends aussi celle du Père Noël», s'est-il moqué.
Le 22 novembre, dans un entretien avec le quotidien italien Corriere della Sera, Pierre Moscovici a répliqué, en demandant à l'Italie de faire preuve de respect et de «ne pas tirer sur le pianiste». «Je ne suis pas le père Noël, je suis le commissaire aux Affaires économiques et je pense que ces questions doivent être traitées avec respect réciproque, sérieux et dignité», a-t-il déclaré, en appelant de nouveau au dialogue. Il a par ailleurs assuré que les commentaires de la Commission sont «toujours prudents», a fortiori dans le cas de l'Italie où le gouvernement est «particulier avec des leaders politiques parfois agressifs».
Dans la matinée, à Paris, Pierre Moscovici a assuré que trouver un accord était «vraiment la volonté de la Commission européenne et la [sienne]». «Nous ne pouvons trouver de solution qu'ensemble», a-t-il dit, en soulignant que si on ne «meurt pas» d'une procédure pour déficit excessif, «il vaut mieux éviter d'y entrer». «Le problème d'un accord, c'est qu'il faut s'entendre sur ce que ça peut être […] On travaille dans le cadre des règles. Ça ne peut pas être une discussion de marchands de tapis», a-t-il lancé.
Une remarque que Matteo Salvini n'a pas laissé passer. «Le peuple italien n'est pas un peuple de marchands de tapis ou de mendiants. Moscivici continue à insulter l'Italie mais son salaire est payé aussi par les Italiens», a-t-il fustigé. «Maintenant, ça suffit : la patience est à bout», a martelé le ministre de l'Intérieur qui a par ailleurs réaffirmé que le gouvernement ne modifierait pas son budget 2019, qui prévoit un déficit à 2,4% du PIB, malgré les spéculations de la presse italienne en ce sens.
Choisir entre Bruxelles et les Italiens
«Nous, des pas en arrière, nous n'en faisons pas», a affirmé Matteo Salvini, en soulignant qu'il ne renoncerait notamment jamais à la réforme de la loi sur les retraites qui prévoit un départ facilité. «Je ne veux me disputer avec personne, mais je dois choisir entre Bruxelles et les Italiens et le choix est facile», a-t-il encore lancé, en demandant «le respect pour le peuple italien».
Dans un ton plus modéré, le chef du gouvernement Giuseppe Conte a lui aussi maintenu le cap sur la loi de finances. «Si c'est dans l'intérêt des Italiens, nous ne sommes disposés à renoncer à rien», a-t-il affirmé, alors qu'on lui demandait à quoi il était prêt à renoncer dans le cadre des négociations avec la Commission. Il a précisé «avoir hâte de dialoguer avec le président [de la Commission Jean-Claude] Juncker et les autres commissaires invités au dîner du 24 novembre».
«J'expliquerai qu'il s'agit d'un budget conçu dans l'intérêt des Italiens et évidemment également de l'Europe : donc il n'y a pas de prétendue rébellion, aucune prétendue désobéissance aux règles communes», a ajouté Giuseppe Conte. Il a en outre souligné que «la réduction de la dette [était] un objectif commun avec l'Europe» : «nous sommes en train de travailler à [sa] réduction» en «orientant le pays vers la croissance». «Nous voulons un pays plus compétitif [...] Les recettes orientées vers l'austérité ces dernières années ont échoué. Ceci est notre recette», a-t-il encore affirmé.