Vers un siège franco-allemand au Conseil de sécurité de l'ONU ?
Le projet évoqué il y a quelques mois par Angela Merkel de doter l'Union européenne d'une présence propre au sein du Conseil de sécurité de l'ONU suscite de nombreux commentaires. La France serait-elle prête à partager son siège avec l'Allemagne ?
Le projet semble faire son chemin. Trois mois après que la chancelière allemande Angela Merkel a suggéré l'idée que l'Union européenne devrait être présente au sein du Conseil de sécurité de l'ONU (où ne siègent que des Etats à titre individuel), des informations laissent entendre que des discussions auraient lieu actuellement pour que la France partage son fauteuil de membre permanent au Conseil de sécurité de l'ONU avec l'Allemagne. Sur fond de Brexit, l'idée serait en quelques sorte d'«européaniser» le Conseil en s'appuyant sur le seul siège permanent dont dispose l'un des pays de l'UE : celui de la France.
Ainsi, s'exprimant le 6 octobre lors d'une conférence intitulée «L'Allemagne et les Nations unies» dans le cadre de la German American Conference qui a lieu chaque année à l'université de Harvard, Christoph Heusgen, l'ambassadeur d'Allemagne auprès des Nations unies, aurait annoncé la tenue de pourparlers entre lui et son homologue français François Delattre pour la mise en place d'un siège permanent franco-allemand au Conseil de sécurité de l'ONU.
„It’s my dream to have Angela Merkel in the Security Council“ says Christoph Heusgen, German Ambassador to the UN, while talking to @TiloJung#GAC18#firesidechatpic.twitter.com/kdjyFSfIwM
— Harvard_GAC (@Harvard_GAC) 6 octobre 2018
Conférence à Harvard avec l’ambassadeur allemand à l’ONU qui annonce des pourparlers avec l’ambassadeur Français pour un siège permanent franco-allemand au conseil de sécurité.
— Rwan (@NapiIV) 6 octobre 2018
Réagissant à ces propos attribués à Christoph Heusgen, l'ambassadeur de France aux Etats-Unis a tenu à assurer que l'idée d'un siège européen au Conseil de sécurité n'était pas réaliste.
(1) les seuls membres des Nations Unies sont des Etats : l’UE n’en est pas un, (2) les membres permanents sont désignés par la Charte , (3) qu’il faudrait amender, ce qui est politiquement inconcevable. https://t.co/9WVOiMotNr
— Gérard Araud (@GerardAraud) 7 octobre 2018
Florian Philippot, le président des Patriotes, s'est élevé contre cette perspective. Sur son compte Twitter, il a comparé le couple franco-allemand à «un couple maître-esclave», la France étant selon lui l'esclave. Il a également prédit «une suite terrible mais inéluctable si notre pays continue d’être sous tutelle et dirigé par des élites anti-nationales».
L’Allemagne veut le siège permanent de la France au Conseil de Sécurité de l’ONU, au nom du « couple franco allemand » (couple maître-esclave) et de l’UE. Suite terrible mais inéluctable si notre pays continue d’être sous tutelle et dirigé par des élites anti-nationales.
— Florian Philippot (@f_philippot) 7 octobre 2018
Contacté par RT France ce 7 octobre, Florian Philippot a assuré avoir également entendu parler d'un projet de partage du siège français lors d’une discussion avec «des diplomates français et allemands à Strasbourg lors de la session parlementaire de la semaine dernière». Pour le président des Patriotes, mouvement qui prône le Frexit, le partage avec l'Allemagne du siège français au Conseil de sécurité représenterait «un affaiblissement de l’influence de la France et remettrait en cause sa capacité à activer son droit de veto». Citant l’exemple du veto opposé par la France sur la guerre d’Irak en 2003, il a rappelé qu'«une place au conseil de sécurité est un poste qui attire du respect et de l’influence. Ce n’est pas pour rien que l’Allemagne le convoite». Dénonçant l’europhilie du président français, Florian Philippot considère qu'Emmanuel Macron est incapable de défendre les intérêts français car «il n’a que l’Union européenne à la bouche».
Pour Charles-Henri Gallois, responsable national de l'UPR, si Emmanuel Macron mettait en place cette transformation du siège français, il s'agirait d'une «haute trahison» qui ferait de lui l'un des «plus grands collabos» de l'histoire.
#ONU : #veto#américain à une résolution du Conseil de sécurité appelant à protéger les #Palestiniens
— RT France (@RTenfrancais) 2 juin 2018
➡ https://t.co/R8XvoylCq3pic.twitter.com/rHkYapr1qB
Quoi qu'il advienne, l'Allemagne siégera au Conseil de sécurité des Nations unies pour la première fois depuis 2012 à partir de janvier 2019. Le Conseil de sécurité de l'ONU comprend 15 membres, dont cinq permanents, disposant d'un droit de veto, (Etats-Unis, Russie, Chine, France, Royaume-Uni) et dix non permanents renouvelés par moitié chaque année pour une prise de fonctions six mois plus tard. Le 8 juin, l’Afrique du Sud, l’Indonésie, la République Dominicaine, la Belgique et l’Allemagne ont été élus pour une durée de deux ans. L'Allemagne a occupé le poste de membre non permanent en 1977-1978, 1987-1988, 1995-1996, 2003-2004 et 2011-2012.
Le Conseil de sécurité de l'ONU est la plus haute instance de l'ONU. Contrairement à l'Assemblée générale, les résolutions qu'il vote sont contraignantes juridiquement. Capable de lancer des opérations sur le terrain, ou d'appliquer des sanctions, le Conseil est le garant du maintien de la paix et de la sécurité internationales.
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