Antidopage : l'AMA maintient la suspension de l'agence russe
Trois mois avant les Jeux Olympiques d'hiver de Pyeongchang, l’Agence mondiale antidopage (AMA) n’a pas levé la suspension de l'agence russe, la jugeant «non conforme» à ses règlements. La Russie dénonce une décision «politisée».
L'Agence mondiale antidopage (AMA) a maintenu le 15 novembre la suspension de l'agence russe antidopage Rusada, après l'avoir autorisé à mener des contrôles sous supervision en juin. La décision, qui n'a pas fait l'objet d'un vote formel, a été approuvée à Séoul le 16 novembre lors d'un Conseil de fondation de l'AMA, qui a suivi l'orientation de son Comité de révision de la conformité, dirigé par Jonathan Taylor.
«Le Comité de révision de la conformité est impressionné par le travail effectué par la Rusada dernièrement», a noté Jonathan Taylor, soulignant les changements positifs tels que l’arrivée du directeur général et la rotation d’une grande partie du personnel. «Nous sommes sûrs que les manipulations ne se passaient pas seulement au niveau de la Rusada, mais aussi du ministère du Sport et du FSB. Avant que ça soit reconnu [par le côté russe], ce point de la feuille de route ne peut pas être considéré comme accompli», a pourtant déclaré Jonathan Taylor.
Le refus d’admettre l’existence d’un «système de dopage d'Etat» contrôlé par le ministère des Sports russe, comme l’affirme le fameux rapport de Richard McLaren, est donc l’un des éléments clés qui n’ont pas permis la levée de la suspension de la Rusada. Une situation proche de l’«impasse», selon le président du Comité olympique russe Alexandre Joukov, venu à Séoul accompagné du ministre russe des Sports Pavel Kolobkov.
«Nous acceptons le fait que notre système national antidopage a échoué. Cet échec a été le résultat d'activités organisées par un groupe d'individus œuvrant pour leur profit. Mais nous réfutons totalement un système de dopage soutenu par l'Etat», a affirmé Alexandre Joukov. Une position régulièrement réitérée par les autorités russes, de même que les doutes sur la véracité des conclusions du rapport McLaren. «Les informations qu’il contient sont contradictoires, non confirmées juridiquement, et nécessitent une vérification sur chaque cas. Cela concerne en premier lieu l’affirmation du recours à des substances dopantes par plus de 1 000 sportifs russes», a noté le responsable russe. Effectivement, en février 2017, l’AMA avait reconnu ne pas disposer d’assez d'éléments pour prouver que les athlètes russes s'étaient dopés, avant d’annoncer en septembre qu’elle s’apprêtait à blanchir 95 des 96 sportifs dont elle avait jusque là examiné le cas.
Une enquête est d’ailleurs en cours au Comité d’enquête russe pour établir clairement les circonstances de la manipulation des échantillons des sportifs russes au sein du laboratoire à Moscou. La justice russe pointe du doigt la direction de la Rusada comme organisateurs présumés du dopage de certains sportifs, y compris l'ex-directeur du laboratoire de Moscou Grigori Rodtchenkov. En poste au moment des premières accusations de la part de l’AMA qui réclamait sa démission, il s’est réfugié aux Etats-Unis, d’où il a lancé ses révélations qui ont servi de base au rapport McLaren.
La #Russie émet un mandat d'arrêt international contre l’informateur de l'Agence mondiale antidopage
— RT France (@RTenfrancais) 28 сентября 2017 г.
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Pourtant, c’est précisément cette enquête en cours qui a été la seconde pierre angulaire pour l’AMA dans sa décision de maintenir la suspension de l’agence antidopage russe. Jonathan Taylor a notamment suggéré que l’AMA réclame l’accès aux échantillons du laboratoire de Moscou, qui sont en train d’être étudiés par les enquêteurs. Si la Russie assure qu’elle les rendra à l’AMA dès la fin de son enquête, l’organisation souligne que cette demande fait partie de la feuille de route établie pour la Rusada, et ne peut pas être pour l'instant considérée comme accomplie.
«Les tentatives visant à influencer l’enquête et dicter des conditions aux forces de l’ordre sont strictement interdites dans n’importe quel système judiciaire au monde», s’est insurgé sur ce sujet Pavel Kolobkov.
L’AMA est pourtant resté intransigeante, et la suspicion persiste autour du sport russe. La décision de l’agence mondiale antidopage intervient alors que le Comité international olympique (CIO), qui attend les résultats de deux commissions, doit décider lors d'une commission exécutive, prévue du 5 au 7 décembre, si la Russie sera la bienvenue aux Jeux olympiques d'hiver de Pyeongchang, en février 2018. Dans le même temps, le Comité paralympique russe et la Fédération russe d'athlétisme attendent les décisions de leur corps international respectif sur la restitution de leurs statuts de membres… des décisions qui avaient pour préalable la levée de la suspension de la Rusada. Les athlètes et les sportifs handicapés russes restent donc dans le flou concernant leur éventuelle participation dans les compétitions à venir.
Philip Craven évoque avec RT la participation des athlètes russes aux Jeux paralympiques de 2018 #russiehttps://t.co/C3SPc0QfC1pic.twitter.com/mvKAJEK2JZ
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Les responsables russes espèrent tout de même que le verdict de l’AMA n’empêchera pas des sportifs «propres» de participer à toutes les compétitions. Un point de vue partagé par certains fonctionnaires de l’AMA, à savoir le secrétaire général de la Fédération internationale de basket-ball Patrick Baumann, qui a estimé que «chaque sportif non dopé [devait] être admis à participer aux JO de Pyeongchang».