La diplomatie russe met en garde Washington contre le transfert à Kiev de batteries Patriot

La diplomatie russe met en garde Washington contre le transfert à Kiev de batteries Patriot© JOHN MACDOUGALL Source: AFP
Un Patriot de l’armée allemande à Kahramanmaraş, en Turquie, le 25 mars 2014. (Photo d’illustration)
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Après avoir longtemps rechigné à le faire, l’administration Biden s’apprêterait à transférer à l’Ukraine des systèmes antiaériens Patriot. La diplomatie russe a dénoncé ce 15 décembre une décision «qui conduit à une escalade» du conflit.

Le Département de la Défense a confirmé le 13 décembre, auprès de Voice of America, son intention de fournir à l’Ukraine des batteries de missiles Patriot. «Une décision qui pourrait être annoncée dès cette semaine», poursuit le média, propriété du gouvernement des Etats-Unis, s’appuyant sur les déclarations de deux fonctionnaires américains. Un peu plus tôt ce jour-là, CNN avait révélé que l’administration Biden finalisait un plan pour transférer le système antiaérien à l’Ukraine.

Une annonce qui n’a pas manqué de faire réagir la diplomatie russe. «Auparavant les experts, y compris de l’autre côté de l’océan, doutaient de la rationalité d’une telle mesure qui conduit à une escalade du conflit et augmente le risque d’entraîner directement l’armée américaine dans les hostilités, mais, comme on dit : allons-y à fond ! Surtout quand c'est au détriment de la vie des autres», a ainsi réagi Maria Zakharova. La porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères a notamment réitéré la position de Moscou sur les livraisons d’armes occidentales à l’Ukraine, ces dernières étant considérées comme des «cibles militaires légitimes» qui seront «détruites ou capturées».

Des performances sujettes à débat

Côté américain, si l’idée d’aider l’Ukraine à contrer les frappes russes fait consensus, ce n’est pas le cas du choix du Patriot. Au-delà des craintes de capture, de son coût et de sa complexité ou encore de sa vulnérabilité une fois déployé, ce système ne jouit pas d’une aussi bonne réputation que le souhaiterait son concepteur Raytheon. «Pourquoi l'Ukraine veut-elle des missiles Patriot qui ne pouvaient pas protéger l'Arabie saoudite contre les drones ?» titre ainsi, sans ambages, Forbes. Le magazine économique rappelle ainsi les ratés des batteries de Patriot censées protéger les installations pétrolières et aéroportuaires saoudiennes contre les raids de missiles et de drones des Houthis.

Au niveau du Pentagone lui-même, cette décision pourrait constituer un revirement par rapport à sa position au début du conflit quand il était question de trouver dans l’urgence une solution aux frappes russes. En mars, le Département de la Défense coupait court aux demandes de déployer en Ukraine un tel matériel car «vous devez mettre des soldats américains avec lui pour le faire fonctionner», comme l’affirmait auprès de Defense One un haut fonctionnaire du Pentagone. «Ce n'est pas un système avec lequel les Ukrainiens sont familiers et comme nous l'avons dit très clairement, il n'y aura pas de soldats américains combattant en Ukraine», insistait-il.

Jusqu’à 90 soldats par batterie et 4 millions de dollars par missile

«C'est un système très complexe, il faut parfois jusqu'à quatre-vingt-dix personnes pour faire fonctionner une batterie complète de Patriot» développe auprès de NewsMax le brigadier général à la retraite Blaine Holt. «Ils vont devoir se former pour l'utiliser», estime l’ancien officier américain. Ce processus «prend normalement plusieurs mois», note de son côté CNN, qui précise certains contours que pourrait avoir le plan du Pentagone.

Selon la chaîne d’information américaine, en cas de feu vert de la Maison-Blanche, les Patriot «devraient être expédiés rapidement et les Ukrainiens seront formés pour les utiliser sur une base de l'armée américaine à Grafenwoehr, en Allemagne», citant des responsables américains. Tout plan de livrer de tels systèmes à l’Ukraine devra, en plus d’être approuvé par le Secrétaire à la défense Lloyd, être signé par le président Joe Biden.

Plusieurs pays alliés des Etats-Unis à travers le monde, tels que l’Allemagne, Israël, l’Arabie saoudite ou encore le Japon, opèrent de tels systèmes d’armes. En plus de son radar et de sa station de contrôle, une batterie de Patriot peut comprendre jusqu’à huit batteries de quatre missiles. Chacun de ces missiles coûte, en moyenne, entre trois et quatre millions de dollars.

Les Patriots font partie des armements régulièrement réclamés par Kiev, au côté notamment du Dôme de fer israélien ou du char de combat allemand Leopard 2. Demande à laquelle Berlin refuse toujours d’accéder. Lors d’une récente interview sur le plateau de LCI, où il a remercié la France pour avoir offert des canons Caesar, le Premier ministre ukrainien Denys Chmyhal, a réclamé des chars, «notamment le Leclerc».

Maxime Perrotin

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