Affaire Pegasus : enquête ouverte à Paris sur l'espionnage présumé de journalistes
Le parquet de Paris a ouvert ce 20 juillet une enquête sur l'espionnage présumé de journalistes français par infiltration de leurs téléphones par le logiciel israélien Pegasus pour le compte de l'Etat marocain. Rabat dément.
Alors qu'un consortium de 17 médias internationaux a affirmé que l'Etat marocain avait espionné des journalistes français par le truchement du logiciel israélien Pegasus, le parquet de Paris a ouvert une enquête ce 20 juillet. Mis en cause, Rabat a démenti toute implication.
Dix infractions, dont «atteinte à la vie privée», «interception de correspondance», «accès frauduleux» à un système informatique et «association de malfaiteurs», vont être étudiées. L'enquête fait suite à la plainte déposée par le site Mediapart dont deux journalistes auraient été espionnés, à laquelle doit s'ajouter une plainte similaire du Canard enchaîné. L'enquête vise également d'autres infractions d'atteintes à un système informatique, telles que l'introduction, l'extraction et la transmission frauduleuses de données, qui peuvent être potentiellement reprochées aux utilisateurs de Pegasus.
Elle concerne aussi la «mise à disposition et détention d'un équipement» permettant des atteintes à un système de données et «l'offre et la vente sans autorisation d'un dispositif de captation de données», qui visent cette fois potentiellement la commercialisation du logiciel et les intermédiaires qui seraient impliqués.
Rabat rejette «catégoriquement» toute relation avec la compagnie israélienne NSO
Plusieurs médias dont Le Monde, le Guardian et le Washington Post ont affirmé le 18 juillet que le fondateur de Mediapart Ewdy Plenel et la journaliste de son média Lénaïg Bredoux avaient été espionnés par les services secrets marocains. Auprès des journalistes du Monde, Rabat a rejeté «catégoriquement les allégations [faisant état d'une] quelconque relation entre le Maroc et la compagnie israélienne».
Le Canard Enchaîné, lui, aurait été visé notamment à travers son ancienne collaboratrice Dominique Simmonnot, aujourd'hui contrôleur général des lieux de privation de liberté, qui a également annoncé qu'elle allait saisir personnellement la justice. Les investigations ont été confiées à l'Office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l'information et de la communication (OCLCTIC), selon le parquet.
Selon l'enquête publiée par le consortium de 17 médias, le logiciel Pegasus, élaboré par l'entreprise israélienne NSO Group, aurait permis d'espionner les numéros d'au moins 180 journalistes, 600 hommes et femmes politiques, 85 militants des droits humains ou encore 65 chefs d'entreprise de différents pays.
Introduit dans un smartphone, le logiciel espion Pegasus permet d'en récupérer les messages, photographies, contacts et même d'écouter les appels de son propriétaire. Ces accusations ont suscité l'indignation d'organisations de défense des droits humains, de médias et de dirigeants politiques. NSO assure pour sa part que son logiciel sert uniquement à obtenir des renseignements contre des réseaux criminels ou terroristes.
Le travail mené par les journalistes se fonde sur une liste obtenue par le réseau basé en France Forbidden Stories et l'ONG Amnesty International. Elle compte, selon eux, 50 000 numéros de téléphone sélectionnés par les clients de NSO depuis 2016 pour une surveillance potentielle.