Covid-19 : les syndicats de police sortent «frustrés» d'une réunion à Beauvau
En pleine épidémie de Covid-19, des policiers s'alarment d'un potentiel manque de préparation en matière d'accueil du public et de protection. Une réunion extraordinaire a été organisée à Beauvau, mais le syndicat Unsa-Police n'est pas convaincu.
L'épidémie de coronavirus qui progresse sur le territoire national est devenu la préoccupation numéro un dans les hôpitaux mais elle inquiète également dans d'autres centres d'accueil du public, tels que les commissariats, avec déjà trois cas de confinement dont deux commissariats parisiens et un à Lille. Les organisations syndicales policières majoritaires s'inquiètent du manque de consignes dont disposent les fonctionnaires et d'un déficit de matériel de protection adéquate. Une réunion de CHSCT extraordinaire a été organisée au ministère de l'Intérieur ce 4 mars à la demande des partenaires sociaux pour évoquer ces sujets.
Contacté par RT France à la sortie de CHSCT, le délégué national d'Unsa-Police, Sofiane Achatib, a fait part de toute sa «frustration» vis-à-vis de l’administration : «Nous portions une demande minimale, qui était la dotation généralisée et individuelle de masques et de gel hydroalcoolique pour nos agents. Le point a été discuté pendant plus d'une heure et demi, tout cela pour nous voir opposer une fin de non-recevoir. Pour le reste, nous n'avons obtenu que des demi-réponses. Nous avions pourtant des questions pour nos adhérents et pour l'ensemble de la population... Il faut comprendre que nos agents sont confrontés à des populations à risque par centaines tous les jours, notamment dans les zones frontalières. Si vous vous rendez dans un commissariat et que vous présentez des symptômes, l'agent doit par exemple vous placer en isolement et vous faire porter un masque tant que vous vous trouvez dans l'enceinte de l'établissement. Et cela au nom du principe de précaution.»
Hélas, en l'absence de consignes et de matériel adapté, les fonctionnaires se trouvent en difficulté et comme l'explique le syndicaliste : «Nous sortons frustrés de cette réunion et on attend toujours des réponses claires à nos questions.» Ce dernier précise d'ailleurs que les conditions demandées par l'intersyndicale de doter les agents de masques et de gel hydroalcoolique ne sont respectées qu'à la préfecture de police de Paris pour le moment. Le préfet de police, Didier Lallement aurait-il obtenu un traitement de faveur pour l'institution emblématique qu'il dirige ?
L'inquiétude monte dans les commissariats
Le 2 mars, un homme de retour d'Indonésie a fait un malaise au commissariat de Lille et les locaux ont dû être fermés pendant un certain temps pour permettre l'intervention des équipes de secours et s'assurer que l'homme en question n'était pas porteur du Covid-19. Les commissariats du XVIe et du XIIIe arrondissement de Paris ont également été confinés brièvement pour des raisons similaires quelques jours auparavant.
Par ailleurs, une simulation de confinement du XVIe arrondissement organisé par la préfecture de police de Paris aurait, selon les informations du Canard enchaîné, tourné au fiasco le 28 février. L'hebdomadaire ajoute que les ordres donnés par la salle de commandement se seraient révélés chaotiques voire inapplicables. Parmi les exemples cités, la ville de Paris aurait reçu pour consigne de faire évacuer une école qui n'existait pas.
Après avoir déjà pointé le manque de préparation lors de l'incendie de l'usine Lubrizol à Rouen, notamment au micro de RT France lors de la marche de la colère policière en octobre 2019, le syndicat Unsa-Police avait annoncé le 3 mars qu'une intersyndicale avait demandé une réunion de CHSCT extraordinaire à Beauvau pour «préserver la santé et la sécuritaire des agents du ministère de l'Intérieur».
— UNSA POLICE (@UNSAPOLICE) March 3, 2020
D'autres syndicats de police ont évoqué le sujet, à l'instar d'Alliance : «Chaque policier doit pouvoir s'équiper de masques de protection» a ainsi exigé l'organisation sur Twitter, qui a aussi interrogé : «L'administration prend-elle toutes les dispositions ?»
[Alerte #Coronavirus] Chaque #policier doit pouvoir s'équiper rapidement de masque de protection et disposer de fiches réflexes @Place_Beauvau@CCastaner@prefpolicepic.twitter.com/gYKBzMSm7j
— ALLIANCE PN (@alliancepolice) February 28, 2020
Dans un entretien accordé à 20 Minutes publié le 3 mars, le secrétaire national d'Unité-SGP, Jérémy Joron a pour sa part demandé : «Les agents confinés doivent-ils être en arrêt maladie ? Ou bénéficient-ils d’une autorisation spéciale d’absence ?» et il a regretté que, confrontés à cette épidémie, bien souvent «les commissaires se retrouvent seuls pour gérer [la situation].»
Un autre syndicaliste de la même organisation, la fameuse Linda Kebbab, a ajouté sur Twitter : «En contact physique quotidien avec des centaines de milliers de personnes de tous horizons, les policiers n’ont ni matériel ni consignes claires alors que chaque jour un commissariat est confiné pour des cas suspects.»
En contact physique quotidien avec des centaines de milliers de personnes de tous horizons, les policiers n’ont ni matériel ni consignes claires alors que chaque jour un commissariat est confiné pour des cas suspects. #gelhydroalcoolique#Masque#CORONAVIRUSENFRANCE#Covid_19frhttps://t.co/TmcAZBIKAh
— Linda Kebbab (@LindaKebbab) March 4, 2020
Dans un communiqué en amont de la réunion à Beauvau le 4 mars, le syndicat Unsa-Police avait aussi demandé des points d'étapes «a minima hebdomadaires» au sujet de l'épidémie de Covid-19 en France. Le délégué national Unsa-Police, Sofiane Achatib a assuré à RT France que cette demande avait en tout cas été acceptée par Beauvau.
— UNSA POLICE POLE CRS (@BNUNSAPoliceCRS) March 4, 2020
Antoine Boitel