Lutte contre le «séparatisme islamiste» : la stratégie d'Emmanuel Macron sous le feu des critiques
Le chef de l'Etat a dévoilé, ce 18 février, son plan pour lutter contre le «séparatisme islamiste». Un sujet sensible pour l'opposition politique, et notamment la droite, qui réclame depuis plusieurs mois davantage de fermeté du gouvernement.
Le déplacement d'Emmanuel Macron à Mulhouse, ce 18 février, était scruté de près par une partie de l'opposition, qui l'attend au tournant sur le terrain de la laïcité. Lors d'une conférence de presse tenue en début de soirée, le chef de l'Etat a annoncé une série de mesures contre le «séparatisme islamiste». Le plan Macron repose sur deux piliers, selon l'AFP : «Celui, plus coercitif, sur le financement des lieux de culte depuis l'étranger ou la scolarisation d'enfants dans des écoles hors-contrat; le second, "positif", qui vise à la "reconquête républicaine des quartiers qui en ont besoin" en s'appuyant sur des services publics plus présents et efficaces et sur le réseau associatif».
«Notre ennemi est le séparatisme», a affirmé le président de la République lors de ce point presse, expliquant entre autres vouloir «former des imams en France, maîtrisant la langue et les lois de la République».
Echange entre @EmmanuelMacron et des jeunes de Mulhouse après près d’une heure de bain de foule du président #separatisme@LEXPRESSpic.twitter.com/UvIepitHbn
— Marylou Magal (@marylou_magal) February 18, 2020
Un peu plus tôt dans l'après-midi ce 18 février, Emmanuel Macron avait toutefois appelé à éviter la stigmatisation des musulmans : «Il ne faut pas stigmatiser parce qu'on est tous Françaises et Français, mais il ne faut pas laisser des gens quitter la République en disant elle n'apporte plus ses promesses.»
LR crie au laxisme, Mélenchon dénonce une «hypocrisie» sur la laïcité
Une série de déclarations qui ont fait réagir la classe politique. Le député Les Républicains Julien Aubert s'en est vivement pris au chef de l'Etat. «Tribunal des flagrants délires... Incroyable tortillement sémantique macronien pour ne pas "stigmatiser". Donc quand on dit séparatisme islamiste, on vise moins l’islam que quand on parle de communautarisme islamiste ?», s'est-il questionné sur Twitter.
Tribunal des flagrants délires ... Incroyable tortillement sémantique macronien pour ne pas « stigmatiser ». Donc quand on dit séparatisme islamiste, on vise moins l’islam que quand on parle de communautarisme islamiste ? @lesRepublicains (1/3)
— Julien Aubert (@JulienAubert84) February 18, 2020
Sur CNews, le vice-président délégué de LR Guillaume Peltier a lui accusé le chef de l'Etat «de non-assistance à pays en danger, tant la situation est lourde et grave». «Il faut certes une prise de conscience mais aussi des actes forts et des actes clairs parce que nous sommes en train de perdre la guerre contre l'islam politique», a-t-il ajouté.
Guillaume Peltier, député LR de Loir-et-Cher, sur le séparatisme islamiste : « J’accuse Emmanuel Macron de non-assistance à pays en danger » #LaMatinalepic.twitter.com/tWaTRj9K9i
— CNEWS (@CNEWS) February 18, 2020
Du côté du Rassemblement national, le chef de l'Etat est critiqué pour sa gestion de l'immigration, qui serait en partie responsable de la montée de l'islamisme, selon ce parti. «Le séparatisme islamiste est le résultat de la colonisation de peuplement islamique. Tant que cette évidence n’est pas admise par ceux qui détiennent le pouvoir, il n’y a aucune victoire à attendre», a dit Jean Messiha, membre du bureau national du RN, dans une tribune à Valeurs Actuelles.
Le maire de Béziers Robert Ménard, élu en 2014 avec le soutien du FN, est lui moins critique. S'il déplore le manque «d'actes» d'Emmanuel Macron en ce qui concerne la lutte contre le «séparatisme islamiste», il note toutefois un «progrès».
"#séparatisme" islamique. @EmmanuelMacron progresse, au moins au niveau des mots. Pour ce qui est de la réalité du terrain... https://t.co/npNg4Uuv9R
— Robert Ménard (@RobertMenardFR) February 18, 2020
A gauche, Jean-Luc Mélenchon, le chef de file des Insoumis, s'est montré très critique à l'égard de l'initiative d'Emmanuel Macron, dénonçant une forme d'«hypocrisie». «Monsieur Macron décide aujourd'hui de parler de communautarisme et de séparatisme. Mais pour lui, la laïcité est à géométrie variable. Assez d'hypocrites, de tartuffes et de simulateurs !», a-t-il déclaré sur BFM TV.
Monsieur #Macron décide aujourd'hui de parler de #communautarisme et de #séparatisme. Mais pour lui, la #laïcité est à géométrie variable. Assez d'hypocrites, de tartuffes et de simulateurs ! pic.twitter.com/8oWXOV87ZJ
— Jean-Luc Mélenchon (@JLMelenchon) February 18, 2020
Antoine Léaument, responsable de la communication numérique de Jean-Luc Mélenchon et candidat LFI aux élections municipales à Châteauroux, voit lui une stratégie politique visant à mettre sous le tapis la très controversée réforme des retraites. «"Islam", "communautarisme", "musulmans", "islamisme", "séparatisme". Toute la journée sur les chaînes d’info. À la peine avec sa loi retraites, Macron décide de souffler dans le dos de Le Pen, elle aussi dépassée. À un mois du 1er tour des municipales, la ficelle est grosse», twitte-t-il.
«Islam», «communautarisme», «musulmans», «islamisme», «séparatisme».
— Antoine Léaument (@ALeaument) February 18, 2020
Toute la journée sur les chaînes d’info.
À la peine avec sa loi #retraites, #Macron décide de souffler dans le dos de #LePen, elle aussi dépassée.
À un mois du 1er tour des municipales, la ficelle est grosse.
La suite de son plan après les municipales
Emmanuel Macron compte à nouveau aborder la question du «séparatisme islamiste» dans les prochains jours. Il devrait effectuer un second déplacement la semaine prochaine et continuer à présenter la suite du plan après les élections municipales des 15 et 22 mars. Au total, quelque 25 actions concrètes devraient être annoncées.
Le débat sur la montée du communautarisme musulman s'est durci ces derniers mois, alimenté par de vives polémiques sur la laïcité, le port du voile ou le radicalisme. Une récente polémique sur une mère voilée lors d'une sortie scolaire, déclenchée par un élu RN, a divisé jusqu'au sein du gouvernement.
Depuis des mois, le chef de l'Etat a fait de la lutte contre le communautarisme et l'islam radical un de ses chevaux de bataille, notamment dans son discours après l'attaque à la préfecture de police de Paris.