Suppression des régimes spéciaux : des centaines de CRS se font porter pâles
Les policiers membres des CRS avaient déjà menacé le gouvernement d'actions eu égard à la pénibilité de leur métier. Résultat, le jour du discours du Premier ministre sur la réforme des retraites, ils sont des centaines à se faire porter pâle.
Les policiers nationaux ne bénéficiant pas du droit de grève, ils font entendre leur malaise en se déclarant «consultants», c'est-à-dire qu'ils ont pris un rendez-vous médical pour se faire porter pâles. C'est ce qu'ont fait des centaines de membres des Compagnies républicaines de sécurité (CRS) ce 11 décembre, dès le matin. Selon les informations du Figaro, ils étaient déjà 790 dans ce cas à 11h en fin de matinée alors qu'Edouard Philippe n'avait pas encore pris la parole au sujet de la réforme des retraites au Conseil économique, sociale et environnemental. Un discours très attendu au cours duquel le Premier ministre a confirmé la fin des régimes spéciaux. Le chef du gouvernement a eu beau annoncer que certains métiers spécifiques de la police conserveraient la fameuse bonification dite du «cinquième» (une annuité offerte tous les cinq ans), ce fut peine perdue : les syndicats majoritaires du secteur ont appelé à des actions fermes pour conserver ce statut pour tous les effectifs, et pas seulement «ceux exposés aux missions dangereuses».
«La colère du terrain est immense, car les CRS n’en peuvent plus d’être employés n’importe comment depuis des mois, avec tous les mouvements sociaux», a expliqué le secrétaire général d'Unsa-Police, Philippe Capon au Figaro.
L'association policière UPNI (Union des policiers nationaux indépendants) a estimé quant à elle sur son compte Facebook que 1 100 CRS s'étaient fait porter pâles à 14h ce 11 décembre. Et de proposer : «Et si on le faisait le jour d'une manif nationale ? Et si on le faisait le samedi des Gilets jaunes ?»
Contacté par RT France, le porte-parole de cette organisation Jean-Pierre Colombies a prévenu : «Là, ça va secouer méchamment ! Les patrons de syndicats sont remontés comme des coucous et les promesses du gouvernement n'engagent que ceux qui y croient, les partenaires sociaux l'ont enfin compris : on ne peut pas détacher le statut spécial de la police de celui de la fonction publique globale !» Et l'ancien commandant de police de présager : «Bonjour l'angoisse pour le gouvernement si les flics commencent à mettre la crosse en l'air ! Tout le monde s'accorde à dire qu'il s'agissait du dernier rempart avant le contact direct pour l'Elysée et le gouvernement. S'ils jouent avec le feu de la sorte, ils prennent le risque de se trouver en prise directe avec les manifestants dorénavant. Le pouvoir tenait principalement grâce à la solidité de la mobilisation policière... Si cette dernière lâche du lest, ça va devenir compliqué pour eux. Attention danger !»
Interrogé par L'Express, le délégué aux CRS du syndicat Unsa-Police David Michaux a également signalé que les policiers demandaient «une plus grande reconnaissance» de leurs missions et une «égalité entre les statuts des gendarmes mobiles et ceux des CRS». Il a encore souligné : «Nous demandons à être reçus au ministère de l'Intérieur. Actuellement, on se sent délaissés, on est les oubliés de cette réforme, on n'a aucune considération.»
Bonjour l'angoisse pour le gouvernement si les flics commencent à mettre la crosse en l'air
Selon les informations du Figaro, «on compterait beaucoup de CRS absents dans la zone Nord», mais également dans la CRS 21, la CRS 33, la CRS 55 et celle qui œuvre à Hendaye (Pyrénées-Atlantiques), alors que cette zone frontalière avec l'Espagne est sous haute sécurité du fait de la pression migratoire
Le 2 décembre, une compagnie de CRS du Val-de-Marne avait déjà symboliquement déposé casques et boucliers et le 4 décembre, une compagnie d'intervention s'était faite presque entièrement porter pâle en Isère près de Grenoble (27 membres sur 29 dans la CDI 38). La colère monte depuis de longs mois dans ce secteur, voire depuis la fin de l'année 2016, lorsqu'un mouvement spontané était né dans les rangs des forces de l'ordre à la suite des violences commises à Viry-Châtillon (Essonne) : les fameux «policiers en colère».