Enseignement : appel unanime à la grève le 12 novembre, une première depuis 2011
Le ras-le-bol est total : suppressions de postes, violence, conditions de travail exécrables, salaires gelés et parmi les plus bas d'Europe... Les enseignants sont en colère, et ils le feront unanimement savoir le 12 novembre.
Une première depuis 2011 : tous les syndicats représentant l'ensemble des personnels de l'Education nationale, qu'ils soient réformistes ou dans l'opposition totale au gouvernement, ont appelé à faire grève le 12 novembre. Les écoles, collèges et lycées risquent donc d'être fortement perturbés. Le ministre de l'Education nationale, Jean-Michel Blanquer, fera face à sa première confrontation depuis sa prise de poste en mai 2017.
Les griefs sont nombreux, notamment la suppression de 2 650 postes dans les collèges et lycées publics pour la rentrée 2019. Ainsi, FSU, CFDT, Unsa, Sgen, Snalc, CGT, FO et Sud réclament dans un communiqué commun l'annulation de cette décision. «Ces suppressions de poste sont décidées "en même temps" que le ministre présente son projet de loi pour l’école de la confiance», jugent les syndicats, qui relèvent un paradoxe dans la politique gouvernementale sur l'Ecole. «La fin de la priorité budgétaire conjuguée aux changements de pieds incessants de politique éducative, au mode de pilotage vertical et aux mises en cause des résultats de l’école sont vécus comme une absence de reconnaissance et une remise en cause de la professionnalité des personnels», ajoutent les auteurs du communiqué.
Contactée par l'AFP le 10 novembre, la secrétaire générale du Sgen-CFDT Catherine Nave-Bekhti assure que les personnels «ne comprennent pas» les réductions d'effectifs dans le secondaire, au regard de la poussée démographique attendue en collège et lycée. L'agence des statistiques du ministère de l'Education, la Depp, prévoit effectivement une hausse de 40 000 élèves à chaque rentrée entre 2019 et 2021. Logiquement, ces suppressions de postes passent mal. Néanmoins, les différents membres du gouvernement, tels que le ministre de l'Action et des Comptes publics Gérald Darmanin, ont déjà esquissé une solution : le recours à davantage de contractuels en lieu et place d'un recrutement d'enseignants par voie de concours. A la différence des agents titulaires, les contractuels constituent un personnel recruté à contrat court, plus facile à licencier, et n'ayant pas reçu ou obtenu le concours de la profession.
Avec @olivierdussopt nous avons engagé une transformation profonde de la #FonctionPublique :
— Gérald DARMANIN (@GDarmanin) September 14, 2018
👉🏼Vraiment reconnaître les mérites
👉🏼Encourager la mobilité notamment par la formation
👉🏼Étendre le recours au contrat
👉🏼Moderniser le dialogue social https://t.co/FhTarHNJYH
Une mesure qui peut étonner lorsque, dans le même temps, l'Etat, par la voix d'Emmanuel Macron, souhaite sanctionner les entreprises privées abusant des... contrats courts, par un système de «bonus-malus». Logiquement, les syndicats accusent depuis plusieurs mois «la casse du statut général de la fonction publique».
La réforme du lycée professionnel passe mal
Certains, notamment CGT, Sud, FO, dans des communiqués additionnels, s'insurgent également contre plusieurs réformes Blanquer : la réforme de l'enseignement professionnel et la réforme du lycée.
Parmi les points les plus sensibles de ces réformes, la fusion des lycées pros avec les Centres de formation d'apprentis (CFA) cristallise une certaine colère chez les enseignants. La CGT constate pour sa part une contradiction gouvernementale lorsque «le ministre prétend vouloir revaloriser la voie professionnelle, [quand il] organise une réforme pour économiser des moyens sur le dos des PLP [Professeurs de lycée professionnel] et des élèves».
Le «Collectif Touche pas à mon lycée pro», rassemblant des professeurs du lycée professionnel, ont d'ailleurs écrit une tribune dans Libération le 8 novembre. Ceux-ci estiment que la réforme du lycée professionnel «fragilise l’acquisition des compétences et des connaissances des élèves». Ils dénoncent l'opacité du projet : «En l’état, la réforme est un dossier de presse sorti en mai, quelques informations supplémentaires depuis, mais aucune concertation, aucun débat, très peu d’échos dans la presse.»
Avec la fusion des lycées pros et des CFA, les professeurs de lycée professionnel redoutent la réduction d'heures concernant des matières fondamentales (histoire, mathématiques ou français), qui irait à l'encontre de l'esprit républicain de l'école. «Le lycée professionnel doit rester pour les élèves des années d’apprentissage de la citoyenneté grâce à la formation d’esprits éclairés, critiques et émancipés», ajoute l'écrit de la CGT.
Enseignant, une profession de plus en plus difficile
Evidemment, de nombreux communiqués d'appoint mettent en évidence les conditions de travail compliquées des enseignants, à l'image des violences récemment médiatisées par le mouvement #PasDeVague, après l'affaire de l'enseignante braquée au lycée de Créteil.
«Tu me mets présent» : à #Créteil, un élève braque sa professeur avec une arme (VIDEO)
— RT France (@RTenfrancais) 20 octobre 2018
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Dans leur majorité, les syndicats s'offusquent en outre du niveau de rémunération des professeurs, parmi les moins bien payés de l'Union européenne, alors que leur charge s'alourdit année après année (les statistiques de l'Insee estiment à 41 heures la moyenne horaire par semaine pour un professeur en second degré). Ainsi, le SNALC rappelle que le gel des salaires des enseignants nuit «à [leurs] conditions de vie et sont un frein à l’attractivité de [leurs] professions déjà fort mal en point».
L'appel massif à une mobilisation de professeurs est inédit depuis 2011. Les enseignants s'étaient alors mis en grève contre une réforme des carrières et de l'évaluation des professeurs, mesure qui avait ensuite été supprimée après la victoire de François Hollande à la présidentielle.
Quant à savoir si les professeurs seront cette fois-ci écoutés...
Bastien Gouly
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